Les historiens qualifient l'indépendance du Brésil d'"émancipation atypique" (Bennassar): la rupture avec le Portugal ne s'est pas faite, comme ailleurs, de façon violente, tandis que l'originalité du phénomène est renforcée par l'existence d'une étape intermédiaire, la constitution de l'empire luso-brésilien (le gouvernement portugais s'est réfugié au Brésil). Pour la comprendre, il faut également tenir compte de contextes extérieurs, mais également de l'existence de contestations internes.
Dans les dernières années du XVIIIe siècle, trois conspirations, d'importance inégale, sont découvertes et réprimées. Elles sont fomentées dans les foyers les plus importants de la colonie : Minas Gerais, Rio et Bahia. Elles peuvent être considérées comme des mouvements précurseurs de l'émancipation politique, ou du moins comme des ferments de division.
[...] Quarante-sept personnes sont emprisonnées (majorité de mulâtres et de noirs), six sont condamnées à mort et quatre finalement exécutées La conspiration de Rio (1794) Ce dernier mouvement est de moindre importance que les précédents. La conjuration n'a en effet pas dépassé le stade des conciliabules ou des discussions politiques critiquant le gouvernement portugais, entre intellectuels de la société littéraire locale (Sociedade Literaria, créée en 1786). Leur dénonciation entraîne la fermeture de la société, et leur récidive provoque leur arrestation en 1796. Il n'est cependant pas de poursuites : la reine fait libérer les accusés Quel bilan ? [...]
[...] Il est condamné à mort après un long procès et exécuté en avril La conspiration des tailleurs de Bahia (1794) En 1794 à Bahia, une autre conjuration est préparée par des artisans (dont des mulâtres et des noirs), des soldats sans emplois, des agriculteurs sans terres. Son inspiration est avant tout sociale : elle est d'ailleurs souvent appelée la révolution des tailleurs ce qui la définit comme un mouvement organisé et inspiré par des artisans. Le nouveau gouverneur a en effet supprimé le contrôle des prix sur la farine de manioc, produit alimentaire de base pour les populations les plus pauvres, et de la viande. Une forte hausse en résulte. [...]
[...] De plus, les mesures prises à propos du Brésil le remettent sous la dépendance de la métropole : transformation des capitaineries en provinces gouvernées par des juntes, responsables devant de gouvernement et les Cortès de Lisbonne ; le pouvoir militaire de chaque province appartient à un gouverneur sous l'autorité du pouvoir central ; tous les organes de gouvernement créés à Rio depuis 1808 sont supprimés ; et le prince héritier doit rentrer lui aussi. Ces mesures refont du Brésil une colonie, elles le replacent en situation de dépendance. Le régent Dom Pedro apparaît alors comme une figure centrale pour les Brésiliens : arrivé à Rio à l'âge de 10 ans, il n'a presque pas connu le Portugal, et s'est attaché au Brésil. [...]
[...] Le prince héritier, Dom Pedro, reste au Brésil comme régent. Mais il est contraint lui aussi de prêter serment sur les bases de la constitution portugaise, et de recomposer le conseil de régence dans un sens libéral. Un élément est fondamental dans la compréhension de la suite : il ne faut pas oublier que le temps de propagation des nouvelles entre Lisbonne et Rio est à cette époque d'environ deux mois dans chaque sens ; la réaction à un événement est donc perçue dans le lieu de celui-ci quatre mois plus tard environ ! [...]
[...] Ce système présente cependant deux failles pour la métropole. La révolution industrielle anglaise n'est évidemment pas étrangère au développement du Brésil (besoin de textile et de produits tinctoriaux en constante augmentation) ; de fait, les élites brésiliennes prennent conscience des avantages que procureraient la fin de l'exclusif et une liberté totale du commerce. En outre, ce système ne peut perdurer que dans la mesure où le Portugal ne prend pas part aux guerres européennes, ce que le pays arrive à faire entre 1802 et 1807. [...]
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