Le premier des premiers mai date de 1886 aux Etats-Unis, mais en réalité, retracer l'histoire de ce jour nous oblige à remonter deux ans plutôt, en 1884, lorsqu'au cours du IVème Congrès de l'American Federation of Labor, les principaux syndicats ouvriers se donnent deux ans pour imposer aux chefs d'entreprise la journée de huit heures. Le jour du 1er mai est alors choisi car beaucoup d'entreprises américaines entament leur année comptable ce jour-là. Ainsi, le 1er mai 1886, près de 340 000 ouvriers se mettent en grève pour faire plier leurs patrons. Repris par les pays européens, le 1er mai est aujourd'hui un jour férié dans la plupart des pays, un jour où l'on ne travaille pas, le jour de la fête du travail, travail que l'on fête paradoxalement en ne travaillant pas. Mais la route fut longue avant que ce jour devienne ce qu'il est ; en Europe comme à Prague, le 1er mai devient un symbole des luttes ouvrières. On peut alors se demander comment les mouvements sociaux du 1er mai à Prague s'inscrivent dans les grands changements qui marquent la fin du XIXème siècle ?
En effet, l'essor économique tchèque permet l'apparition de nouvelles classes sociales et, avec elles, de nouvelles forces politiques (I), qui favorisent l'apparition d'un mouvement de contestation sociale singulier (II), qui malgré quelques résultats se heurte pourtant à sa propre division (III).
[...] La situation tchèque en 1890 Le compromis austro-hongrois de 1867, s'il permettait de sauver la monarchie, écartait la voie fédérale que les hommes politiques tchèques défendaient depuis près de 30 ans. Les Tchèques se réfugient alors dans leur développement culturel et économique, et le décollage industriel tchèque peut alors s'interpréter comme une solution de substitution à l'étouffement politique, comme une solution de repli et d'attente. L'essor économique tchèque permet la prolifération de la classe ouvrière La seconde moitié du 19e siècle est ainsi marquée par un rapide essor de l'industrie, mécanique, sidérurgique, et minière, dépassant progressivement l'industrie textile. [...]
[...] Le parti social-démocrate tchèque est lui fondé seulement quatre ans après, en 1878. Ils font figure de précurseurs, puisque l'on remarque que les partis sociaux-démocrates européens en général seront formés beaucoup plus tard, dans la dernière décennie le plus souvent, citons 1889 pour la Suède et son parti social-démocrate du travail pour la Pologne, et seulement 1905 pour la France et sa SFIO. On remarque également une autre différence significative : les syndicats et organisations ouvrières donneront naissance dans les pays tchèques aux partis politiques, alors qu'ailleurs les partis politiques et syndicats restent deux choses distinctes, plus ou moins proches certes, mais distinctes, les premiers n'étant pas issus des derniers. [...]
[...] L'étendue du mouvement est telle que le gouvernement n'ose plus envoyer contre les grévistes ni la gendarmerie ni l'armée, et se retrouve donc contraint de prendre en compte les revendications ouvrières, en invitant et acceptant leurs leaders à la table des négociations. Par l'ampleur des mouvements qu'elle met en œuvre, la social-démocratie prouve qu'elle est devenue une force politique puissante, et l'Empereur et son gouvernement n'ont alors plus d'autres choix que de la respecter. Un mouvement social certes pas seul, mais singulier La social-démocratie tchécoslave n'est pas bien sûr la première à voir le jour, elle n'apparaît pas isolée de son contexte. Cependant, on ne peut totalement la confondre avec ses semblables même si elle présente quelques traits communs. [...]
[...] Le Parti Chrétien Social tchèque est créé en 1894, avec un programme s'inspirant de l'encyclique Rerum Novarum du pape Léon XIII (1891), le Parti National tchèque est fondé en 1898. En parallèle se constitue le parti agraire, ainsi que le parti populaire tchèque en 1900, issu d'une fraction des Jeunes Tchèques qui suit plutôt une tendance réaliste sous la tutelle de J. Kaizl puis de TG. Mazaryk, dont la politique s'oriente vers des idéaux humanitaires, la transformation de l'Autriche-Hongrie en État démocratique fédéralisé regroupant les petites Nations. [...]
[...] Dès 1888, les ouvriers se mettent en grève, et ce sont alors plus de ouvriers qui refusent d'aller travailler. Les affrontements avec la police sont nombreux, et font des morts. Malgré cela, la célébration du 1er mai devient dès lors le symbole des succès du mouvement ouvrier, et à partir de 1890 des manifestations rituelles sont organisées ce jour-là. Le 1er mai 1890 reste dans cette logique le premier mouvement d'une telle ampleur, puisque l'on retrouve plus de ouvriers dans les cortèges et meetings, dont près de qui défilent à Prague. [...]
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