L'Eglise chrétienne d'Occident qui, tout au long du Moyen-âge, sut résister, faire face à de nombreuses « hérésies », voit de larges espaces lui échapper au 16e siècle notamment. De fait, la question religieuse s'avère être un problème crucial pour l'Angleterre qui est d'ailleurs agitée de multiples soubresauts dans ce domaine, surtout depuis le règne d'Henri VIII (1517-1547). Si le fils du premier roi Tudor pose les jalons d'une Eglise nationale indépendante avec l'Acte de Suprématie de 1534, son successeur, Edouard VI, fait progresser son pays sur la voie d'une reforme religieuse beaucoup plus prononcée, en affichant ouvertement des orientations protestantes nettes. En revanche, Marie Tudor (1553-1558) amorce résolument un retour au catholicisme en Angleterre ; elle laisse à sa demi-soeur Elisabeth 1ère (1558- 1603) un pays en crise économique, sociale, politique, mais aussi religieuse. Le problème des orientations religieuses s'affirme donc d'emblée avec acuité ? tant sur le plan pratique que théorique ? et non sans déchainer les passions. Quelles mutations interviennent dans l'Angleterre élisabéthaine sur le plan religieux ? au demeurant étroitement lié, à cette époque, à la politique, et quelles en sont les conséquences ? (...)
[...] En 1562, son successeur, Pie IV, interdit aux catholiques d'assister aux offices anglicans. De fait, la tension monte progressivement ; ainsi éclate, fin 1569, la révolte des comtes du Nord, fomentée par Thomas Howard, 4e duc de Norfolk et d'Arundel notamment : ce nothern rising auquel participent 5700 hommes, ne vise pas ouvertement à détrôner la reine, mais est fomenté au nom du catholicisme : un projet de mariage qui unirait le duc de Norfolk et Marie Stuart, catholique, est mis sur pieds pour ramener l'Angleterre à la vieille religion ; le soulèvement est sévèrement réprimé par les autorités ; dès lors, la méfiance envers le catholicisme prévaut et ne fait d'ailleurs que s'accroitre à la suite de l'excommunication de la reine par le Pape Pie V le 22 février 1570 (il s'agissait, à l'origine, d'apporter un certain soutien aux comtes du Nord). [...]
[...] De plus, les lois sur les hérétiques émises sous Marie Tudor sont abrogées. Le Parlement entérine ces Actes non sans quelque résistance : si les députés des Communes se révèlent globalement consentants, le personnel catholique présent chez les Lords fait plus de difficulté Au final, ces statuts sont adoptés à 21 voix contre 18 ; les évêques doivent alors prêter serment à l'acte de suprématie. Sur 25 individus, un seul accepte, tandis que les autres sont remplacés par des évêques d'obédience protestante. [...]
[...] Les mesures religieuses entérinées s'avèrent toutefois délibérément ambigües, afin d'amadouer, en quelque sorte, les catholiques notamment. En particulier, le flou doctrinal permet de tolérer un certain nombre de pratiques avec une relative souplesse, tant que l'ordre public n'est pas perturbé ; En effet, cette religion étroitement liée à la politique mêle, dans un subtil compromis du moins a priori un dogme d'inspiration calviniste ainsi qu'une liturgie imprégnée de catholicisme et le maintien de la hiérarchie ecclésiastique, le tout dans une politique érasmienne de soumission de l'Eglise à l'Etat. [...]
[...] En outre, il semblerait que certaines régions limitrophes, périphériques aient plus difficilement adhéré à la reforme religieuse, comme le Nord, Devon, les Cornouailles ; la révolte des comtes du Nord, en 1569, vient illustrer cet aspect. Quoiqu'il en soit, de larges franges de la population n'ont sans doute pas conscience, à cette époque, de l'inéluctabilité du tournant religieux opéré. Enfin, on peut souligner les retombées de la politique religieuse sur les relations extérieures. En effet, les nouvelles orientations de l'Angleterre en cette matière jouent considérablement sur le système d'alliances et d'oppositions. [...]
[...] Ce tournant religieux ne semble pas cependant aller de soi, dans la mesure où le catholicisme était, en début de règne encore, largement plus répandu que le protestantisme. De fait, lorsqu'Elisabeth succède à Marie Tudor, le 17 novembre 1558, elle a affaire à un pays divisé sur le plan religieux, avec notamment deux forces en présence : le catholicisme et le protestantisme. Au demeurant, éclatent en décembre 1558 des manifestations antipapistes à la City ; tandis que dans le camp adverse John White, archevêque de Westminster, est scandalisé par le retour d'exil de protestants refugiés en Allemagne ou à Genève Elisabeth 1ère doit donc prendre position au plus vite, sur la question religieuse. [...]
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