A bien des égards, le premier conflit mondial a profondément et durablement affecté les sociétés européennes. Si les secousses territoriales, démographiques, économiques et sociales sont les plus visibles, il n'en demeure pas moins que la Grande Guerre a eu des conséquences inestimables sur les mentalités, et à plus forte raison, sur la culture. Ainsi, il est commode de marquer au terme de la Guerre et à l'aube des années 1920 une véritable rupture, dans la mesure où les créateurs font preuve d'une puissante envie d'innover et de reconstruire un monde sur des fondements nouveaux. Cette recherche de la modernité s'exprime dans la pérennité des avant-gardes durant ce qu'on appelle les « années folles ». D'un point de vue culturel, ces années sont très fécondes. Elles voient coexister les avant-gardes, le modernisme et des formes artistiques plus traditionnelles. Néanmoins, le sujet nous invite à nous concentrer sur la spécificité de ces avant-gardes, très prolifiques en ces années d'après-guerre. Littéralement, le terme d'avant-garde renvoie à une signification militaire désignant une unité détachée en avant des troupes. Appliqué au domaine culturel et artistique, l'avant-garde – ou plutôt les avant-gardes – renvoie à un mouvement amorcé au cours du XIXe siècle se donnant pour tâche de rechercher une expression nouvelle, et non de reproduire les anciens modèles.
Ces avant-gardes sont complexes et ambivalentes. La Grande Guerre constitue une césure pertinente dans l'histoire culturelle de l'Europe, sans toutefois tracer une ligne de démarcation franche entre deux périodes qu'on supposerait radicalement distinctes.
Dans quelle mesure les avant-gardes culturelles de l'Europe des années 1920 sont-elles le symbole d'une dynamique oscillant entre affirmation et difficultés?
[...] D'ailleurs, la fin de la guerre n'a pas été une période aisée pour les avant-gardistes Ainsi, dans quelle mesure les avant-gardes culturelles de l'Europe des années 1920 sont-elles le symbole d'une dynamique oscillant entre affirmation et difficultés ? - Les avant-gardes sont comme une réplique à l'ébranlement des valeurs traditionnelles et constituent un terreau d'innovation exceptionnelle mais profondément complexe et pluriel (III). Les avant-gardes comme réplique à l'ébranlement des valeurs traditionnelles - Le séisme de la Guerre C'est véritablement la Première Guerre mondiale qui constitue le séisme majeur : après avoir causé plus de huit millions de morts, la grande boucherie laisse à la jeunesse de l'époque le sentiment d'un gâchis irréparable et absurde. [...]
[...] De même, il faut également questionner la pertinence de l'isolement des années 20. D'ailleurs, certaines remises en cause des codes esthétiques sont bien antérieures à 1914 et les années 1920 ne constituent pas une césure si évidente, comme en témoignent le début du cubisme (Picasso, Les demoiselles d'Avignon en 1907), du futurisme (1909) ou encore les prémisses de l'abstraction dès 1910 sous l'égide de Kandinsky et Picabia notamment. Les avant-gardes nées avant la guerre peuvent persister après le conflit comme l'expressionnisme cinématographique avec Fritz Lang : Metropolis et Docteur Mabuse. [...]
[...] La fragile position des avant-gardes Il ne faut pas surestimer l'importance des avant-gardes pendant les années vingt Premièrement, elles ont connu une réelle difficulté à s'imposer au sortir de la guerre face à ce qui a été nommé le retour à l'ordre : Pour les avant-gardes, le début des années vingt parisiennes est fortement marqué encore, esthétiquement et même idéologiquement, par le retour à l'ordre qu'avait imposé le consensus patriotique de la guerre. Tout conventionnalisme ne disparaît pas face à ces avant-gardes ambitieuses. La pratique de l'Etat manifeste en effet un certain conservatisme en la matière, notamment dans les commandes. Deuxièmement, toute la production artistique n'est pas touchée par ces mouvements d'avant-gardes, qui semblent s'essouffler à la fin des années 1920. [...]
[...] Ces artistes s'emparent immédiatement des schémas, des expressions et des intentions artistiques traditionnels pour les tourner en ridicule et les révolutionner. Au lendemain de la Guerre, les séquelles laissées par celles-ci n'échappent aux peintres et écrivains avant-gardistes, Otto Dix à l'appui. Effectivement, la thématique de la perte de la dignité des hommes blessés aux fronts est une constante du peintre. Un véritable dynamitage des valeurs anciennes Les avant-gardes des années vingt se définissent par rapport à un vaste mouvement de contestation globale, qui vise à subvertir les assises morales et intellectuelles de la société moderne. [...]
[...] Ces avant-gardes sont complexes et ambivalentes. La Grande Guerre constitue une césure pertinente dans l'histoire culturelle de l'Europe, sans toutefois tracer une ligne de démarcation franche entre deux périodes qu'on supposerait radicalement distincte. Beaucoup de mouvements avant- gardistes qui perdurent dans les années 1920 sont antérieurs à 1914 comme le futurisme italien ou le cubisme. Ces avant-gardes préalables à notre période ne seront donc pas l'objet de notre propos, mais nous verrons comment elles ont influé sur les nouveaux mouvements, car les interpénétrations sont multiples. [...]
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