Le boulangisme comme première synthèse nationale socialiste

Thèmes abordés

Boulangisme, synthèse nationale socialiste, monarchie de Juillet, nationalisme allemand, Jules Ferry, Second Empire, Révolution française, Georges Boulanger, royalistes, Alfred Naquet, socialisme révolutionnaire, POF Parti Ouvrier Français, antisémitisme

Résumé du document

L'humiliation née de 1870 et la crise économique sont deux des principaux facteurs. Après la défaite du Second Empire, la France amputée de l'Alsace et de la Lorraine rêve de sa revanche et commence de construire ou de structurer un fort courant patriotique ou "nationaliste", calqué en partie sur le nationalisme allemand, auquel on attribue la victoire. Ce sentiment est pour l'heure asocial à la fierté républicaine propre à la France : dans tous les esprits, la France républicaine se doit d'être celle des soldats de 1793, sauvant l'est de la France de la menace autrichienne et prussienne.

Extraits

[...] Il en conclut que la République a fait faillite . Dans un second livre publié en 1887, L'Anarchie bourgeoise, il fustige l'intrigue et l'impuissance parlementaire, parlant de la curée des portefeuilles ; il accuse ce qu'il nomme le parlementarisme bourgeois ou la bourgeoisie parlementaire , cette classe privilégiée qui a confisqué le pouvoir aux dépens de la nation. L'alliance objective avec une partie du socialisme révolutionnaire Le socialisme qui refuse de se rallier à la Troisième République se compose alors de deux principales branches. [...]

[...] Pour Rochefort, par exemple, Boulanger est l'homme du redressement de la France à l'égard de l'Allemagne : il est la solution de rechange à la politique coloniale de Ferry qu'on accuse de vouloir envoyer l'armée loin de la frontière de l'Est (c'est sur cette politique coloniale que le ministère Ferry est tombé). La République opportuniste est taxée de capitulation et de trahison face à l'Allemagne. Il est difficile pourtant de faire la part entre chauvinisme patriotique et nationalisme tel que la notion se structurera en politique juste avant 1900. Dans le milieu intellectuel, Taine et Renan ont certainement préparé le terrain : mais la diffusion à grande échelle via le boulangisme est l'affaire d'un second mouvement, acquis à Boulanger : la Ligue des patriotes. [...]

[...] Or une grande majorité des blanquistes - excepté le leader Édouard Vaillant - vont rallier la cause boulangiste. Quant à l'autre branche du socialisme révolutionnaire, elle va laisser agir le boulangisme, au moins jusqu'en 1889, en refusant de s'allier à la République pour combattre cette menace. * Parmi les blanquistes qui épousent immédiatement la cause boulangiste, on trouve un personnage très influent et populaire : Henri Rochefort. Né en 1831, c'est un spécialiste des duels et des condamnations sous le Second Empire. [...]

[...] Il y a naturellement des variétés d'hommes, comme des variétés de taureaux et de chevaux, les unes braves et intelligentes, les autres timides et bornées, les unes capables de conceptions et de créations supérieures, les autres réduites aux idées et aux inventions rudimentaires .   L'homme est donc conditionné à vivre de naissance dans une société inégalitaire, inégalité qui ne tient pas à des privilèges, mais à un déterminisme d'ordre biologique. La raison est inutile, la liberté est illusoire et l'optimisme inutile : il ne saurait être question de progrès puisque les peuples se continuent sans cesse de façon inégalitaire. [...]

[...] L'adjonction de l'élément nationaliste Le boulangisme à lui seul n'a pas donné naissance à ce que Barrès qualifiera de nationalisme. Les esprits sont depuis une dizaine d'années préparés à recevoir ces idées qui ont déjà été cultivées dans le sillon de la défaite de 1870. Deux penseurs influents, Ernest Renan (1823-1892) et Hippolyte Taine (1828-1898), ont préparé le terrain. Tous les deux vont développer l'idée que la défaite de la France contre l'Allemagne serait due précisément à l'héritage intellectuel et politique de la Révolution française : du même coup ils favorisent l'éclosion d'idées inverses et contraires à l'héritage démo-libéral de la Révolution. [...]