[...] À mi-chemin entre l'agriculture de subsistance et la grande plantation capitaliste, on trouve les trois grands deltas rizicoles du continent : Irrawaddy (Birmanie), Chao Phraya (Siam, resté indépendant), Mékong (Cochinchine et secondairement Cambodge). Ils conservent pour l'essentiel des méthodes traditionnelles (les rendements sont même beaucoup plus faibles qu'au Tonkin ou qu'à Java : les engrais et l'irrigation sont peu répandus), sont globalement dominés par la petite exploitation individuelle, mais produisent massivement pour le marché mondial (dont ils subissent directement les fluctuations des cours), au travers d'intermédiaires (Chinois, ou Indiens en Birmanie) qui s'inscrivent dans le capitalisme moderne. Il s'agit d'une activité essentielle : l'ASE fournit 70% environ des exportations mondiales de riz, très majoritairement dirigées vers les pays d'Asie déficitaires (Malaisie, Singapour, Chine du Sud, Java au XXe siècle). Le riz est, de loin, le premier poste des ventes de la Birmanie, du Siam, du Cambodge et du Vietnam.
[...] La Première Guerre mondiale, comme en Chine ou au Japon, fournit une protection provisoire de facto aux industries indiennes : les usines et les navires britanniques sont mobilisés pour les besoins de l'armée. La production locale de cotonnades double donc entre 1914 et 1916 ! La stabilisation puis la fin de la guerre amènent le retour des produits manufacturés britanniques, mais ils ont perdu définitivement des parts de marché. Après 1925, les cotonnades autochtones reprennent leur marche en avant, et la crise même ne brise pas l'élan : au total, la production quadruple entre 1914 et 1939.
[...] Les colonies japonaises : extraversion, intégration, poids de la conjoncture
La tâche initiale des administrateurs coloniaux fut d'assurer l'indispensable autosuffisance financière des possessions d'une si pauvre métropole. Comme au début de l'ère Meiji, la mise à contribution de l'agriculture parut s'imposer. Taiwan, à coup d'aides sélectives, d'incitations, d'aménagement des infrastructures, devint dès 1910 un grand producteur de sucre, puis vers 1920 de riz. Pour des raisons climatiques, ce dernier seul fut développé en Corée, vite premier fournisseur de l'archipel. Cela lui valut de cruels déboires, compte tenu des va-et-vient de Tokyo entre une politique d'importation favorable aux consommateurs métropolitains et un protectionnisme répondant aux attentes de ses paysans. (...)
[...] Elle ne lui coûte rien : le Trésor indien règle jusqu'au transport des troupes britanniques venant occuper le pays. Pour payer les lourdes redevances exigées par Londres, la colonie a un commerce structurellement excédentaire, en particulier avec l'Allemagne, les Etats- Unis et surtout la Chine : elle contribue à compenser le déficit tout aussi structurel de la balance commerciale britannique. Un "circuit triangulaire" particulièrement important se met en place avec l'autre pays-continent de l'Asie : l'Inde lui vend son opium, puis son coton, ce qui permet aux négociants britanniques d'acheter thé, soie, et porcelaine en Chine; ils compensent avec la vente de leurs cotonnades dans leur colonie. [...]
[...] Tout se passe comme si la puissance colonisatrice se trouvait économiquement évincée (on le reverra dans l'industrie), avant même d'être contrainte d'accorder l'indépendance. Une raison en est l'accord en 1919 d'une certaine autonomie douanière à la colonie. En sortira un protectionnisme limité, en faveur en particulier de l'acier indien (Steel Protection Bill, 1924) et des cotonnades - les importations sont soumises au tarif en 1930. Pourtant le Royaume-Uni reste favorisé par rapport à ses concurrents: à partir de 1932, le principe de la "préférence impériale" au sein de l'empire britannique lui assure un tarif préférentiel pour exporter vers l'Inde. [...]
[...] Pour des raisons climatiques, ce dernier seul fut développé en Corée, vite premier fournisseur de l'archipel. Cela lui valut de cruels déboires, compte tenu des va-et-vient de Tokyo entre une politique d'importation favorable aux consommateurs métropolitains et un protectionnisme répondant aux attentes de ses paysans. Jusqu'aux alentours de 1930, l'exploitation agro-alimentaire et la mise en dépendance commerciale complète (il s'agit d'assurer des marchés captifs aux industries métropolitaines) paraissent suffire; pour éviter l'apparition de possibles concurrents, les activités manufacturières sont plutôt découragées. [...]
[...] Il s'agit d'une activité essentielle : l'ASE fournit 70% environ des exportations mondiales de riz, très majoritairement dirigées vers les pays d'Asie déficitaires (Malaisie, Singapour, Chine du Sud, Java au XXe siècle). Le riz est, de loin, le premier poste des ventes de la Birmanie, du Siam, du Cambodge et du Vietnam. Les deltas, relativement peu peuplés au milieu du XIXe siècle, car malsains (paludisme) et ravagés assez récemment par des guerres, offrent un rapport hommes/terres cultivables exceptionnellement favorable, alors que la croissance et l'accessibilité du marché mondial, tout comme les travaux d'assainissement et de désenclavement, créent les conditions de l'essor; ces nouveaux eldorados déterminent de vastes mouvements de population, généralement volontaires. [...]
[...] Elle connaît cependant un certain nombre de modifications progressives: - pénétration de nouvelles plantes cultivées, tout particulièrement le manioc et le maïs venus d'Amérique, particulièrement adoptés aux sols trop pauvres ou trop secs pour le riz, qui demeure la culture primordiale ; - adoption de nouvelles méthodes : engrais chimiques, extension de l'irrigation (qui permet l'obtention d'une seconde récolte de saison sèche), utilisation des nouveaux moyens de transport; - monétarisation progressive, en particulier du fait de la nécessité de payer les nouveaux impôts en numéraire, d'acheter les intrants d'origine industrielle (engrais en particulier) ou de se procurer des biens de consommation vite considérés comme indispensables: tissus et vêtements manufacturés, lampes au kérosène, armes à feu, montres, machines à coudre . ou lait condensé dans des pays qui pratiquent peu l'élevage : les boîtes vides de ce dernier constituent vers 1900 l'unité de mesure du riz sur les marchés birmans. II) La riziculture deltaïque : la colonisation comme outil d'intégration régionale ? À mi-chemin entre l'agriculture de subsistance et la grande plantation capitaliste, on trouve les trois grands deltas rizicoles du continent : Irrawaddy (Birmanie), Chao Phraya (Siam, resté indépendant), Mékong (Cochinchine et secondairement Cambodge). [...]
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