Pour ses contemporains, l'année 1917 reste dans les mémoires comme “l'année terrible”, celle des mutins, celle des révolutions russes. C'est une année d'événements encore controversés comme on a pu le voir dans les polémiques déclenchées par l'hommage de Lionel Jospin aux mutins en 1997, ou dans celle du retour des cendres à Moscou et de l'éventuel canonisation du tsar martyr Nicolas II. Cependant, cette “année terrible” est paradoxalement celle où l'on a décompté le moins de morts de toute la Première Guerre Mondiale.
Comment et pourquoi l'année 1917 est-elle un symbole fort jusqu'à nos jours alors que cette année n'a rétrospectivement rien de particulièrement décisif ?
Nous tâcherons de répondre à cette question en trois temps : en voyant d'abord en quoi l'année 1917 semble celle de la lassitude des belligérants et de leurs populations, qui s'est traduite par les révolutions, puis en quoi ces troubles internes acculent les diplomaties au refus de toute négociation pour ne pas perdre la face devant l'opinion publique. Cette impasse, doublée donc de la crainte d'une révolution, conduit immanquablement à une relance de la guerre, qui est définitivement une guerre d'usure.
[...] Nous tâcherons de répondre à cette question en trois temps : en voyant d'abord en quoi l'année 1917 semble celle de la lassitude des belligérants et de leurs populations, qui s'est traduite par les révolutions, puis en quoi ces troubles internes acculent les diplomaties au refus de toute négociation pour ne pas perdre la face devant l'opinion publique. Cette impasse, doublée donc de la crainte d'une révolution, conduit immanquablement à une relance de la guerre, qui est définitivement une guerre d'usure. L'année 1917 est l'année des révolutions. Les grands révolutionnaires étant hors de Russie (Lénine, notamment, en Suisse), on peut considérer que la révolution de février est davantage un régime qui s'effondre. [...]
[...] Hélas, tous ces efforts sont désordonnés. Ainsi, la déclaration Balfour ne sert-elle plus à rien quand elle entre en vigueur : fin 1917, les États-Unis sont déjà en guerre, l'Autriche-Hongrie déjà à terre. L'Entente s'appuie sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et encourage les nationalismes pour morceler ses rivaux. L'Entente brandit sa démocratie, l'Allemagne ses législations sociales plus avancées. Mais à l'intérieur même des pays, la contestation s'installe : on distingue les ultra-nationalistes, pour qui le gouvernement est trop faible, les bellicistes radicaux, ou centristes qui respectent le régime et s'en prennent aux pessimistes, les socialistes modérés, comme Albert Thomas qui luttent contre le modèle politique de l'ennemi, et les révolutionnaires (Spartakis). [...]
[...] De plus, les États-Unis ont annoncé combattre non dans l'Entente mais avec elle : elle mène en quelque sorte sa propre guerre. Par ailleurs, les Britanniques ont réveillé le Moyen-Orient en promettant un même territoire à plusieurs : ils offrent l'Empire Ottoman à Husseyn comme une part d'un futur royaume arabe, malgré les accords Sykes-Picot qui prévoyaient le partage de l'empire ottoman entre Français et Italiens. Face à la lenteur des tractations, la déclaration Balfour pour un foyer national juif, censée déstabiliser les Empires centraux en réveillant leurs minorités et accélérer le soutien américain via les lobbies juifs, vient ajouter un troisième accord sur un même territoire. [...]
[...] Les belligérants étant usés par la guerre est aussi l'année des propositions de paix : elles viennent de Wilson, de l'Autriche-Hongrie, de l'Allemagne, du pape Benoît XV, des Bolcheviks. Mais, la quinzaine de propositions, principalement des “paix blanches”, ont toutes échoué. On pense que l'opinion publique se refuserait à avoir subi trois ans pour qu'il n'y ait ni vainqueur ni vaincu. C'est aussi l'échec des vieilles méthodes de diplomatie secrète de famille, traditionnellement par le biais du réseau dynastique des Winsdor : on en vient à affirmer la souveraineté nationale sur la souveraineté dynastique. Cela apparaît en quelque sorte comme la mort de l'Ancien Régime. [...]
[...] Pourquoi en 1917 ? Tous les soldats sont passés par la boucherie de Verdun ; l'échec meurtrier de l'offensive sur le Chemin des Dames provoque l'exaspération de soldats qui ne voient plus l'issue de la guerre. Le mouvement suit en Italie, en Allemagne mais cette dernière y répond de manière bien plus radicale : alors qu'en France, Pétain s'empresse de satisfaire aux exigences des soldats en stoppant les combats et en accordant des permissions, ne faisant fusiller qu'une cinquantaine de mutins, les Allemands procèdent à la décimation (un soldat sur dix, choisi au hasard, exécuté pour l'exemple). [...]
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