Houston Chamberlain, un fervent défenseur du pangermanisme, qualifiait étrangement le XIXe siècle de "siècle juif", sans doute parce qu'au cours de cette période on a pu observer plusieurs agitations en Europe autour de la question juive et que l'on peut la diviser en deux phases paradoxales : la première moitié du siècle étant celle de l'émancipation des Juifs et de leur véritable entrée dans la société mais la seconde étant celle de leur rejet et de leur désintégration avec la naissance du mouvement antisémite, une sorte d'idéologie scientifique.
Alors que la première moitié du 19e siècle semble adopter des mesures pour l'intégration des Juifs, comment expliquer une telle agressivité envers eux à la fin du siècle ? Quelles raisons ont accéléré cette haine ? Dans quelles mesures le problème juif a-t-il toujours été la réponse aux crises politiques, économiques et sociales en Europe ? Pourquoi les particularismes des Juifs ne leur ont-ils pas permis d'être de véritables citoyens ni même de s'intégrer dans une Nation dans laquelle ils vivaient parfois depuis plusieurs générations ?
Autant d'interrogations qui nous poussent à étudier la genèse d'une idéologie propre aux multiples crises qu'ont traversées les sociétés européennes, tout en nous attachant à bien distinguer l'antisémitisme d'Europe de l'Est dans des régimes autoritaires perpétrant toute une série de crimes à l'encontre des Juifs de l'antisémitisme occidental institutionnalisé et politisé dans des régimes plutôt libéraux et « démocratiques » dans les années 1880.
[...] Dans quelles mesures le problème juif a-t-il toujours été la réponse aux crises politiques, économiques et sociales en Europe ? Pourquoi les particularismes des Juifs ne leur ont-ils pas permis d'être de véritables citoyens ni même de s'intégrer dans une Nation dans laquelle ils vivaient parfois depuis plusieurs générations ? Autant d'interrogations qui nous poussent à étudier la genèse d'une idéologie propre aux multiples crises qu'ont traversées les sociétés européennes tout en s'attachant à bien distinguer l'antisémitisme d'Europe de l'Est dans des régimes autoritaires perpétrant toute une série de crimes à l'encontre des Juifs de l'antisémitisme occidental institutionnalisé et politisé dans des régimes plutôt libéraux et démocratiques dans les années 1880 (III). [...]
[...] Le premier à avoir inventé le nom antisémitisme Antisemitus est l'Allemand Wilhem Marr dans son ouvrage La Victoire du judaïsme sur la germanité (1879). Dans ses Lois psychologiques de l'évolution des peuples (1894), Gustave Le Bon proposait une hiérarchie psychologique des races et décrivait la communauté juive comme cette obscure petite tribu de Sémites qui n'a jamais contribué à la civilisation C'est à cette période aussi que né la pyramide humaine, une hiérarchie rigide des races qui place au sommet les Aryens et les Germains comme étant supérieurs et dominateurs du monde tandis que la race sémite est représentée en tant que race pernicieuse juste au dessus du Noir. [...]
[...] Contrairement à la Russie, la logique antisémite s'est inscrite non pas dans la violence physique mais dans la désintégration du peuple juif en s'institutionnalisant progressivement et faisant émerger plusieurs partis politiques antisémites. A la fin du Second Empire on ne comptait pas plus de Juifs, ce n'est donc pas la surreprésentation de ce peuple qui explique l'antisémitisme français. En réalité, la IIIe République est perçue comme la victoire de l'esprit révolutionnaire, elle était par conséquent radicale et anticléricale et soutenue par les Juifs qui avaient bénéficié de droits émancipateurs moins d'un siècle auparavant. [...]
[...] Dès lors, l'antisémitisme politique trouvait ses partisans au sein des légitimistes restés fidèles à l'alliance du trône et de l'autel, à l'ordre et à la garantie de la permanence de la patrie. Surtout, la politisation de l'antisémitisme s'est largement formée autour du journaliste Edouard Drumont dont le quotidien antisémite La Libre Parole (1892), sous titré La France aux Français et pour slogan le judaïsme, voilà l'ennemi et qui inspira directement le parti l'Action Française (1899). Quant à l'Allemagne, l'antisémitisme s'est lui aussi fait en réaction aux idées révolutionnaires françaises d'émancipation. [...]
[...] Même si ces requêtes ne furent pas appliquées, en revanche plusieurs mesures discriminatoires persistaient comme l'interdiction aux Juifs d'obtenir un grade dans l'armée, une chaire à l'université ou un emploi gouvernemental important. Enfin, le dernier caractère de l'antisémitisme de la seconde moitié du XIXe siècle est celui qui a nourri l'esprit revanchard entre l'Allemagne et la France à la suite de la défaite de Sedan en 1870. D'un côté, l'Allemagne accusait le Juif de vouloir apporter la francité dans le pays, c'est-à- dire des idées révolutionnaires dans la civilisation germanique alors que de l'autre côté de la frontière on assimilait le Juif à un Allemand donc l'ennemi de la Nation. [...]
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