Après la chute de Robespierre, et par la même occasion de la Terreur, les « Thermidoriens » mettent en place, en 1795, une République conservatrice pour terminer la Révolution : le Directoire.
Pour les patriotes, l'Etat a charge d'âmes, car il a pour mission essentielle et pour raison d'être de préparer le bonheur de ses membres. Après la Terreur et les cultes de la Raison et de l'Etre Suprême, cette conception d'ensemble sur la mission morale de l'Etat subsiste toujours.
Sur le plan religieux, le directoire campe sur une position de restriction de la liberté de culte : les cérémonies privées sont autorisées mais non les manifestations publiques du culte catholique comme les sonneries de cloches et les processions. En dépit de cette politique entreprise par l'Etat, on constate un réveil catholique : les messes célébrées par les prêtres réfractaires clandestins se multiplient, tout comme les registres paroissiaux tenus secrets, attestant une reprise des baptêmes, mariages et enterrements religieux. De même, en parallèle des manifestations anti-républicaines, comme les abattages d'arbres de la liberté sont signalés au Directoire.
Sur le plan politique, cela se confirme par une poussée des royalistes : les monarchistes (ou Clichyens) exercent une influence grandissante à la droite des Conseils et battent la plupart des républicains aux élections de Germinal an V (avril 1797) : le tiers des nouveaux élus assure aux royalistes une majorité dans les Conseils. Les défenseurs de la République, face à cette percée royaliste, seront incapables d'assurer légalement la sûreté du régime, ce qui les poussent au coup d'état du 18 Fructidor an V, réelle césure politique, dont cinq hommes forts s'illustrent en Directeurs : Barras, La Revellière-Lépeaux, Reubell, Merlin de Douai et Neufchâteau.
Pour défendre, pour fonder la République, il semble que le meilleur moyen est de créer dans la famille un esprit républicain, des mœurs républicaines, car la famille est la cellule sociale élémentaire ; car on se demande aussi si le relâchement n'est pas imputable à une certaine mesure à la diminution du sentiment religieux.
A ces préoccupations nouvelles répondra la théophilantropie, qui ne sera en fait qu'une tentative privée pour reprendre l'œuvre de moralisation et d'éducation populaires, dans laquelle les gouvernements ont échoué.
La théophilantropie fut précédée par d'autres essais du même ordre : dues à des Jacobins et à des modérés, à des déistes et à des philosophes, la conscience religieuse des patriotes de toutes les nuances vient s'y refléter.
La Théophilanthropie est une expérience de « culte révolutionnaire » d'une durée de cinq ans (1796-1801). Ce type de culte regroupe des aspirations diverses, comme l'athéisme, la lutte contre l'Eglise, ou encore la volonté de consolider l'édifice révolutionnaire en instaurant la célébration de valeurs morales. Mais relisant l'étude d'Albert Mathiez on peut s'interroger sur la réception et le succès relatif du mouvement. Selon l'abbé Grégoire, elle se serait répandue rapidement dans plusieurs régions de France (mais aussi Belgique, Pays-Bas et Italie) et aurait sérieusement menacé le catholicisme.
La morale de ce nouveau culte est fondée sur les lois naturelles, la conscience jugeant le Bien et le Mal, ainsi que sur les devoirs de l'homme envers ses semblables et envers la République.
C'est un particulier, Jean-Baptiste Chemin-Dupontes né en 1760 et mort vers 1852, qui fonde le culte Théophilanthropique, après des études de théologie.
On peut donc se demander en quoi les relations entre ce nouveau culte, théophilanthropique, et le Directoire, organe de pouvoir et de décisions, témoignent d'une nécessité constante pour l'édifice révolutionnaire de se trouver une structure stable de moralisation du peuple, pour sauvegarder la République. Nous verrons tout d'abord, qu'il s'agit pour le Directoire, d'installer une nouvelle morale pour la sauvegarde de la République, puis nous étudierons comment un certain soutien du Directoire au culte théophilanthropique, lui a permit de se développer. Enfin, nous éluciderons comment d'un coup d'état à un autre, de Fructidor à Brumaire, à la fois culte théophilanthropique et Directoire passent de l'apogée à la décadence.
[...] En effet, il tire la nouvelle église de l'obscurité, attire sur elle l'opinion publique et lui donne l'appui du pouvoir. Le Directoire entreprend peu à peu de soutenir le culte théophilanthropique à travers différentes prises de positions et propositions. Il lui permet de se développer et de s'étendre. Deux phénomènes ont en quelque sorte impulsé la Théophilanthropie : tout d'abord la crise politique de l'an avec la percée des Catholiques, mais aussi la prise de position, directe et franche, de La Revellière- Lépeaux. Elles ont eu une influence considérable sur la Théophilanthropie. [...]
[...] Jean Pierre Chantin, Les marges du christianisme Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, Tome p.51-53. [...]
[...] Le discours du 12 Floréal de La Revellière donne la dernière impulsion au nouveau culte. Il a une conséquence importante pour la Théophilanthropie : dans son discours La Revellière revient sur l'existence primordiale d'institutions morales pour le bon fonctionnement de la République. Pour lui il y a trois moyens d'établir l'unité morale des Français : le culte, les cérémonies civiles et les fêtes nationales. Le culte formera des citoyens vertueux dans la vie privée, les cérémonies civiles formeront des citoyens animés les uns envers les autres d'un esprit de bienveillance réciproque, et les fêtes nationales inspireront à ces citoyens vertueux et sociables un ardent amour de la patrie, en feront des républicains. [...]
[...] Le temple est lui totalement épuré, dépouillé de sculptures et représentations iconographiques. Les cérémonies se distinguent par leur simplicité : un père de famille, debout devant l'autel, simplement vêtu, récite l'invocation père de la nature Ensuite les assistants procèdent en silence à leur examen de conscience. Puis tout le monde s'assoit pour entendre des lectures ou des discours de morale choisis parmi les textes les plus divers : Bible, et auteurs antiques (Socrate, Cicéron, Sénèque). Il y a ainsi, comme on peut le voir dans le Manuel, des cérémonies pour le baptême, le mariage, la première communion et les funérailles. [...]
[...] En effet, les élections de l'an IV et V avaient été favorables aux Catholiques. La Revellière lui, veut remplacer le catholicisme par un culte raisonnable C'est en pluviôse an V qu'il montre pour la première fois sa sympathie pour la nouvelle église. À l'occasion de l'organisation de l'instruction publique, La Revellière réitère, il aurait repris sa proposition de créer un nouveau culte et de rassembler l'élite des philosophes pour travailler à mettre l'invention dont il s'agit en harmonie avec les institutions de la république Suite à cela, il ne semble pas, si l'on en suit les Mémoires de Barras, que les suggestions aient été tout de suite bien accueillies pas ses collègues. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture