Le Siècle des Lumières vit s'épanouir un certain nombre de philosophies politiques qui accompagnèrent chacun de ses bouleversements majeurs. Montesquieu, Rousseau, Voltaire (et bien d'autres) furent les inspirateurs de ces courants de pensée qui conduisirent la France à la Révolution. Pourtant, on ne saurait se borner à la seule pensée philosophique pour expliquer le bouillonnement d'idées qui agite le pays durant une courte décennie. On assiste en effet à cette période à un accroissement sans précédent de caricatures et des publications les utilisant, non pas seulement à la veille du déclenchement de la Révolution, mais durant tout le processus qui se terminera par la prise de pouvoir de Napoléon Bonaparte (qui d'ailleurs subira son lot de caricature, notamment britanniques). On peut donc se demander si ces caricatures, souvent politiques, ont joué un rôle dans la perception des évènements par leurs contemporains et si on peut leur imputer une participation à la formation de l'opinion publique. Quel fut le rôle réel de ces caricatures ? Par qui furent-elles employées, contre qui furent-elles dirigées ? Autant de questions auxquelles nous allons tenter de répondre. Il sera question dans un premier temps du rôle de ces caricatures en tant que catalyseurs de l'opinion durant la période précédant la Révolution, puis de l'utilisation de ce mode d'expression par les partisans de la Révolution à l'encontre de la royauté ou du clergé (ou même de leurs rivaux), et enfin, nous terminerons en étudiant l'emploi des caricatures par les détracteurs et les opposants de la Révolution.
[...] La caricature n'est donc pas née avec la Révolution, mais elle l'a accompagnée, révélée, justifiée et explicitée. Conjurant le mal de l'Ancien régime, elle devait permettre à l'homo novus révolutionnaire de se représenter différent et supérieur, définitivement fort et vertueux. Si sa nature et son objet, rapidement définis, ont permis une réelle efficacité sur les esprits informés et intéressés, il est illusoire de penser que le peuple a véritablement pris une part active au débat révolutionnaire à travers la diffusion de ces représentations. [...]
[...] Les caricatures révolutionnaires et contre- révolutionnaires ont finalement utilisé des moyens de représentation relativement proches, mais leur diffusion les distingue définitivement : l'action des pays étrangers par exemple, essentiel à la vigueur contre- révolutionnaire, constitua l'une des plus grandes craintes des leaders révolutionnaires Les luttes politiques et idéologiques de la fin du XVIII° siècle se sont donc grandement exprimées à travers les caricatures, certaines étant même devenues de véritables symboles sociaux. Ces différentes formes de caricatures ont donc joué un rôle souvent sous- estimé dans l'évolution et les implications de la Révolution française. Accompagnant les inspirations populaires et les bouleversements sociaux de cette époque, elles ont souvent constitué des sortes de catalyseurs des velléités de multiples groupes sociaux concernés par ces évènements Bibliographie - Bertrand Tillier : À la charge ! [...]
[...] On compte 600 caricatures, sans doute plus de 10000 pamphlets originaux, des centaines de pièces de théâtre de style comico-politique et d'innombrables chansons : la verve satirique est un genre à la mode. Il est par ailleurs essentiel de souligner que près de ces 600 caricatures sont anonymes. Certaines ont été publiées par certains grands journaux patriotes ; et quelques marchands marquent certaines gravures de leur empreinte particulière. Les causes de cet anonymat quasi général sont multiples : prudence vis-à-vis de la censure, habitude de la clandestinité de l'Ancien Régine, et importance des contrefaçons non signées. B La caricature, outil d'échange citoyen ou arme de propagande ? [...]
[...] I Nature et influence de la caricature révolutionnaire A. Définition et esprit initial de ces caricatures Après avoir commercé durant les dernières années de l'Ancien Régime sur les figures de la mode et du monde parisien, la caricature trouve, dès la préparation des Etats généraux, un utile et fructueux relai dans la mise en scène du monde politique. Réutilisant de vieilles recettes de la tradition comique française (le grotesque, le jeu de mots, la satire anticléricale), elle devient le prétexte d'une ardeur satirique ; en développement constant jusqu'à la fin des évènements révolutionnaires. [...]
[...] annexe : caricature de Robespierre). Ces caricatures constituent donc également un organe du contrôle mutuel et du centralisme révolutionnaire Ainsi en janvier 1790, Le Régiment de la Calotte (confrérie fondée en 1702, cherchant à ridiculiser puissants et courtisans) définit-il par ces mots la fonction publique de la caricature : Je crois que la gaieté, loin de nuire aux opérations qui doivent assurer notre liberté, servirait au contraire à maintenir chacun dans ses devoirs, à dérouter les intrigues ; à prévenir les prétentions de l'orgueil et surtout à châtier les mauvais citoyens en dénonçant d'une manière ironique leur turpitude et leur bassesse. [...]
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