Dès 1913, Julian JUDERIAS en a donné une définition précise : « Par légende noire, nous entendons l'atmosphère créée par les récits fantastiques qui ont été publiés sur notre patrie dans presque tous les pays, les descriptions grotesques qu'on a toujours faites du caractère des Espagnols – individuellement et collectivement -, la négation – ou en tout cas, l'ignorance systématique – de tout ce qui nous est favorable et nous honore dans les divers domaines de la culture et de l'art, les accusations qu'à toutes les époques on a portées contre l'Espagne, à partir de faits exagérés, mal interprétés ou totalement faux, et, enfin, l'affirmation, exprimée dans des livres apparemment respectables et documentés, et bien souvent reprise, commentée et amplifiée par la presse étrangère, que notre patrie constitue, du point de vue de la tolérance, de la culture et du progrès politique, une exception lamentable dans le groupe des nations européennes. Bref, nous entendons par légende noire la légende d'une Espagne inquisitoriale, ignorante, fanatique, incapable de figurer au nombre des peuples cultivés, aujourd'hui aussi bien qu'hier, toujours disposée aux répressions violentes, ennemie du progrès et des innovations… ». Cette légende noire est une légende ancienne, qui serait apparue dès le XIVème siècle, avant de véritablement prendre corps au XVIème
[...] Lucien FEBVRE a d'ailleurs bien montré que dans le premier quart du XVIe siècle, jamais l'accusation de judaïsme [ ] n'a été plus fortement proclamée Une chose d'autant plus étonnante que les Juifs avaient été frappés en 1492 d'une mesure d'expulsion ! Cette Légende noire est donc aussi une légende noire antijuive et antimaure. Cependant, cette Légende noire italienne se désagrège ensuite lentement pour 2 raisons : o La détérioration objective de la situation des marranes, o Au tournant des années 1530, l'ennemi n'est plus l'Aragon, mais le Turc : Devant ce péril, la solidarité méditerranéenne et chrétienne des Italiens et des Espagnols joue à fond. [...]
[...] La Légende noire d'origine allemande Cette légende noire a ensuite été assimilée par les Flamands et les Anglais et en général, par l'ensemble du monde protestant européen. Elle se présente avec des traits beaucoup plus accusés que la Légende noire italienne : l'Espagne est le suppôt de Rome, du catholicisme : donc, avec un passage rapide, du diable, de la corruption, du vice. Pour Ruggiero ROMANO (Les mécanismes de la conquête coloniale : Les conquistadores, 1972), si cette Légende noire a pris une telle épaisseur, c'est parce que s'est greffée une autre Légende noire : celle qui s'est formée à propos de l'Amérique. [...]
[...] L'honneur est aussi un guide de vie morale. Il commande par exemple la loyauté envers le souverain ou le respect de la parole donnée. o Il prend ensuite plusieurs exemples concrets : Celui du condottiere Braccio da Montone, qui affirma vers 1420 : «Vous tenez pour plus honorable de vous faire mettre en pièces par l'ennemi que de sauver votre vie et de vous réserver pour la revanche Pour l'ambassadeur GUICHARDIN, en 1513, Les hommes de cette nation [ ] estiment beaucoup l'honneur au point que, pour ne pas le ternir, ils ne se soucient généralement pas de la mort. [...]
[...] o Un autre ouvrage a aussi beaucoup influencé ce courant de la Légende noire : Las relaciones d'Antonio PEREZ[1], ancien secrétaire du roi d'Espagne, qui comporte essentiellement des attaques personnelles contre ce dernier. Philippe II est accusé d'inceste, d'assassinat sur les personnes de sa femme Isabelle de Valois et de son fils Don Carlos, de bigamie, d'adultère Il n'empêche que les Castillans sont aussi présentés comme un peuple méchant et pervers [ plein d'orgeuil, d'arrogance, de tyrannie et de déloyauté. Sur l'affaire Antonio PEREZ, lire PEREZ, Joseph, L'Espagne de Philippe II, Fayard, 1999. [...]
[...] La Légende noire d'origine italienne Elle se réfère à des traits essentiellement culturels. Le mépris est un mépris par rapport aux manières de table, à l'habillement, à la manière de faire la cour. À la limite, cette moquerie peut entrer tout à fait en contradiction avec la réalité des faits : ainsi, par exemple, il est évident que la tendance italienne à considérer le soldat espagnol comme un mauvais soldat (d'où la création du personnage, dans la comédie italienne, du capitano spagnolo, vantard, bouffon, lâche) est un non-sens qui peut se retourner contre celui-là même qui l'énonce. [...]
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