L'un des plus étonnants paradoxes de l'histoire contemporaine de l'Europe est que la démocratie, créditée au lendemain de la Première Guerre mondiale, d'un prestige et d'un capital de confiance exceptionnels, se soit finalement révélée si fragile. En fait, le conflit mondial a profondément ébranlé l'Europe, les valeurs sur lesquelles celle-ci s'appuyait jadis, ses structures politiques et économiques, ses assises sociales. Le soulagement qu'apporte en 1918 le retour à la paix, l'apparent consensus autour des principes démocratiques et libéraux cachent la crise profonde que vont connaître les démocraties dans l'entre-deux-guerres.
Cette crise trouve sa raison dans la conjonction des assauts qui lui sont livrés de l'extérieur par le fascisme et le communisme et des défectuosités d'ordre interne. Afin de montrer la gravité et les origines de la crise, nous nous intéresserons tout d'abord aux échecs de la démocratie parlementaire et libérale, avant de nous pencher sur l'essor du nationalisme...
[...] Les anciens combattants se sentent investis d'une mission : entretenir le souvenir du passé, surveiller les politiciens toujours suspectés de compromission, maintenir l'union qui a pu lier les citoyens au moment du danger. Dans les pays vainqueurs, les démobilisés ont une attitude pacifiste, mais exigent aussi le respect des traités : la non- exécution des conventions signées au lendemain du conflit entretient le nationalisme. Chez les vaincus, la sévérité des traités entraîne le même réflexe. Les anciens combattants, plus ou moins amers, s'organisent en groupements autonomes ou constituent une masse disponible dans laquelle les mouvements extrémistes, exploitant eux-mêmes le nationalisme, recruteront largement. [...]
[...] Parmi les pays démocratiques, c'est la France qui jouit du rayonnement politique et moral le plus considérable. La formule de George Clemenceau : La France, hier soldat de Dieu, aujourd'hui soldat de l'Humanité, sera toujours le soldat de l'Idéal ! traduit ainsi les sentiments d'une bonne partie de l'opinion internationale dans le camp des vainqueurs et des nouveaux Etats. Beaucoup de pays, anciens ou créés par les traités de paix, se dotent de constitutions imitées peu ou prou du modèle français : ainsi la Tchécoslovaquie, l'Autriche, la Pologne, La Yougoslavie, la Roumanie. [...]
[...] Autre cause décisive de son affaiblissement, la gauche se trouve profondément divisée. Au lendemain de la Grande Guerre, les partis socialistes doivent se déterminer par rapport à l'expérience bolchevique. Ceux qui refusent l'adhésion à la IIIe Internationale et gardent l'étiquette du socialisme deviennent, même quand ils se disent fidèles au marxisme, des réformistes : ils espèrent modifier la société en restant dans le cadre légal, par la voie législative. Au contraire, ceux adhèrent à la IIIe Internationale et prennent le nom de communistes veulent une révolution, la dictature du prolétariat, l'abolition de la propriété privée. [...]
[...] Chez les vaincus, où la démocratie s'est imposée après la défaite, le régime nouveau manque de prestige et offre le flanc de la critique. Les nationalistes tiennent ainsi la démocratie pour un héritage humiliant de l'échec militaire de 1918. En outre, les populations des pays nouvellement créés ou agrandis ont été pendant des siècles soumises à des puissances très autoritaires. Ainsi, ces populations, longtemps privées de droits politiques, se trouvent totalement inexpérimentées. D'autre part, en Europe centrale et orientale la bourgeoisie et les classes moyennes, constituant la fibre politique faisant fonctionner les institutions fondées sur le modèle occidental, sont numériquement faibles. [...]
[...] La crise des démocraties libérales dans l'entre-deux-guerres Plan I. Les échecs de la démocratie parlementaire et libérale Les entraves au fonctionnement de la démocratie parlementaire et libérale -Assemblées dépassées, inadaptées à l'époque contemporaine. Instabilité ministérielle. -Pouvoir exécutif beaucoup plus important -Sévères entorses au libéralisme politique Le développement de l'antiparlementarisme -Au sein de l'opinion -Au sein de la droite et de l'extrême droite -Au sein de la gauche marxiste Le contrecoup de la crise économique de 1929 L'inadaptation de la démocratie libérale en Europe centrale et méridionale -La démocratie, héritage humiliant de l'échec militaire de 1918, manque de prestige. [...]
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