La société argentine tient une place singulière au sein des sociétés d'Amérique Latine. L'expansion économique du pays à partir de la fin du ΧІΧème siècle s'est accompagnée d'une forte immigration, principalement en provenance d'Europe, qui a alimenté, au-delà de l'économie, le début d'une nouvelle idée nationale. Celle-ci se définissant non seulement dans une opposition des colonisateurs aux indigènes, comme c'est généralement le cas en Amérique Latine, mais aussi dans des différences entre plusieurs communautés d'immigrants. Afin de profiter dans ce mémoire du meilleur parti des travaux existants nous nous attacherons à mettre en perspective les différentes facettes de la construction de l'identité nationale. En effet, l'interaction entre l'action de certains dirigeants qui ont imaginé l'identité argentine, les moeurs des différentes communautés, la création culturelle, l'activité dans les villes, le travail agricole : tous ces éléments ont entre autres contribué et contribuent toujours à forger cette identité. Nous insisterons néanmoins sur la période charnière d'évolution de la société et d'immigration massive entre les années 1860 et 1920, période où les grandes directions politiques et culturelles sont insufflées alors que les immigrants affluent.
[...] Danse ce pays de sept millions d'habitants, composé d'une population alluviale sans racines et sans représentation politique, la nécessité d'une réforme électorale instaurant le suffrage universel est justifiée par une phrase du Président Roque Saenz Pena, initiateur de cette opération : Une décennie encore et nous autres, les Argentins, allons être en minorité ; et que peut-on espérer comme assimilation si les gens du pays se sentent aussi étrangers que les étrangers eux-mêmes Conclusion C'est ainsi que l'Argentine entre dans la modernité du XXème siècle avec une population d'immigrés et de fils d'immigrés qui deviennent des acteurs à part entière de la politique du pays, tantôt amenant au pouvoir les radicaux, puis soutenant en masse Peron dans la seconde moitié du XXème siècle, tantôt subissant des régimes autoritaires et se soudant, notamment culturellement, dans cette adversité. Une vraie culture qui appartient à toute la nation naît alors, de la littérature de Borges aux groupes de rock de la fin du siècle. L'influence européenne se ressent dans les cafés et les théâtres, qui présentent plus de pièces aujourd'hui à Buenos Aires qu'à New York. La cuisine italienne est entrée dans les mœurs de tous les Argentins, tout comme le maté, boisson partagée dans une grande partie du cône Sud de l'Amérique Latine. [...]
[...] On en trouve les bases dans la Constitution Nationale rédigée en 1953 après la mort de Rosas : Le Gouvernement fédéral veut promouvoir l'immigration européenne, et ne pourra restreindre, limiter ou taxer d'un impôt quelconque l'entrée sur le sol argentin des étrangers qui portent comme objectif de travailler la terre, améliorer les industries, introduire et enseigner les sciences et les arts Le souhait initial était de promouvoir l'immigration d'anglo-saxons et de français, mais une grande partie d'entre eux se dirigeaient par affinités culturelles et de langues aux Etats-Unis et dans les colonies britanniques. Il reste ainsi pour l'Argentine une immigration principalement méditerranéenne, et en moindre quantité d'Europe de l'Est. Cette immigration depuis l'Europe est due en grande partie à l'excédent de main d'œuvre agricole due à la seconde révolution industrielle en Europe occidentale. D'autres évènements contribuèrent à cette immigration, comme la crise économique de 1875/1876. [...]
[...] On fête encore la Saint Patrick dans les pubs de certaines villes d'Argentine. Proportion des groupes nationaux sur la population étrangère de Buenos Aires Nationalités Italiens Espagnols Français Anglais Allemands Autrichiens Uruguayens Suisses Russes Turcs D'autres immigrants viennent en nombre au cours du XXème siècle, comme par exemple les Syriens et les Libanais. Il y a assez peu d'études sur eux, on trouve par exemple en 1900 dans les archives de La Nacion , quotidien à grand tirage du pays : L'occupation préférée des syro-libanais à Buenos-Aires est le commerce. [...]
[...] Parmi les charpentiers, on trouve des italiens, mais aussi des français et des espagnols. Parmi les parqueteurs et les poseurs de carreaux, des polonais et des russes. Les électriciens sont français, anglais ou allemands. L'attachement à la culture d'origine semble menacer l'identité nationale argentine En 1887, le député Zeballos prononce au Congrès : La question de l'immigration est la préoccupation principale de la République Argentine dans cette période ; le Congrès doit être prévoyant et adopter les mesures prudentes pour réaliser ces deux grands projets : attirer sur notre terre tous les habitants du monde qui veulent y vivre et inculquer dans le cœur des étrangers le sentiment de notre nationalité. [...]
[...] Elle a ensuite perdu de vigueur en 1875 et 1876 à cause de fraudes électorales qui ont amoindries l'élan patriotique puis d'une crise économique Dans la même période, les fêtes d'autres communautés et en particulier les fêtes italiennes augmentent aussi en popularité. Elles atteignent leur apogée en 1887 avec une fête de trois jours, représentation de pièces italiennes Breccia di Porta Pia fanfare, chants nationaux, chorale de deux cents enfants de l'école Union Operai Italiani et célébrations diverses. Les autorités réagissent donc et soutiennent la reprise d'enthousiasme pour ces fêtes patriotiques en tentant d'étendre l'initiative de Pablo Pizzurno à d'autres écoles. Les célébrations des enfants deviennent ainsi une attraction populaire et l'élan patriotique semble reprendre vigueur. [...]
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