[...] En 1815, les "ultras", plus royalistes que le roi, dominent la Chambre. Grands noms, cadets, nobles de province, ou roturiers, radicalisés par les Cent jours, hommes de la grande propriété terrienne, du droit divin et de l'absolutisme, inspirés par les théoriciens de la contre-Révolution et de la théocratie, ils sont contre la Charte, le Concordat napoléonien, etc.. Leur chef naturel est le comte d'Artois, futur Charles X, on trouve parmi eux le duc de Richelieu ou le comte de Villèle.
Face à ces réactionnaires, au sens strict, les Constitutionnels, ou "doctrinaires", sont des conservateurs, favorables à la Charte et au système censitaire, qui acceptent 1789 mais non la suite de la Révolution, entendent marier liberté et monarchie et soutiennent le ministère. Les libéraux, ou "indépendants" en sont l'aile gauche, hostile à l'Ancien régime, rêvant d'une évolution à l'anglaise vers un régime parlementaire où le roi règne sans gouverner ; parmi eux, La Fayette, l'écrivain Benjamin Constant, le banquier Lafitte ou l'industriel Casimir Périer. S'y ajoute, hors parlement, une opposition moins républicaine (la République, liée à la guillotine, fait peur) que bonapartiste, relancée par les Cent jours, la mise en demi-solde de 12 000 officiers, le licenciement de 300 000 soldats qui racontent au pays la légende dorée de Napoléon.
Les "ultras", majoritaires, veulent une revanche. D'où une terreur blanche légale, avec détentions administratives (et non judiciaires), loi sur les "cris et écrits séditieux", juridictions d'exception sans appel (cours prévotales dans chaque département), bannissement des régicides (ceux qui ont voté la mort de Louis XVI, comme Fouché ou le peintre David), 70 000 arrestations, 6 000 condamnations. Ils abolissent le divorce en 1816, interdisent au gouvernement de vendre les forêts ayant appartenu à l'Eglise pour payer les dettes napoléoniennes, mais ils n'obtiennent ni la peine de mort pour simple détention d'un drapeau tricolore, ni l'élargissement du corps électoral (ils préfèrent "leurs" paysans à la bourgeoisie urbaine), ni la reconstitution des biens de l'Eglise, ni la fin du monopole d'Etat sur l'éducation, ni la révocation de la vente des biens nationaux, tout cela aurait suscité des troubles... (...)
[...] Le patriotisme révolutionnaire et impérial est réendossé par un régime qui insiste sur Valmy et Jemmapes, et après 1834 le ministère de l'Instruction publique consent un effort exceptionnel en faveur de l'enseignement de l'histoire nationale. Les républicains sont désemparés. De plus, ils sont divisés en libéraux et socialistes. Ils essaient de s'insurger à Paris lors des funérailles du général Lamarque, en juin 1832, mais sont écrasés. Le gouvernement épure l'administration, multiplie les procès de presse, réprime a tout va. Toujours en 1832, à Lyon, les ouvriers du textile, les canuts, s'insurgent, pour obtenir un "tarif", un salaire minimum. [...]
[...] Le Roi est irrité par ces royalistes qui veulent lui dicter sa conduite. Il finit par dissoudre la "chambre introuvable", en septembre 1816. Bilan paradoxal: parce qu'ils s'opposaient au gouvernement, les ultras, adversaires du parlement, en ont affirmé les droits, réclamant presque un régime parlementaire. Quant au libéralisme de la période suivante, il résulte d'élections où les préfets n'ont pas ménagé les pressions. L'échec d'un relatif libéralisme (1816-1820) La majorité "constitutionnelle" de Richelieu et Decazes (qui lui succède en 1818) vote des lois libérales favorables à la bourgeoisie, à la préparation desquelles collabore le jeune Guizot. [...]
[...] La Chambre s'inquiète, et, dans une adresse au Roi, lue par Royer-Collard, souhaite un gouvernement en accord avec "les vœux du peuple". Le Roi la dissout. Il compte sur le prestige que doit lui donner l'expédition d'Alger, début de la conquête de l'Algérie. Mais fin juin, début juillet, lorsqu'on vote, la majorité libérale est encore renforcée. Charles X choisit l'affrontement : il ne veut pas accepter une monarchie parlementaire, et croit que ce sont les concessions qui ont perdu Louis XVI. Il dit préférer monter à cheval (pour la bataille) qu'en charrette (pour l'échafaud). [...]
[...] Les Chambres sont convoquées le 03 août. Louis-Philippe s'en remet à elles, pour de ne pas se prononcer sur sa propre nomination par Charles comme Lieutenant général du royaume et Régent en attendant la majorité de "l'enfant du miracle" (ce qui le fait qualifier de "tuteur infidèle" par les légitimistes, les partisans de la branche ainée, réputée "légitime"). Les deux tiers des Pairs et 40% des députés, légitimistes, boudent, les présents déclarent le trône vacant. Le 07, Louis-Philippe Ier est "roi des Français" et non plus "roi de France") "par la grâce de Dieu et la volonté de la Nation" : cela relève d'une double légitimité. [...]
[...] De même, la monarchie maintient le monopole d'Etat sur l'université : elle l'a aboli en 1814, il a été rétabli par les Cent jours, il demeure. Il n'y a pas de vrais partis politiques, mais les ultras ont l'habitude de se réunir entre eux, et, contre eux, une sorte de parti libéral se crée, avec des industriels, des banquiers. Constant, La Fayette, Laffitte, Périer sont élus députés. Les "ultras", furieux, complotent, veulent faire abdiquer le Roi (qui n'a pas d'enfant) en faveur de son frère. [...]
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