Dans la continuité des valeurs de liberté et d'égalité prônées par la Révolution française en 1789, l'Europe du premier XIXème siècle met progressivement fin aux discriminations civiques les plus importantes, établissant une égalité juridique entre tous les hommes. La Russie et les Etats-Unis apparaissent comme des exceptions: le servage et l'esclavage restent des marques fortes de la domination d'une partie de la société sur une autre. Si le servage n'est que le symbole du retard économique, social et sociétal qu'a pris la société russe depuis plus d'un demi-siècle, l'esclavage semble soulever plus de critiques aux Etats-Unis, nation de la liberté.
En Russie, le tsar Alexandre II, arrivé sur le trône en 1855, proclame l'abolition du servage le 19 février 1861; cette volonté de modernisation se fait dans la paix civile. Aux Etats-Unis, c'est dans le contexte de la guerre de Sécession, opposant de 1861 à 1865 l'Union à onze États esclavagistes et sécessionnistes du Sud, que le président Abraham Lincoln proclame l'abolition de l'esclavage le 1er janvier 1863. Le sort des quatre millions d'esclaves aux États-Unis et des 47 millions de serfs en Russie en est bouleversé: ce sont des hommes libres. Pourtant, l'abolition ne règle ni la question noire ni celle des moujiks.
Alors, quelles furent les conséquences de l'abolition du servage et de l'esclavage aux Etats-Unis et en Russie? Dans quelle mesure cette réforme, pourtant désirée, n'a représenté qu'un voile face aux intérêts des classes dirigeantes et à la nouvelle donne sociale?
Après avoir observé la relative amélioration individuelle et juridique des nouveaux hommes libres, nous verrons comment les intérêts des classes dirigeantes et la réalité économique ont limité l'abolition du servage et de l'esclavage en Russie et aux Etats-Unis. Enfin, nous constaterons que la nouvelle configuration sociale, loin de régler les anciens problèmes, en a fait naître de nouveaux.
[...] - De nouveaux mouvements et la montée des revendications paysannes Nous l'avons dit les paysans ne sont pas satisfaits : la terre ne leur apparient pas vraiment et ils paient cher. Ils attendaient une seconde réforme qui serait la vraie. Globalement, la part des parcelles cultivées par les moujiks baisse > problèmes de subsistance. (doc supplémentaire). 1861 : année violente : les paysans avaient cru que les fonctionnaires ou les propriétaires falsifiaient volontairement les décisions impériales pour empêcher l'attribution de terre aux serf. [...]
[...] Conclusion Ainsi, nous dirons que l'abolition de l'esclavage aux Etats-Unis et du servage en Russie ont participé du même mouvement. En effet, les attentes des intellectuels, de certains politiques et des populations se sont vite effacées sous les contraintes juridiques, économiques et même sociales. De fait les Etats-Unis comme la Russie n'étaient sans doute pas prêts à voir leurs structures subir un tel bouleversement. Cependant, si ces pays sont désormais des lieux dans lesquels règnent le droit et l'égalité (du moins dans les grandes lignes), l'abolition du servage et celle de l'esclavage ont été des étapes importantes. [...]
[...] Hélène Carrère d'Encausse, La Russie inachevée. Éditions Fayard. Constantin de Grunwald, Société et Civilisation russes au XIXème siècle. Éditions du Seuil. [...]
[...] - Les seigneurs russes font tout pour conserver leur richesse et donne le minimum de terres possible aux paysans. - En Russie la réforme laisse deux années d'adaptation : les seigneurs conservent leurs avantages durant celles-ci > contrôle des serfs, de leurs mœurs, peuvent toujours les punir Droit de police. - L'arbitre de paix du village est un des seigneurs, désigné parmi les plus riches : la possibilité de faire appel est donc limitée pour les moujiks. Les statuts sociaux sont modifiés mais en réalité la hiérarchie sociale est conservée, qu'elle place les noirs en dessous des blancs ou les paysans en dessous des autres russes. [...]
[...] Marc Raeff, Politique et culture en Russie. Éditions de l'EHSS. Claude Fohlen, Histoire de l'esclavage aux Etats-Unis. Éditions Perrin. Michel Heller, Histoire de la Russie et de son empire. Éditions Plon. René Girault et Marc Ferro, De la Russie à l'URSS : l'histoire de la Russie de 1850 à nos jours. Éditions Nathan. [...]
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