Le despotisme éclairé et l'expansion révolutionnaire française ont aboli le servage avant 1815 dans la majeure partie de l'Europe, mais il subsiste en Russie jusqu'en 1861 sous des formes rigoureuses, souvent plus proches de l'esclavage personnel que de l'asservissement à la terre. Ce système propre à la Russie s'est constitué au cours du XVIII°siècle, sous les règnes des tsars réformateurs de la dynastie des Romanov, Pierre Ier le Grand et Catherine II, à contre-courant donc du reste de l'Europe. Une telle pratique répond alors à deux sortes de considérations : il s'agit au départ d'une réaction défensive contre la fuite d'une main-d'œuvre indispensable pour assurer la simple consommation de la noblesse, mais c'est aussi un moyen pour les tsars de s'attacher les services et la fidélité des nobles auxquels la propriété des terres a été octroyée
[...] De plus, l'abolition du servage est la première réforme d'une politique de libéralisation menée par un tsar conscient des changements à opérer, une réforme à ce point significative que René Girault estime avec 60 ans de retard, l'Empire tsariste entre dans le XIX° siècle Cependant, les conséquences évoquées ci-dessus montrent que les buts escomptés ne sont pas atteints. C'est seulement en 1906, à la veille de la Grande Guerre, qu'un réformateur, le ministre Stolypine, donnera enfin aux paysans les moyens d'acquérir la pleine propriété de la terre. Ce conservateur éclairé tentera de sauver l'autocratie en la refondant sur une assise sociale plus large, la paysannerie pleinement propriétaire. Cette réforme décisive aura des effets bénéfiques immédiats, mais elle viendra trop tard pour sauver le régime et la Russie elle-même de la catastrophe. [...]
[...] Une telle pratique répond alors à deux sortes de considérations : il s'agit au départ d'une réaction défensive contre la fuite d'une main-d'œuvre indispensable pour assurer la simple consommation de la noblesse, mais c'est aussi un moyen pour les tsars de s'attacher les services et la fidélité des nobles auxquels la propriété des terres a été octroyée. De plus, le servage est censé avoir une valeur mercantile (ce que les faits ont démenti par la suite). Par conséquent, la masse du peuple russe au XIX° est constituée à 90% de paysans, ou moujiks, presque tous serfs, appartenant à l'Etat ou aux grands propriétaires (environ familles nobles). On voit donc que le servage fut pendant des siècles l'une des caractéristiques fondamentales de la société russe : en 1861, il est aboli. [...]
[...] La nécessité de réformer un système archaïque et inadapté Le servage et ses effets durant plus de la moitié du XIX° siècle 1. chiffres : En 1858, le problème du servage concerne de serfs privés et de serfs des apanages et de paysans d'Etat, jouissant de la liberté personnelle, mais assujettis à corvées et redevances, et n'ayant pas la propriété de la terre, tout comme les moujiks (paysans) dépendant d'un barine (seigneur). Les paysans libérés par le service militaire sont soit au total avec leurs familles la condition de serf - La condition des serfs des domaines privés se confond souvent avec celle des esclaves : malgré l'interdiction de les aliéner sans la terre (1833), nombre de seigneurs en difficulté vendent ou hypothèquent leurs paysans comme ils le feraient d'objets inanimés. [...]
[...] L'absence de propriété ou de jouissance perpétuelle des terres pour les paysans, le sentiment des grands propriétaires que le revenu que leur procure le travail paysan est sans contrepartie constituent autant de freins à tout progrès agricole, qu'il s'agisse d'améliorer les terres ou les méthodes de travail (habitudes de routine, de basse productivité De plus, le servage ralentit l'expansion industrielle et commerciale (la reconversion est difficile), et conduit à la paupérisation des masses paysannes : tandis que la pression démographique s'accroît, les terres attribuées aux familles tendent à diminuer de surface, surtout dans les riches steppes du Sud, et les débouchés urbains sont restreints. Une réforme de plus en plus pressante Une prise de conscience particulièrement lente : nous ne nous résolvons pas à atténuer la cruauté de leur sort et à rendre leur situation moins intolérable, les serfs ne manqueront pas, tôt ou tard, de se révolter contre notre volonté», écrit Catherine vers 1767. Et de fait, la révolte de Pougatchev lui donne raison. [...]
[...] - D'autre part, les serfs ne sont pas uniquement employés au travail de la terre : 1. domestiques 2. artisans ou commerçants qui conservent leur statut servile et versent à leurs maîtres une partie de leurs salaires et profits 3. main-d'œuvre des mines et usines 4. ouvriers agricoles employés par les propriétaires des riches terres ukrainiennes pour des travaux saisonniers - condition complexe des paysans, relevant à la fois du servage, de l'esclavage, et du salariat 3. [...]
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