Un tiers seulement des civils assassinés par les nazis étaient juifs, mais les juifs occupent néanmoins une position unique parmi les victimes. Les autres peuples étaient destinés à être déracinés, réduits en esclavage. Les juifs, eux, étaient destinés à être humiliés et exterminés alors qu'ils n'étaient ni une nation belligérante, ni même une nation dans le sens quelconque du mot puisqu'ils vivaient dispersés en Europe sans autre point commun que d'avoir eu pour ancêtre des fidèles de la religion juive. Quels sont les fondements du massacre ? Comment a-t-on construit la figure de l'ennemi juif pour justifier le passage à l'acte. Selon Herman Cohn, l'antisémitisme le plus virulent, celui qui a conduit au génocide, n'a presque rien avoir entre les conflits entre êtres humains, et il a peu de choses en commun avec les préjugés raciaux en tant que tels. Il repose essentiellement sur la croyance que les juifs - tous les juifs et en tous lieux- forment partie intégrante d'une conspiration destinée à ruiner et ensuite à dominer l'humanité. Or cette croyance n'est qu'une version modernisée de l'image populaire médiévale du juif qui culminera dans le faux politique intitulé Les protocoles des Sages de Sion, ré articulé par les nazis autour d'une idéologie exterminatrice. C'est ce que nous verrons dans notre première partie.
L'autre question soulevée par les historiens est de savoir dans quelle mesure la population allemande a-t-elle adhéré aux obsessions idéologiques du régime. Deux théories sont souvent en compétition : celle de la mobilisation et celle de la manipulation. Dans les deux cas, il est important de dégager le rôle de la propagande comme outil de persuasion, et la pression psychologique inhérente au régime de terreur, portant atteinte à la liberté de l'homme, donc à sa pluralité, l'isolant dans sa seule aptitude au raisonnement logique, justement indispensable pour son adhésion au régime totalitaire. H. Arendt souligne la dimension prédictive ou prophétique de la propagande. Cette propagande qui fonctionne à merveille puisqu'elle donne la possibilité aux masses de fuir le monde dans lequel elles vivent en adhérant à la fiction de la conspiration juive.
Nous étudierons donc l'appareil de propagande comme objectif de persuasion, et comme organisation des assises d'un monde fictif, justificateur du massacre, pour ensuite analyser la réception du mythe de la conspiration juive dans la société allemande : son acceptation ou son refus.
[...] Du fait des pressions de la guerre, de l'inquiétude pour le sort des parents qui se battent sur le front, de la crainte des bombardements aériens et des tensions accrues de la vie quotidienne, le destin d'une minorité sociale a peu de chances de préoccuper beaucoup, voire d'intéresser la population. De surcroît, les Juifs sont désormais presque totalement isolés du reste de la société. Pour la majorité des Allemands, le Juif n'est plus qu'une image entièrement dépersonnalisée. Cette abstraction remplace de plus en plus le "vrai" Juif, une personne de chair et de sang Le vrai succès de la politique et de la propagande nazie sur la question juive est donc cette dépersonnalisation. [...]
[...] Mais il reste que pour agir ainsi qu'ils l'ont fait, ces hommes avaient besoin d'une idéologie et que celle-ci leur a été fournie par le Protocoles et le mythe de la conspiration juive. [...]
[...] La source de leur malfaisance n'étant plus leur religion mais leur sang. Les Protocoles, sont à leur publication largement interprétés à la lumière de cette idéologie raciale et nationaliste. Dans cette perspective, la conspiration mondiale juive devient le résultat d'une indéracinable volonté de destruction, d'une une soif du mal supposée innée chez chaque juif. C'est également cette vision du monde qui ne cesse d'obséder Hitler. Une partie de Mein Kampf est d'ailleurs consacrée aux manœuvres grâce auxquelles les juifs entendent s'assurer la domination mondiale. [...]
[...] Ceux - ci seraient sélectionnés par les maîtres juifs de l'Allemagne. Cette histoire fut utilisée pour la campagne électorale pour le Reichstag de 1930 qui marqua le début de la montée spectaculaire du parti nazi. En février 1933 Hitler devient Chancelier, et le premier avril la première persécution des juifs commençait par une journée de boycottage obligatoire des magasins juifs. Une fois de plus, les Protocoles sont invoqués pour justifier cette première mesure : le "plan de Bâle (réunion à Bâle du congrès sioniste), déclare le gouvernement est sur le point de se réaliser. [...]
[...] Les masses se montrent en général bien disposées envers les objectifs des nazis mais pas envers leurs méthodes. Les paysans : De par son idéologie, le mouvement nazi est appelé à préserver la paysannerie. Néanmoins, dans la perspective d'une guerre, il est vital de contrôler la production alimentaire. Bien que la politique dirigiste du Reich et ses interventions dans la production et la commercialisation des produits agricoles déplaisent aux fermiers, ceux-ci se sentent rarement menacés dans leur existence de classe. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture