Le XIXe siècle est le théâtre de mutations techniques, sociales et culturelles inédites pour la société française, qui s'accélèrent à partir de 1850. Un foisonnement culturel se fait sentir, sous des formes plurales et nouvelles avec l'apparition en filigrane d'une culture médiatique, terme forgé par l'américain John Cawelti et préféré à celui de « culture de masse », trop imprégnée de connotations négative et idéologique.
La culture médiatique est révolutionnaire en ce qu'elle imprègne les populations qui étaient jusque-là exclues, elle met donc en contact des milieux qui n'en entretenaient aucun et ce faisant une démocratisation s'opère. De plus, elle se fait l'écho des mutations sociales et techniques en intégrant elle aussi une logique marchande, si bien que de nombreux auteurs l'ont qualifiée d' « industrie culturelle ».
D'où la définition de la culture médiatique donnée par Dominique Kalifa comme « ensemble des productions, des pratiques et des valeurs modelé par les agents de l'industrie culturelle ». Donc, la culture médiatique est avant tout l'émergence d'une offre culturelle diversifiée, qui précède et suscite une demande, qui, elle, émergera ouvertement au lendemain de la Première Guerre mondiale.
Il convient dès lors de s'interroger : en quoi l'émergence de la culture médiatique en France dans la seconde moitié du XIXe siècle devient-elle le corollaire inévitable de la modernisation technique, sociale et politique du pays, étant tantôt sa conséquence, tantôt sa cause ?
[...] Il remporte un vif succès : à la fin du XIXème siècle, on recense 274 salles de café concert à Paris dont les plus célèbres sont Le Mirliton et Le Chat Noir. Le théâtre non plus n'échappe pas à la logique marchande dans cette atmosphère de consumérisme culturel : les productions sont adaptées au public pour maximiser leur rentabilité ; et ce faisant les recettes du théâtre fusent et atteignent un record en 1867. Le nombre de théâtres reflète ce succès : on passe de 25 théâtres parisiens en 1848 à 75 vers 1900 ; et certaines pièces restent longtemps à l'affiche comme celle de Lavedan, Le Prince d'Aurec, satirisant la haute société, qui est jouée plus de cent fois. [...]
[...] Les années 1860, qui marquent en matière d'offre culturelle un véritable bouleversement, sont l'illustration de cette pénétration de la logique industrielle dans le domaine culturel. Durant cette décennie s'est produit un nombre important de transformations économiques se reflétant dans la démocratisation de la culture : l'élévation faible, mais soutenue du pouvoir d'achat due à une embellie économique permet aux classes populaires d'affecter une part croissante de leur budget à la consommation culturelle, c'est l'invention du consumérisme culturel. D'autre part, comme l'a montré Alain Corbin la notion de temps libre qui apparaît dans les années 1850 et 1860 est intrinsèquement liée à l'industrie : avant l'âge industriel, le temps était pensé soit comme un temps de travail, soit de non travail, c'est-à-dire de temps mort, voire de temps d'oisiveté pour les aristocrates. [...]
[...] Cependant, l'objectivité de ces analyses souffre de pesanteurs idéologiques issues du contexte politique de post - totalitarisme qui a vu le pouvoir accaparer les médias de masse pour en faire des instruments de propagande afin d'aliéner les populations et les rallier à leurs projets. Il s'agit de soupeser cette vision de la culture de masse comme rouleau - compresseur nivelant l'horizon de chacun, et délivrant un message homogène à un public uniforme. Car, si le message est homogène, il est reçu de manière différente. Selon Eric Macé et Eric Maigret, on assiste moins à l'homogénéité des représentations qu'à l'homogénéisation des manières d'exprimer ses différences. [...]
[...] Colin - (2)Penser les médiacultures : nouvelles pratiques et nouvelles approches de la représentation du monde, sous la direction d'Eric Macé et Eric Maigret, Paris , A. Colin - Alain CORBIN, L'Avènement des loisirs, 1850-1960, Flammarion - (4)Marc MARTIN, La réussite du Petit Journal ou les débuts du quotidien populaire. - (5)Christian PROCHASSON, Les années électriques : 1880-1910, Paris Découverte - Sciences Humaines N°170, avril 2006, La culture de masse - Dominique KALIFA, La Culture de masse en France, 1860-1930, tome la Découverte - Christian PROCHASSON in Les formes de la culture, sous la direction d'André BURGUIERE, Paris Seuil - Antoine de BAECQUE et Françoise MELONIO, Lumières et libertés :les dix huitième et dix neuvième siècles, Paris Seuil - Pascal DURAND, La culture médiatique au XIXème siècle : essai de définition périodisation , Quaderni volume 39, pp. [...]
[...] La libéralisation de la presse en 1868 qui abolit la censure marque elle aussi une étape certaine, en laissant la possibilité aux journaux de proposer toutes sortes de polémiques dont leurs lecteurs sont avides. Ces transformations favorisent les initiatives d'offres culturelles et l'apparition de nouvelles formes de la culture, avec la priorité donnée à la presse, à l'image et au spectacle. L'avènement de la presse de masse initie un véritable mouvement de démocratisation de la culture qui s'amorce en 1863 quand le banquier Polydore Millaud créé Le Petit Journal, quotidien à un sou centimes). [...]
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