En 1983, dans un article intitulé "Un Occident kidnappé" paru dans le journal Le Débat, Milan Kundera disait de l'Europe orientale que si elle était alors située "politiquement à l'Est", elle était aussi "géographiquement au Centre et culturellement à l'Ouest". Il soulignait ainsi l'invention politique d'une entité géographique constituée de "démocraties populaires", opposée à l'Europe occidentale en construction et forgée dans le cadre de la Guerre froide, mais aussi le fait que les sociétés civiles ne se reconnaissaient pas forcément dans le modèle imposé par l'Union soviétique (...)
[...] Ainsi, le contrôle des pays de l'Est par les communistes va permettre à l'URSS de créer un bloc dans lequel elle va imposer son modèle et oeuvrer à l'édification du socialisme. Dès 1947, le qualificatif de "démocraties populaires" est utilisé pour désigner un nouveau type de régime établi dans les pays de l'Est, reproduisant le modèle soviétique. On peut alors remarquer l'uniformisation politique et économique sur le modèle soviétique avec la mise en place d'un système totalitaire calqué sur celui de l'URSS. [...]
[...] Une certaine marge de liberté tolérée par Moscou conduit les démocraties populaires à des évolutions différentes. Les politiques nationales évolues: poursuite de la "voie nationale vers le socialisme" en Yougoslavie, réconciliée avec l'URSS en 1955; Albanie d'Enver Hoxha rompant avec Moscou en 1960 pour se rapprocher de Pékin, refus de la déstalinisation en Roumanie qui tend progressivement vers la dictature avec l'avènement de Ceausescu en 1965, assouplissement du contrôle sur les sociétés civiles en Pologne et en Hongrie. Ensuite, des réformes économiques diversifiées sont mises en place: décollectivisation des terres en Pologne sous la direction de Gomulka, plus large autonomie des entreprises en RDA et en Bulgarie, introduction toute relative du capitalisme en Hongrie ("socialisme du goulash"), ouverture économique de la Roumanie à l'Occident. [...]
[...] De 1948 à 1989, les démocraties populaires ont vu leur histoire écrite par la tutelle de Moscou. Leur implosion à l'automne 1989 découle en grande partie des choix politiques des dirigeants de l'URSS, et notamment du rôle joué par Gorbatchev. Elle est plus globalement la conséquence de dysfonctionnements d'un système miné de l'intérieur par ses échecs économiques et, selon les cas, par l'indifférence ou l'hostilité des populations envers des régimes autoritaires imposés de l'extérieur. Elle a été également encouragée par l'Europe occidentale, à laquelle les démocraties populaires aspirent de plus en plus à participer à mesure qu'elles réforment leur économie et que le rideau de fer devient plus perméable après les accords d'Helsinki. [...]
[...] L'URSS n'y survit pas, tandis que l'Europe réunifiée entre dans une nouvelle phase de sa construction. [...]
[...] Pendant quarante ans, ces États vivent à l'heure soviétique. Mais en 1989, ils se libèrent du joug du "grand frère" soviétique, traduisant ainsi la faillite de l'ordre imposé par l'URSS. Comment l'Europe de l'Est a-t-elle vu s'imposer le système soviétique, comment a-t-elle réagi et pourquoi s'y est-il effondré? De 1947 au milieu des années 1950, l'Europe de l'Est est plus ou moins brutalement satellisée et stalinisée. Puis, du milieu des années 1950 au début des années 1970, elle connaît une période ambivalente de contestations réprimées et d'émancipation contenue dans les cadres de la souveraineté limitée. [...]
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