Spaak est certainement un parfait exemple d'animal politique. Né en 1899, mort en 1972, il est issu d'une famille où la politique (orientée à gauche) et les arts sont des activités naturelles. Avocat, il est élu député socialiste 1932. Ministre dès 1935, il devient un habitué du ministère des Affaires étrangères. Il est aussi trois fois premier ministre (1938-1939, 1946 et 1947-1949). Spaak aimait à se présenter comme un personnage plutôt simple : parlant de son enfance, il expliquait ainsi : "je n'ai jamais été amoureux de ma mère ni de ma soeur. Je n'ai jamais été jaloux ni de mon père ni de mes frères. Je n'ai eu aucune angoisse religieuse et ma vie sexuelle a été normale."
L'image est certainement un peu trop lisse et le personnage est en fait, comme l'autre grande figure européenne de la Belgique, van Zeeland, passablement complexe. C'est en tout cas une figure essentielle de la vie politique belge pendant une trentaine d'années. Il est également considéré comme l'un des pères de l'Europe et le bâtiment abritant l'hémicycle principal du Parlement européen à Bruxelles porte son nom. Reste à comprendre l'articulation entre la politique belge et le projet européen de Spaak.
(...) En 1935, Spaak entre au salon Didier. La "belle madame Didier", comme l'appelle le tout Bruxelles des années 1930, convie régulièrement l'élite intellectuelle bruxelloise à débattre des Etats-Unis d'Europe, rempart contre le fascisme et la guerre. Mais l'année 1935 est surtout pour Spaak celle de la formation du gouvernement van Zeeland, dans lequel il occupe la fonction de ministre des transports. Van Zeeland appartient à la droite catholique, mais les deux hommes éprouvent une sympathie réciproque, qui ne sera partiellement compromise que plus tard, au moment de la question royale. Spaak reste durablement reconnaissant à van Zeeland de lui avoir confié son premier ministère. Après les élections de 1936, Spaak reste ministre dans le
nouveau gouvernement van Zeeland, mais il est cette fois ministre des Affaires étrangères, fonction dont il va devenir l'habitué jusqu'au milieu des années 1960 (...)
[...] Pour Mendès France, c'est l'intransigeance des cinq, et en particulier de Spaak, qui est la cause de l'échec des négociations de Bruxelles. Pour Spaak, la responsabilité de l'échec de la CED incombe à Mendès France. Puisqu'il faut trouver une solution de rechange pour la RFA, Spaak accepte les accords de Londres et de Paris, tout en estimant que l'idée européenne ne sort pas grandie de cette aventure. Spaak est d'ailleurs inquiet. La France lui apparaît alors comme un pays décadent. Or il est très difficile de concevoir une Europe solide sans la France. [...]
[...] Des contacts étroits sont cependant noués entre Spaak et van Kleffens. En 1942, Spaak accepte de discuter d'une union économique avec les Pays-Bas, dont le Luxembourg, mais aussi la France ne doivent pas être a priori écartés. Ceci aboutit à l'accord monétaire entre les Pays-Bas et l'Union Economique Belgo- Luxembourgeoise en octobre 1943. Pendant les années de guerre, Spaak réfléchit bien sûr aussi aux rapports que la Belgique doit entretenir avec les grandes puissances. Il est impressionné par la puissance américaine. [...]
[...] Spaak, le plan Marshall et l'OECE. A l'annonce du plan Marshall, Spaak est d'abord réservé. La Belgique, dont le redressement est rapide, n'a guère besoin du plan. Il est par ailleurs hésitant fasce au projet européen qui accompagne le plan : l'idée lui paraît certes bonne, mais n'est-elle pas prématurée ? A l'époque, Spaak est convaincu qu'un groupe franco- britannique, ou franco- italo-britannique pourrait jouer un rôle de médiateur entre les Américains et les Soviétiques. Spaak, par ailleurs, ne participe pas au congrès européen de La Haye, mais il le regrette : il s'est abstenu par solidarité avec le Labour britannique. [...]
[...] Après l'effondrement de la France, Spaak et Hubert Pierlot [homme politique catholique, premier ministre de 1939 à 1945] traversent, dans des conditions dignes d'un roman d'aventures, l'Espagne, avant de gagner Londres. Plans de guerre pour l'Europe d'après-guerre. C'est incontestablement pendant la guerre que Spaak développe ses qualités d'européen et d'atlantiste. Dès la fin du mois de novembre 1940, Spaak explique à Pierlot que la Belgique ne pourra sans doute pas retrouver après la guerre la même indépendance qu'avant mai 1940. [...]
[...] Lorsque Spaak se rend à Paris en novembre 1944, Georges Bidault et de Gaulle ne souhaitent pas vraiment discuter d'une entente occidentale sans l'avis des Soviétiques (qui vont refuser). Le décembre 1944, Spaak évoque cependant encore la reconstruction d'un ordre international dans un discours à la Chambre des Représentants. Il décrit un système à trois étages : - la sécurité collective. Une alliance européenne. Des ententes régionales. Ces idées sont en partie issues du rapport préliminaire de la CEPAG [Cf. van Zeeland et sur la Belgique]. [...]
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