Le concept de « nation » fait son apparition dès le XVIIIe siècle. Il renvoie à une collectivité, réunie par un principe d'identité commune (langue, religion, histoire, « race »…). Le mouvement des nationalités qui se développe dès la première moitié du XIXe siècle résulte d'une forte revendication de vivre ensemble, sous un même gouvernement, dans un même Etat.
Or, au début du siècle, les « nations » qui s'identifient matériellement à un Etat sont plutôt rares. Le caractère multinational et multiconfessionnel des empires austro-hongrois, russe et ottoman contraste fortement avec la domination en leur sein d'une seule nationalité et d'une seule religion. Certaines nations sont également divisées en de véritables mosaïques territoriales, comme l'espace germanique ou la péninsule italienne, voire carrément niées – minorités juive et musulmane, Polonais ou encore Irlandais.
A l'aube du XIXe siècle, de multiples influences exacerbent le sentiment national – héritages des Lumières, des révolutions américaine et française, de l'Empire, romantisme, premières formes de pensée sociale – qui prendra diverses formes sous la plume de penseurs d'horizons très différents.
Comment se développe l'idée nationale dans le premier XIXe siècle ? De quelle manière une même revendication va-t-elle surgir de peuples et de régions aux réalités très hétérogènes ? L'essor des nationalités conduira-t-il à l'aboutissement de ces velléités d'unité et d'autonomie ?
[...] Les limites des théories nationales européennes 1). Des idées forgées en Occident Il apparaît toutefois délicat de parler d'un nationalisme polonais ou grec, car ces théories sont le plus souvent conçues par des exilés qui n'ont plus depuis longtemps de lien avec leur pays. Ainsi, Koraes, s'il naît en Grèce, passera la majorité de sa vie en Hollande et surtout en France. Mickiewicz n'a jamais vécu en Pologne. Leurs œuvres sont lues par une minorité et le plus souvent publiées en français à Paris. [...]
[...] Au-delà des pamphlets, affiches et poèmes satiriques, les journaux sont les principaux vecteurs de l'idée nationale belge. Le Courrier des Pays-Bas se présente rapidement comme le siège de l'opposition bruxelloise, mais les villes de Liège et de Gand jouent également un grand rôle. Il y a aussi de nombreuses pétitions : en 1829, l'une d'entre elles rassemble signatures. Des clubs jacobins, sur le modèle français, tenus par des démocrates républicains progressistes, voient le jour dans les plus grandes villes du pays. [...]
[...] Jean Plumyène mesure l'impact de l'œuvre de Mickiewicz : Avec ses paraboles, ses litanies, son souffle prophétique, Mickiewicz imposait durablement à l'opinion l'image sublimée d'une Pologne comme Personne, d'une Nation incomparable, unique, vouée aux sacrifices rédempteurs Les Polonais sont considérés comme le peuple élu, et la Pologne est chargée d'une mission salvatrice : Le Polonais s'appelle pèlerin, parce qu'il a fait vœu de marcher vers la Terre Sainte, la Patrie libre : il a juré de marcher jusqu'à ce qu'il la trouve [ Or, comme à la résurrection du Christ les sacrifices sanglants cessèrent sur la Terre entière, ainsi à la résurrection de la Nation polonaise les guerres cesseront dans la chrétienté Selon Plumyène, Le nationalisme polonais, disséminé par l'émigration, va servir de catalyseur aux nationalismes en cours de cristallisation 2). Le mouvement philhellène et la bataille pour l'indépendance de la Grèce En 1812, le poète anglais Byron s'écrie : Belle Grèce ! Mélancolique vestige d'une puissance évanouie, immortelle bien que disparue, dans ta chute toujours aussi grande ! (Childe Harold), témoignant ainsi de l'engouement que suscite en Europe la situation de la Grèce. [...]
[...] En 1795, celle-ci est rayée de la carte, dans un dernier partage entre Prusse, Russie et Autriche. Mais les conquêtes napoléoniennes vont changer la donne. En 1807, Napoléon fonde par le traité de Tilsit le Grand Duché de Varsovie et y impose une Constitution. Les premières unités polonaises entrent donc en campagne contre la Prusse, et sur les territoires libérés est créée une administration locale polonaise soumise au gouvernement français. Comptant bien mettre à profit les ressources humaines et matérielles de la Pologne, Napoléon fait miroiter aux Polonais les perspectives d'un rétablissement du pays dans ses anciennes frontières afin de libérer l'énergie nationale. [...]
[...] Les idées romantiques Le sentiment romantique, par de nombreux aspects, va également nourrir l'inspiration nationale en Europe. La revalorisation de la liberté de l'individu débouche en effet sur la revendication des libertés politiques et donc l'aspiration à l'unité et l'indépendance. Le symbole de la cause romantique s'incarnera dans la guerre d'indépendance de la Grèce contre la domination ottomane. La chute de Missolonghi incarne ainsi la vision romantique d'une cause perdue (cf. Delacroix, La Grèce expirant sur les ruines de Missolonghi). [...]
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