Au lendemain de la première guerre mondiale, les démocraties libérales traversent une profonde crise dont les origines sont diverses. La mutation en économie dirigée des pays prenant part au conflit pour faire face à l'effort de guerre a eu pour conséquence un gonflement exponentiel des dettes nationales et une inflation galopante dont les effets seront amplifiés par la grave dépression des années 30. Mais la crise revêt également une dimension politique. C'est en effet à l'épreuve des difficultés économiques que les faiblesses du fonctionnement des démocraties libérales se font ressentir, dans un contexte de développement d'idéologies telles que le fascisme et le communisme, consubstantiellement opposées aux principes démocratiques. La crise est enfin sociétale. La Grande Guerre a provoqué une réorganisation sociale, non sans s'expliquer par une crise des valeurs à laquelle il faut associer les profonds traumatismes moraux engendrés par les horreurs du conflit. La peinture d'Otto Dix, Invalides de guerre jouant aux cartes, en 1920 l'illustre de manière saisissante. Si la crise est multiforme et générale, elle ne laisse pas augurer de la manière dont elle frappe les différents Etats au sortir de la Première guerre mondiale : Les démocraties ont-elles toutes été frappées de la même manière par les difficultés subséquentes de l'immédiat après-guerre ? Il convient de noter en premier lieu que si la démocratie sort victorieuse de la Première guerre mondiale, cela n'est pas sans une remise en cause généralisée (I) que la Grande Crise ne fera qu'intensifier, mais dans des proportions différentes en fonction des pays (II).
[...] Aux Etats-Unis, la production industrielle globale diminue de celle de l'acier, de 55%. Le cercle vicieux a pour conséquence une augmentation drastique du chômage, frappant plus particulièrement les anciens combattants. La Grande-Bretagne enregistre le chiffre de 1,2 million de sans-emploi en millions une année plus tard. Parmi tous les pays touchés par ces difficultés économiques, l'Allemagne connaît une crise des plus graves. En plus des difficultés déjà évoquées, l'Allemagne doit supporter le poids de la défaite, ayant été reconnue coupable du déclenchement du conflit par le traité de Versailles en date du 28 juin 1919. [...]
[...] Parmi elle, se doivent d'être cités, le Banking Act dont l'objectif est d'éviter l'extension de la panique qui a conduit à la faillite de nombreuses grandes banques : les agences sont fermées, puis rouvertes progressivement sous le contrôle étatique ce qui garantit la solvabilité des banques. D'autres mesures associées viseront à plus de transparence dans les activités bancaires. Contre le chômage, des agences fédérales sont ouvertes pour associer les chômeurs à une politique de travaux publics. Pour lutter contre la surproduction agricole et la subséquente baisse des prix, l'Agricultural Adjustement Act (AAA) prévoit un programme d'indemnisation des agriculteurs qui réduisent leurs cultures. [...]
[...] De 1924 à 1931, l'Allemagne verse 10,8 milliards de reichsmarks de réparations et restait créditeur de 20,5 milliards de marks. Les élections de 1928 traduisent cette embellie économique sur un plan politique : la coalition de Weimar retrouve la majorité tandis que ses adversaires, à l'exception notable du KPD, perdent de nombreux sièges. Mais l'amélioration de la situation économique n'est qu'apparente et l'économie allemande est particulièrement fragile quand le crash boursier de 1929 éclate. Cette même année, les créances étrangères en Allemagne étaient de 25 milliards de marks, dont 12 milliards à court terme. [...]
[...] À partir de 1923 pourtant, le niveau de vie moyen commence à augmenter, mais cela masque difficilement la persistance des inégalités et des conflits. La grande grève de 1926 que les mineurs britanniques entament pour défendre le niveau de leurs salaires est un échec social aux conséquences politiques : le droit syndical aux fonctionnaires est supprimé, le droit de grève est restreint. Plus que des droits, c'est la confiance en la démocratie des classes populaires insatisfaites, et celle des classes moyennes, effrayées par la peur provoquée par ces désordres, qui est ébranlée. [...]
[...] La démocratie britannique sort donc consolidée de la Grande Crise. Certes, cela ne se fait pas sans difficulté. Bien que son influence soit faible, il existe tout de même un mouvement fasciste, celui de Mosley, crée en 1932. Les manifestations de chômeurs sont pacifiques mais massives. Toutefois la démocratie britannique trouve un atout dans le parti travailliste qui cherche résolument la réforme plus que la révolution, non pour imposer des positions partisanes, mais pour défendre les intérêts du pays, comme le note Winston Churchill dans son Journal politique : Représentant nominalement des partis opposés, des doctrines contraires, des intérêts antagonistes, ils [Baldwin et MacDonald] ont prouvé qu'ils étaient en réalité plus proches l'un de l'autre, par leurs vues d'avenir, leurs tempéraments, leurs méthodes, que n'importe quels hommes d'Etat qui furent Premiers ministres, depuis que cette charge existe dans la Constitution [ ] La Grande-Bretagne constitue l'illustration intermédiaire d'une démocratie renforcée entre une démocratie allemande détruite et une démocratie américaine renouvelée par la crise Le New Deal ou le renouvellement de la démocratie américaine La capacité de renouvellement de la démocratie américaine face à la crise est fortement corrélée au destin d'un homme : Franklin Delano Roosevelt. [...]
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