L'histoire des paysans et de la IIIe République, c'est une histoire spécifique, fondamentale pour comprendre le visage de la France de l'époque. Dans l'Histoire des paysans français, du XVIIIe siècle à nos jours, il est notamment affirmé : « Notre vision du monde paysan a été façonnée par les notables de la IIIe République ». Mais c'est aussi une relation à double sens : la vision que la IIIe République veut donner d'elle-même est indissociable de l'importance du monde paysan.
En quelque sorte, elle est dès ses débuts tournée vers les campagnes, tandis que celles-ci conservent jusqu'à la fin des exigences républicaines. Il s'agira donc de voir comment l'évolution de leurs rapports et de leurs influences réciproques témoignent-elles d'un lien toujours présent.
En 1870, les paysans sont contre le nouveau régime, mais accédant peu à peu à la politique, ils finissent par s'accommoder à la République. En effet, dans une volonté à la fois d'intégration et d'enracinement dans les campagnes, les paysans et la République célèbrent un mariage croissant qui culmine au tournant du siècle. Cependant, le monde rural, de plus en plus isolé, finit par se séparer du régime dès l'entre-deux-guerres. La fin du XIXe siècle constitue l'éveil politique de la paysannerie, dont le ralliement à la République permet la consolidation du régime.
Sous le Second Empire, Napoléon III avait accordé le rétablissement de certaines libertés (de presse, de réunion…). Les avantages donnés par l'empereur aux campagnes, associés à une bonne conjoncture économique (notamment l'augmentation des prix agricoles) incitent les masses rurales à se rallier à l'Empire. L'écrasant succès de l'empereur au plébiscite du 8 mai 1870 confirme le bonapartisme des campagnes.
[...] De plus, le monde paysan reste quelque peu fermé aux évolutions, notamment par l'absence de promotion par l'école. Les lois Ferry de 1881- 1882 qui permettent la diffusion de l'enseignement ne sont accomplies dans les campagnes que vers 1900. Le mouvement général de massification de l'école primaire n'implique pas la démocratisation de l'enseignement, car deux écoles très séparées subsistent toujours. A l'Ecole de l'élite s'oppose l'Ecole du peuple la communale qui accueille la majorité des Français. L'unique but de cette école est de diffuser un enseignement général dans un esprit républicain. [...]
[...] Le fossé se creuse encore plus pendant les grandes vacances d'été, notamment à l'été 1936 où les paysans voient les citadins revenir s'amuser à la campagne en saison de travail agricole intensif. Cela ne fait qu'accentuer le malaise et le ressentiment entre les paysans et la République qui semble , à leurs yeux, soutenir désormais les citadins Vichy ou le retour aux racines rurales La défaite de la France face à l'Allemagne, qui marque la fin de la IIIe République, voit paradoxalement une éphémère revanche des paysans. [...]
[...] Les paysans ne se sentent pas intégrés à la communauté nationale ; le décalage entre les deux France est grand à ce moment. En septembre 1944, le général de Gaulle nomme François Tanguy-Prigent ministre de l'Agriculture : c'est le premier paysan authentique à accéder à la charge ministérielle ; il lance en 1945 une importante réforme du fermage. La fin de la guerre voit les pouvoirs publics accepter désormais l'idée qu'il faut faire entrer les paysans dans l'ère de la modernisation. [...]
[...] A l'inverse, un sentiment d'appartenance commune semble unir les paysans devant la crainte et le mépris des citadins. L'image d'une unité de la France rurale est largement entretenue par la contribution du syndicalisme agricole, notamment par la SNEA, qui devient en 1910 la Fédération nationale de la mutualité et de la coopérative agricole. L'urbanisation entraîne l'augmentation des humiliations et des handicaps (la langue, l'image négative des paysans). A la légende noire d'un monde rural retardé et réactionnaire, les paysans opposent leur défiance du monde citadin. [...]
[...] La défense des intérêts paysans devient ainsi un des thèmes favoris des partis. 1880-1914 : des campagnes intégrées à la République, mais isolées au sein de la France 1 Ferry et la République des paysans : l'enracinement républicain 1 Les paysans face à la République : la politique au village Il faut tout d'abord rappeler que les Français sont majoritairement restés des ruraux : ils constituent 56% de la population en 1911. Cette France des campagnes est aussi celle des paysans : 40% de la population active est dans l'agriculture, avec un goût dominant de la petite propriété. [...]
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