Les campagnes et les révolutions de 1848

Thèmes abordés

Campagnes de 1848, révolutions de 1848, politisation des campagnes, Révolution française, revendications sociales, roi Léopold II, monde rural, route de Châteauroux, suffrage universel masculin, droits fondamentaux, France, Allemagne, Italie

Résumé du document

Les révolutions de 1848 en Europe présentent un triple caractère. Les révolutions de 1848 sont d'abord des révolutions nationales, partout où l'unité n'est pas faite : dans l'espace germanique, dans la péninsule italienne. Les droits des nationalités ne doivent pas être confondus avec le nationalisme, qui en est l'exacerbation. L'aspiration à former une nation possède une forte charge révolutionnaire : elle implique la destruction des anciens États absolutistes et entraîne avec elle une aspiration à des institutions représentatives et, plus ou moins nettement, à un renouvellement de la société dans un sens libéral, démocratique ou même socialiste.

Extraits

[...] Ce processus de politisation à droite des campagnes, beaucoup moins connu et étudié que son vis-à- vis, mérite toute attention : il a conduit les conservateurs à la victoire en mai 1849. Il découle, comme l'a montré Maurice Agulhon, d'une construction de type « vertical », inégalitaire, voire hiérarchique, et généralement informel qui s'appuie avec beaucoup d'efficacité sur les réseaux de clientèles et de protections des anciens notables, sur leur capital économique, social et culturel et sur tout ce qui ressort de ce mécanisme encore essentiel dans les comportements ruraux qu'on appelle « l'influence ». [...]

[...] Il constitue également une catégorie sociale, aux contours flous : le paysan, le bourgeois, l'ouvrier Il constitue enfin une catégorie nationale et devient le fondement de l'identité collective. À l'époque même où l'on invente le « social », la notion de peuple conduit à dépasser l'horizon étroit des institutions parlementaires et du premier libéralisme (le citoyen propriétaire et le suffrage censitaire) ; il ouvre à une mystique politique : Vox populi vox Dei, dont découlera directement en France la proclamation du suffrage universel. Il confère au monde rural et aux masses paysannes une place fondamentale dans la construction de la nation. [...]

[...] Elle opère sur trois plans : médiation, légalisation, nationalisation. - La médiation des conflits passe par des instances anciennes et nouvelles : le recours au notable demeure fondamental dans la société rurale (châtelains de l'Ouest français, noblesse du Piémont, Junkers prussiens), nourrissant les systèmes de clientèles et de protection ; il est traditionnellement secondé par le clergé (curés, pasteurs ; couvents en Italie du Sud). Mais on voit désormais se renforcer d'autres institutions de recours : l'autorité administrative, grande ou petite ; l'autorité judiciaire (juges de paix) ; les représentants élus (députés censitaires, représentants des localités). [...]

[...] Sur les 26 000 inculpés des commissions mixtes, on comptera 5400 cultivateurs et 1850 journaliers ; mais le monde rural est davantage encore représenté parmi les insurgés des Basses Alpes (48 du Var (43 et du Vaucluse (40 La querelle des interprétations est immédiate : les insurgés expriment une revendication légaliste, au nom de l'article 68 de la constitution (« le président est déchu ; les citoyens sont tenus de lui refuser obéissance ») et réclament du droit ; on les condamne pour « jacquerie ». La politisation des campagnes est arrivée à mi-chemin de son histoire. [...]

[...] Les élections législatives du 13 mai 1849 vérifient toute la justesse de ces analyses. Globalement, le résultat de ces secondes élections législatives au suffrage universel, qui se déroulent dans un climat infiniment moins euphorique que celles du 23 avril 1848, est marqué par la victoire des conservateurs réunis au sein du « Parti de l'Ordre » (500 députés), l'écrasement des républicains modérés (50 députés) et la percée significative des « démoc-socs » ou les républicains avancés, qui se font encore nommer « montagnards » (200 députés). [...]