L'antifascisme. Genèse et conséquences d'une passion politique

Résumé du document

Ces passions qui ont entraîné de nombreux hommes, pour lesquelles de nombreuses vies ont été sacrifiées… ne peuvent être comprises séparément puisqu'elles interagissent l'une sur l'autre, elles vivent en interaction et se nourrissent mutuellement fondant par là toute l'histoire du XX° siècle en Europe.
On peut donc se demander comment l'antifascisme, dans sa dialectique avec ces autres passions politiques, a-t-il modelé l'histoire et la vie politique et idéologique de l'Europe du XX° siècle.
Nous verrons tout d'abord que l'antifascisme s'est construit en opposition ou en relation avec le communisme, la démocratie et le fascisme ; puis nous étudierons comment il a lui-même contribué à appuyer ces passions politiques.

Extraits

[...] Pour eux, l'antifascisme est donc rendu nécessaire pour leur propre survie. Cependant, cet amalgame entre la gauche et l'antifascisme avant la Seconde Guerre Mondiale n'est pas exempt d'une certaine ambiguïté ; en effet, il apparaît que le communisme et le fascisme se sont finalement nourris l'un l'autre du moins jusqu'à l'avènement de Hitler en Allemagne. En effet, cette ambiguïté est due à l'interprétation que les communistes font du phénomène fasciste. Pour eux, le fascisme, tout comme le parti socialiste en Italie ou la social-démocratie en Allemagne est l'une des versions de la dictature bourgeoise. [...]

[...] Cependant, tout changement dans la politique antifasciste passe par une redéfinition du fascisme, elle est donnée par Dimitrov lors du VII° congrès de l'International le 2 août 1935 : le fascisme au pouvoir est la dictature terroriste ouverte des éléments les plus réactionnaires, les plus chauvins, les plus impérialistes du capital financier Dimitrov distingue donc le fascisme comme l'ennemi principal, au pouvoir dans certains pays comme l'Italie, l'Allemagne ou encore la Pologne. Il ne s'agit donc plus de lutter contre les forces dites fascistes d'avant 1935 mais de lutter contre ces régimes qui menacent l'URSS quitte à organiser une compromission provisoire avec les bourgeoisies nationales. Cette ouverture offerte par l'antifascisme communiste est à l'origine de profonds bouleversements dans l'antifascisme en général. [...]

[...] Cette sortie de l'isolement se remarque aussi au niveau des relations avec les autres partis : il s'agit de constituer des fronts antifascistes autour des partis communistes avec l'aide de tous les démocrates de la droite jusqu'aux communistes. On aboutit donc à la constitution des Fronts Populaires dont le plus bel exemple vient de France puisque la coalition ainsi formée parvient au gouvernement en 1936 sous la direction de Léon Blum. Ce changement dans le politique communiste vis-à-vis du fascisme permet également de revenir sur le pacifisme qui dominait jusque là notamment en raison de l'anti- impérialisme. [...]

[...] C'est encore cet antifascisme commun aux vainqueurs en 1945 qui permet le consensus dans l'attribution des responsabilités de la guerre. Tous s'accordent pour dire que l'Allemagne est pleinement responsable du déclenchement du second conflit mondial, la rémission sans condition de l'Allemagne est acceptée par tous Cette union se relâche dès 1945, le fascisme étant mort, plus rien ne tient les liens qui unissaient les pays vainqueurs et les divergences de régimes reprennent le dessus jusqu'à mener à la Guerre Froide. [...]

[...] Là où les comportements divergent c'est sur l'utilisation de l'antifascisme dans la construction des nouveaux pactes constitutionnels. La résistance antifasciste italienne a largement contribué à la chute du Duce ; l'antifascisme étant le lien entre les différentes mouvances de la résistance, c'est tout naturellement cet antifascisme qui a été à la base de la reconstruction du pays, à la base de l'unité et de la nouvelle légitimité du régime. En République Fédérale d'Allemagne, aucun mouvement antifasciste proprement allemand n'ayant pu se dégager, la reconstruction n'a pu se faire sur la base de l'antifascisme ; c'est le refus de tout totalitarisme qui a prédominé dans le nouveau pacte constitutionnel. [...]