La notion de culture de guerre est au coeur de l'histoire culturelle de la Première Guerre mondiale, thème d'étude né dans les années 1990 autour de l'Historial de Péronne. La notion de « culture de guerre », au singulier, est utilisée pour la première fois par Stéphane Audoin-Rouzeau dans sa thèse À travers leurs journaux : 14-18, les combattants des tranchées, publiée en 1986, pour désigner ce qu'il considère comme une culture commune aux combattants, expliquant notamment la force de leur attachement à la nation. Dans une définition élargie, la notion de « culture de guerre » désigne « la manière dont les contemporains se sont représentés et ont représenté le conflit". Néanmoins, cette notion a très rapidement dû faire face aux critiques d'historiens lui reprochant notamment de regrouper de manière grossière des systèmes de représentation très différents, sans se préoccuper des particularités nationales et des caractéristiques de chaque individu et leur capacité à résister ou à interpréter cette « culture de guerre ». Finalement, de nombreux historiens ont préféré mettre en avant la notion de « cultureS de guerre », au pluriel donc, afin de souligner l'hétérogénéité de ces cultures.
En proposant une histoire culturelle de la Première Guerre mondiale, ces historiens ont voulu apporter de nouveaux d'outils analyses, de nouveaux angles d'approche à l'étude de cette période, ouvrant ainsi de riches perspectives. Cependant, dans un souci de clarté et pour éviter la dispersion de notre sujet d'étude, nous nous limiterons ici à l'étude du cas français.
Dans quelle mesure la notion de « cultures de guerre » permet-elle d'apporter un éclairage nouveau sur le premier conflit mondial ?
[...] Les artistes, les scientifiques contribuent, eux aussi, à la cristallisation de ces cultures de guerre. De nombreux artistes et intellectuels se sont ainsi mobilisés activement en faveur de cette guerre. Il semblerait que ce soit parmi les élites intellectuelles et artistiques que les raisons favorables à la guerre, au combat s'imposèrent immédiatement et avec force. Certains y ont participé en tant que combattants, faisant preuve parfois d'une grande exaltation. C'est le cas d'Apollinaire, engagé volontaire qui, Polonais d'origine, a tout fait pour obtenir la nationalité française et donc pouvoir participer aux combats.
[...] Nous pouvons évoquer ici le rôle fondamental de l'école comme agent de mobilisation des Français face au conflit. Le ministre de l'Instruction publique, Albert Sarraut et la multiplication des journées patriotiques font de la guerre le coeur de l'enseignement public. Nous pouvons citer ici l'ouvrage La guerre des crayons, recueil de dessins d'enfants réalisés pendant la Première Guerre mondiale et regroupés par Manon Pignot. Ces dessins ont été réalisés à la demande des instituteurs de deux écoles de Montmartre. (...)
[...] Les individus ont accepté, interprété différemment ces corpus d'idées. Par exemple, les populations vivant dans les zones occupées ont beaucoup plus souffert de la guerre, elles ont subies directement les sévices opérées par certains soldats allemands, particulièrement lors de l'invasion et lors de leur retraite. Ces populations se montrent donc plus sensibles aux récits des actes de barbarie perpétués par les Allemands et les croient plus facilement. A l'inverse, les Français de la zone libre ne connaissent ces faits que par la presse, les rumeurs ou les récits des réfugiés. [...]
[...] Finalement, la violence observable pendant la guerre serait un produit des cultures de guerre qui ne seraient pas des conséquences de la guerre mais leur véritable matrice. Cette haine de l'ennemi semble d'ailleurs être plus marquée en France que dans les autres pays et facilite la mort de l'autre. Cette apogée de la violence serait exercée aussi bien contre les soldats adverses que contre les civils, et serait assumée par les soldats. Selon S. Audoin-Rouzeau, ces derniers s'habitueraient à la violence des combats, à la présence de la mort et de la souffrance, devenues leur quotidien. [...]
[...] Néanmoins, cette notion a très rapidement dû faire face aux critiques d'historiens lui reprochant notamment de regrouper de manière grossière des systèmes de représentation très différents, sans se préoccuper des particularités nationales et des caractéristiques de chaque individu et leur capacité à résister ou à interpréter cette culture de guerre Finalement, de nombreux historiens ont préféré mettre en avant la notion de cultureS de guerre au pluriel donc, afin de souligner l'hétérogénéité de ces cultures. En proposant une histoire culturelle de la Première Guerre mondiale, ces historiens ont voulu apporter de nouveaux d'outils analyses, de nouveaux angles d'approche à l'étude de cette période, ouvrant ainsi de riches perspectives. Cependant, dans un souci de clarté et pour éviter la dispersion de notre sujet d'étude, nous nous limiterons ici à l'étude du cas français. Dans quelle mesure la notion de cultures de guerre permet-elle d'apporter un éclairage nouveau sur le premier conflit mondial ? [...]
[...] Becker et S. Audoin-Rouzeau parlent ainsi de messianisme patriotique et de messianisme catholique, les deux attribuant une mission civilisatrice à la France, terre des Droits de l'Homme et fille aînée de l'Eglise. La défaite de la France symboliserait alors une régression de la civilisation occidentale. Il convient cependant de souligner que cette notion de croisade est bien plus présente dans les systèmes de représentations de l'Arrière, plus fortement marqué par l'encadrement clérical, qu'au front où les hommes religieux présents semblent plutôt vouloir éviter la surenchère patriotique. [...]
[...] Rousseau met aussi en avant toutes les tentatives des soldats pour éviter le combat. Certes les mutineries sont restées assez faibles (30 à en France) mais l'historien insiste sur le fait que les refus de combattre sont multiformes : se rendre à l'ennemi, se faire affecter loin du front, être blessé de manière à ne plus avoir à combattre. Il convient donc de nuancer la force de ce sentiment national qui aurait poussé les soldats à se battre durant quatre ans. [...]
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