L'agrarisme peut se définir comme un projet global de défense d'un monde agricole menacé. Le discours agrarien, fondé sur des valeurs davantage morales et sociales qu'économiques, apparaît en France dans les années 1860-1870, au moment où la révolution industrielle relègue les paysans dans une position dominée : avant, le monde rural apparaît davantage menaçant que menacé, et il n'y a que des initiatives isolées, tournées vers le progrès économique et la modernisation technique (héritage des physiocrates du XVIIIème siècle). Il s'accélère ensuite avec la crise agricole du dernier quart du XIXème siècle.
L'agrarisme implique l'organisation du monde agricole en groupes de pression, et les débuts d'une politique agricole de la part de l'Etat. Ces groupes de pression sont au départ contrôlés par des notables, dont l'encadrement est remis en cause, à partir de 1914, par une nouvelle génération de dirigeants issus réellement de l'agriculture, mais les principes mêmes de l'agrarisme ne sont pas radicalement contestés.
Le corporatisme de Pétain marque l'apogée de l'agrarisme, qui connaît ensuite un déclin brutal permettant au discours productiviste, minoritaire pendant l'entre-deux-guerres, de triompher entre 1944 et 1960. Le paysan devient l'archétype du conservateur routinier. L'agriculture n'est plus considérée comme un univers clos à protéger, mais comme un secteur économique à intégrer dans un projet global de modernisation.
[...] Analyse du dorgérisme Le mouvement dorgériste a pris des formes et des appellations variables, le nombre de ses militants est impossible à évaluer. Dorgères revendique militants en en 1937 et en 1939, chiffres fantaisistes selon Paxton. Financement assuré essentiellement par les cotisations (10F par an en 1936), les collectes, la vente d'insignes (gerbes de blé et fourches croisées) et par les dons de quelques gros contributeurs. Le mouvement n'ayant pas les moyens de payer des permanents, les militants sont d'authentiques paysans qui quittent momentanément l'exploitation. [...]
[...] Dorgères envoie aussi des volontaires de la moisson A l'automne 1936, Dorgères devient à son tour organisateur de grèves : il tente de bloquer les Halles de Paris avec les maraîchers, confrontés à la chute des cours et aux revendications des salariés. En juin 1938, les militants dorgéristes du Finistère sud organisent une grève des producteurs de petits pois : ils interrompent la livraison aux conserveries, et ceux qui ne s'associent pas au mouvement voient leurs sacs de petits pois aspergés d'essence. Dorgères finit par être lâché par les notables de l'agrarisme, parce que son activisme menace la réalisation pratique d'une cogestion corporatiste entre l'Etat et les organisations agricoles. [...]
[...] Michel Bernard, métayer de Bourbon-l'Archambault, fonde en 1905, la Fédération des travailleurs de la terre, qui rassemble 1800 cotisants. Celle-ci demande la suppression de l'impôt colonique (paiement en espèce qui s'ajoute au versement en nature). Son journal syndical est dirigé par Emile Guillaumin (auteur de La Vie d'un simple), qui raconte son aventure dans un ouvrage intitulé Le syndicat de Baugignoux. Cette fédération connaît peu de succès pratiques, mais facilite l'implantation du socialisme rural. C'est ainsi que les paysans de l'arrondissement de Moulins votent dès 1910 pour la SFIO. [...]
[...] Des grèves sont organisées en 1936-37 par la CGPT dans les grandes exploitations de Seine-et-Marne et de Seine-et-Oise proches de la banlieue parisienne. Les salariés agricoles cessent le travail au moment de la moisson du blé et du démariage des betteraves (opération qui consiste à arracher une partie des plants pour un meilleur rendement). Les notables menacés dans leur monopole de l'agrarisme Après l'Union sacrée, les deux branches rivales de l'agrarisme auraient pu s'unir dans la défense du monde paysan, ce qu'elles n'ont pas fait : Le congrès agricole de 1919 aboutit à la création de la Confédération nationale des associations agricoles (CNAA). [...]
[...] Les stratégies agrariennes On distingue deux stratégies : l'action directe contre l'Etat (illustrée par le mouvement dorgériste) et le choix d'une cogestion entre les organisations agricoles et l'Etat, pour limiter le rôle de ce dernier. La seconde stratégie correspond à ce qu'on appelle le corporatisme c'est- à-dire à une économie dirigée, aux mains d'organisation professionnelles reconnues par l'Etat. Elle est à l'œuvre avec la Corporation de Vichy, puis avec la cogestion établie officiellement en 1961-1962 par les accords entre Edgar Pisani, ministre de l'Agriculture, et Michel Debatisse, président de la FNSEA. [...]
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