L'antisémitisme à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle

Résumé du document

A bien des égards, l'animosité contre le peuple juif existe depuis l'antiquité et se perpétue durant l'époque médiévale. Mais ces attitudes calomnieuses envers le « peuple déicide » relèvent davantage du domaine religieux et spirituel, du moins, jusqu'à la fin du XIXe siècle. En effet, l'antisémitisme en tant que doctrine d'hostilité systématique et raciale à l'égard des juifs n'apparaît guère avant 1870. Le terme « antisémitisme » fait irruption sous la plume de l'allemand Wilhelm Marr en 1873, qui contribue à en théoriser les principes. Si les attitudes antisémites existaient antérieurement, Hannah Arendt souligne bien que cette idéologie à caractère raciste voit le jour au crépuscule du XIXe siècle, c'est à dire dans les années 1870. C'est alors que le juif devient le représentant d'une race pernicieuse et quasi-satanique. Il n'est plus tant le porteur de convictions religieuses, mais l'incarnation de tous les vices allant à l'encontre de la race aryenne. Une question cruciale émerge donc : comment est-on passé d'un antijudaïsme antique à un antisémitisme agressif et raciste ? Le sujet nous invite non seulement à étudier les sources et les fondements de la pensée antisémite jusqu'à la veille de la « Grande Guerre », mais également l'aspect transnational que revêt cette idéologie. La fièvre antisémite semble gagner une Europe en proie à la montée de l'ultra-nationalisme, aussi bien en France, qu'en Allemagne, en Grande-Bretagne, en Italie ou en Autriche-Hongrie. L'antisémitisme pourrait être en ce sens, la manifestation de troubles politiques immanents aux Etats précédemment évoqués, d'autant que celui-ci vient alimenter des affaires épineuses en cette fin de siècle.
En quoi l'antisémitisme à la fin du XIXe siècle et au début du XXe est-il une doctrine inédite et singulière à l'échelle européenne ?

Extraits

[...] Les accusations calomnieuses dont il a été victime prennent parfois une couleur raciale : Que Dreyfus est capable de trahir, je le conclus de sa race explique Maurice Barrès. Emile Zola dénonce dans Le Figaro du 16 mai 1896, la monstruosité qui se répand en France, et qui consiste à jeter le juif en pâture aux revendications des déshérités, sous le prétexte d'y jeter l'homme d'argent, il y a là un socialisme hypocrite et menteur, qu'il faut dénoncer, qu'il faut flétrir Nous avons vu à travers notre cheminement, à quel point l'antisémitisme de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle est nourri par une vague de ressentiment, d'ultranationalisme, de jalousie. [...]

[...] En Autriche, l'antisémitisme entre indéniablement dans la sphère politique et en 1897, Karl Lueger est élu maire de Vienne, avec un programme fondamentalement antisémite. Vienne, à même titre que Bayreuth, devient un des grands foyers de l'antisémitisme européen. Même si l'empire russe ne fait pas partie de notre étude, il n'est pas anodin de souligner que l'antisémitisme est utilisé par le Tsar comme une politique d'Etat (loi de 1882 sur l'interdiction de s'établir dans les campagnes, épuration de Moscou ordonnée par Alexandre III en 1891). [...]

[...] En quoi l'antisémitisme à la fin du XIXe siècle et au début du XXe est- il une doctrine inédite et singulière à l'échelle européenne ? Il s'agira d'observer les facteurs qui ont contribué à l'essor virulent de l'antisémitisme avant de se pencher sur l'aspect européen de ce mouvement (II). Mais l'antisémitisme ne peut-il pas être aussi intégré dans un cadre politique (III) ? Aux fondements de la pensée antisémite Les fantasmes spéculatifs L'antijudaïsme, d'origine religieuse, reste au cœur de la pensée contre- révolutionnaire, mais la nouvelle source du discours anti-juif est en cette fin de siècle, davantage socialiste. [...]

[...] Par conséquent, nous pouvons établir une grammaire commune de ce mouvement en dégageant des archétypes récurrents comme le rôle de la presse, la montée en puissance des ligues, ou encore l'agitation dans la rue. En effet, en 1880-1881, Berlin devient le théâtre de scènes de violence : des bandes organisées assaillent les juifs dans les rues, les chassent des cafés, brisent les vitres de leurs magasins. En province, des synagogues sont même brûlées. Transition : L'antisémitisme de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle enfile les habits d'un mouvement supranational qui trouve son ancrage dans une Europe en proie à la montée de l'ultranationalisme. [...]

[...] Bibliographie Histoire de l'antisémitisme, tome l'âge de la science de Léon Poliakov. Histoire de l'antisémitisme de François de Fontette parue dans la collection Que sais-je? [...]