Au XVIIIe siècle, l'itinéraire des familles est bien balisé grâce aux sources massives conservées. La littérature, notamment, fait apparaître la vie familiale et sa diversité. L'amour entre conjoints, entre parents et enfants ne naît pas au XVIIIe, il change de manière, de sens, d'expression. Les transformations se jouent d'abord dans les élites.
Le XVIIIe siècle voit le renforcement du pouvoir paternel, à la romaine, faisant de lui le pater familias. En retour, il doit nourrir, élever, éduquer et transmettre son patrimoine. La vie de famille est réglée à la fois par la raison et l'utilité, l'amour et l'affectif. Le poids de la coutume, du contrat est lourd : on unit des familles et des biens. Les transgressions sont sanctionnées par les coutumes. Ainsi l'autorité des pères et des maris s'impose complètement.
[...] Comment s'organise la vie familiale en milieu rural en France au XVIIIe siècle ? Dans une première partie, nous analyserons les cadres de la vie familiale et dans une seconde partie, nous étudierons les temps forts de la vie familiale. Il existe cinq types de familles. Le premier type est formé par les ménages solitaires qui sont composés des célibataires, veufs et veuves sans enfant. Les ménages qui réunissent plusieurs personnes, parfois parentes par le sang ou par alliance, mais où il n'y a pas de couple marié forment le deuxième type. [...]
[...] Il le leur doit, selon les moralistes des XVII et XVIIIes siècles. (le père) commençait par la Genèse et lisait avec onction trois ou quatre chapitres, selon leur longueur, les accompagnant de quelques observations courtes et peu fréquentes, mais qu'il jugeait absolument nécessaires» (l.36/37/38). Cette pratique est courante au XVIIIe siècle dans les campagnes et n'a donc rien d'exceptionnel. En été où les journées de travail sont plus longues, la veillée est plus courte qu'en hiver, elle est composée du seul enseignement religieux et ] puis on allait se coucher en silence ; car après la prière du soir, les ris et les conversations à vois haute étaient sévèrement interdits [ (l.42/43/44). [...]
[...] Ainsi, dans l'Europe entière, la taille moyenne des familles est de quatre à six personnes par foyer. On est loin du mythe de l'enfant par an. La famille d'Edme accueille plus de personnes que le strict noyau familial. Edme est à la tête d'une exploitation qui engage des manouvriers à plein temps ainsi que des servantes et tous vivent avec leur maître. Les manouvriers et les serviteurs font partie intégrante de la famille. Edme est donc [ ] un patriarche vénérable, à la tête d'une maisonnée nombreuse ; car on était ordinairement vingt-deux à table, y compris les garçons de charrue et les vignerons [ ] et deux servantes [ ] (l.2/3/4). [...]
[...] La vie de mon père est une précieuse source de documentation sur la vie familiale, à la campagne, au XVIIIe siècle. Cet extrait permet de mieux appréhender les codes qui réglementent la vie familiale dans nombre de campagnes françaises, malgré quelques variantes régionales. La hiérarchisation entre les membres de la famille est fréquente, la subordination de la femme est de règle. La religion prédominante définit beaucoup d'aspects de la vie quotidienne. Pourtant, il faut l'analyser avec précaution, car Nicolas Edme Restif de la Bretonne a parfois trop idéalisé la vie à la campagne pour mieux dénoncer la vie citadine. [...]
[...] Ainsi s'explique la réaction de Restif de la Bretonne : Tout le monde mangeait le même pain ; la distinction odieuse du pain blanc et du pain bis n'avait pas lieu dans cette maison (l.13/14). Cet usage, influencé par la réforme catholique, a sans doute débuté par une séparation entre parents et enfants, entre les filles et les garçons pour la couche. Pourtant, le cadre familial proposé par Nicolas Edme Restif dans la vie de mon père en 1778 est obsolète, car pour lui, homme de la campagne, les serviteurs sont considérés comme des enfants du maître. [...]
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