Comme beaucoup d'autres pays, le Japon avait tiré de la crise de 1929 la conclusion qu'un solide bloc semi-autarcique, construit autour d'une monnaie d'échanges commune, constituait le seul recours durable à l'effondrement du commerce international. C'est dans ce contexte qu'il avait amorcé en 1931 sa nouvelle expansion impérialiste, d'emblée conçue comme la satellisation de vastes espaces par son économie métropolitaine. Dès 1930, Ishiwara Kanji le dit clairement: ?Les quatre races du Japon, de la Chine, de la Corée et de la Mandchourie doivent participer à la prospérité commune au travers d'une division des responsabilités : aux Japonais, la direction politique et l'industrie lourde; aux Chinois, la main-d'oeuvre et l'industrie légère; aux Coréens, le riz; et aux Mandchous, l'élevage.? On ajoutera ensuite les Mongols à la liste, et cela donnera l'?harmonie des cinq races? dans les discours de propagande sur le Manchukuo. Il est cependant clair que l'égalité n'est pas de saison: la hiérarchie est au coeur de la vision nippone du monde, le Japon et son empereur figurant bien entendu à son sommet.
[...] Avant même l'effondrement des transports, les Japonais, sous prétexte d'appliquer le principe d'autosuffisance, s'étaient ingéniés à briser des courants d'échange immémoriaux, qui mettaient déjà en relation des zones complémentaires bien avant l'arrivée du premier colonisateur. Ainsi l'Indonésie fut-elle divisée en trois grandes régions. Chacune devait pratiquer l'autarcie, tout comme les diverses subdivisions de ces régions. La corvée et le travail forcé étaient essentiellement organisés à l'échelle locale. Le but était que chaque garnison nippone puisse vivre sur le pays, que le Japon soit seul en mesure de prélever les ressources, et enfin de réserver au maximum les réseaux de transports à ses besoins propres.
[...] À Singapour, immédiatement après la conquête nippone, une Overseas Chinese Association (OCA) fut mise en place, sous la direction du prestigieux intellectuel, apôtre du revival culturel chinois, qu'était Lim Boon Keng. Sa tâche la plus immédiate fut la mise à contribution de sa communauté, par un prélèvement qui atteignait 8% du patrimoine individuel, quand celui-ci avait une valeur supérieure à mille dollars locaux. L'OCA, en effet, devait coiffer toutes les associations charitables communautaires, et les financer. Mais surtout elle avait à verser à l'occupant, le plus vite possible (ce fut fait le 25 juin 1942), une énorme indemnité de 50 millions de dollars, en guise d'?acte de contrition" pour l'opposition des Chinois de Singapour au Japon. Malgré ses efforts elle n'en recueillit que 28 millions, et dut emprunter le reste à une banque, bien entendu japonaise... (...)
[...] cité, pp. 436-437 Weiner, ch. cité, p Weiner, ch. cité, p [72]Tarling, op. cité, p [73]Lee, op. cité, pp. 71-72 [74]NHB, op. cité, pp. 126-131; Kratoska (1998), op. [...]
[...] À partir de 1943, et surtout quand la guerre se rapprocha avec le débarquement américain aux Philippines (octobre 1944), la rupture croissante des communications maritimes à l'intérieur de la sphère japonaise aggrava encore la situation. Pour Singapour, malgré le statut traditionnel de port franc, le premier résultat fut un effondrement des recettes publiques (droits de port, taxations diverses de l'activité économique . On eut recours à divers expédients (enregistrement payant généralisé des activités et des biens, tels que les vélos), mais ce fut insuffisant. [...]
[...] En conséquence, beaucoup de volatiles furent atteints de maladies imaginaires, et disparurent des kampung[21] avec leurs propriétaires, qui cherchaient refuge dans les forêts et les montagnes, là où les Japonais ne les retrouveraient pas.”[22] La terreur suscitée par le pillage et les violences associées est telle que, en février 1946 encore, les autochtones d'Halmahera (Moluques) n'osent pas sortir de leurs refuges de jungle, où ils souffrent pourtant de la faim: prisonniers de guerre nippons se trouvent toujours en effet sur l'île, regroupés dans l'attente de navires à même de les rapatrier.[23] La plupart des sociétés appartenant à des autochtones ne sont pas confisquées. Mais elles doivent participer à l'effort de guerre du Grand Japon (Dai Nippon). Quand elles sont d'une certaine taille, elles sont associées en cartels obligatoires (les kumiai). Ils sont systématiquement dirigés par des hommes d'affaires japonais, souvent cadres des grandes zaibatsu de l'archipel, et reçoivent des avantages de type monopolistique. Ils permettent la satellisation des sociétés locales qui intéressent des Japonais. [...]
[...] Il est en tout cas évident que les morts se comptèrent par centaines de milliers, sinon par millions. De toutes les catastrophes d'un conflit qui en connut beaucoup, cela reste assurément à ce jour la plus ignorée. IV) Le travail forcé au Japon À la différence de l'Allemagne nazie, le Japon mobilisa en dehors de son territoire la majorité de ses travailleurs forcés. Ils furent cependant nombreux à gagner les mines, les usines et les chantiers de l'archipel. La grande majorité était des Coréens. [...]
[...] cit., pp. 466-467 Ibid., p Tarling, op. cit., pp. 224-225 Ka Chih-ming, Japanese Colonialism in Taiwan: Land Tenure, Development and Dependency, 1895-1945, Westview Ishibashi Naokata, ancien de l'unité 731, in Gibney, op. cit., p Cité in Honda, op. cit., p Tarling, op. cit, p David Tucker, “Labor Policy and the Construction Industry in Manchukuo: Systems of Recruitment, Management and Control”, in Kratoska (2005), op. cit., pp. 50-51 Ibid., pp & 57. [...]
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