Différentes conceptions de l'Histoire, Antiquité, mémoire orale, mémoire écrite, recherche, exploration, preuve
Si l'humanité a très rapidement conservé la mémoire, orale ou écrite, d'événements ou de personnalités (listes ou dates gravées, récits transmis de génération en générations comme l'Iliade), l'histoire au sens moderne serait née en Grèce au Ve siècle avant Jésus-Christ, avec Hérodote et Thucydide, par un abandon du mythe collectif au profit d'une recherche désintéressée de la vérité. Le premier a rédigé une longue Enquête, du grec Historiai, littéralement « recherche, exploration », de Histôr, « celui qui sait, qui connaît ». Sur un ton vivant, semé d'anecdotes, il raconte des événements récents. Ce qui le signale à la postérité est la recherche des causes des événements, et l'attention qu'il porte à ses sources, distinguant les faits dont il a été le témoin (en Grèce ou lors de ses voyages, par exemple en Égypte) de ceux qui lui ont été rapportés, le sûr du vraisemblable ou de l'invraisemblable. Thucydide, à partir de ses propres notes accumulées au fil des années, puisqu'il fut acteur des événements qu'il relate, a rédigé une Histoire de la guerre du Péloponnèse. Son apport réside dans une méthode systématique : exactitude des sources, recherche des faits et des preuves, analyse des différentes causalités lointaines ou immédiates d'un même événement, analyse psychologique fouillée…
[...] À noter l'aura de l'Histoire des Berbères et de l'Histoire universelle du Tunisien Ibn Khaldoun (XIVe siècle). En Extrême-Orient s'instaure une tradition historique chinoise, fondée par Confucius (VIe siècle avant J.-C.), marquée par la recension annalistique des faits, souvent une intention politique et morale au service des empereurs, et un effacement du rédacteur derrière les sources (absence de recul critique, respect de la tradition). Principales différences avec l'histoire occidentale de la même époque : l'indifférence à la recherche des causes, et l'absence de sens de l'histoire UNE SÉCULARISATION PROGRESSIVE La Renaissance, avec le retour sur l'Antiquité et les exigences nouvelles liées à la Réforme, marque la naissance d'une histoire érudite, qui s'intéresse à la critique des sources. [...]
[...] Les valeurs devant couronner le processus sont, bien entendu, celle de la Révolution française : tolérance, liberté, égalité. Dans son ouvrage précité, Hegel trouve des accents dignes de Bossuet, le mot Esprit universel remplaçant la Providence : La masse gigantesque des volontés particulières, des initiatives et des entreprises des hommes, voilà les instruments et les moyens qu'emploie l'esprit universel pour atteindre sa fin ultime ; intérêt des romantiques pour le Moyen Âge et la valeur épique et romanesque de l'histoire ; travaux des historiens libéraux soucieux, comme François Guizot, de porter un jugement sur la Révolution (pour en retenir des aspects jugés positifs, comme les droits de l'homme, la Constitution, le régime parlementaire) et en écarter les dérives (jacobinisme, Terreur), et de tirer une leçon identique de l'histoire anglaise (Histoire du règne de Charles Ier : condamnation de Cromwell et valorisation de la monarchie parlementaire et représentative). [...]
[...] Elle suit un plan divin, elle a un sens, qui va vers le développement progressif d'une religion supérieure aux autres, avec une origine, la création du monde, une étape centrale, la venue du Messie, et une fin qui verra son triomphe : retour sur terre du Christ pour le Jugement dernier). Les sources principales sont la Bible (Ancien et Nouveau Testament) et les œuvres des Pères de l'Église, la langue le latin. La vraisemblance, la rigueur sont constamment sacrifiées par les auteurs, issus de l'Église (moine, clercs), à l'intention religieuse. [...]
[...] Peu à peu, cependant, émerge parallèlement une littérature historique nationale, rédigée dans la langue des laïcs, le français pour notre pays. Les prescripteurs ne sont plus l'Église, mais les politiques : les rois et les nobles, désireux de voir célébrer leur généalogie, leurs exploits ou ceux de leurs ancêtres, d'assurer leur légitimité et l'ordre social établi. On peut citer la Conquête de Constantinople de Villehardouin (XIIe siècle), l'Histoire de Saint Louis par Joinville (XIIIe siècle), les chroniques de Froissart, Philippe de Commynes aux siècles suivants. [...]
[...] La redécouverte de l'histoire romaine suscite une révision du sens de l'histoire. Ainsi, un Vico (La Science nouvelle) émet une théorie cyclique : succession, pour chaque civilisation, de trois phases (naissance, développement, décadence), avec des allers retours entre civilisation et barbarie, et un enchevêtrement des différentes civilisations. Si, au XVIIe siècle, un Mabillon fait avancer la science historique par une méthode de critique des sources, par la distinction entre documents authentiques et faux, tandis qu'un Richard Simon élabore une audacieuse critique interne qui détache l'histoire de la religion, de la morale et de l'esthétique, l'époque se caractérise cependant : par l'influence renouvelée du providentialisme (Discours sur l'histoire universelle de Bossuet) ; par une récupération de l'histoire pour célébrer la force grandissante de l'absolutisme royal (Boileau, Racine comptèrent parmi les historiographes de Louis XIV) ; et par un mépris affiché de Malebranche, Descartes, Bacon, pour une discipline jugée inférieure aux sciences exactes alors explorées. [...]
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