« On ne peut régner innocemment », c'est par une de ces phrases lapidaires et rhétoriques, que le dernier roi de France, Louis XVI vit sa chute accélérée. Cette phrase fut celle de Saint-Just, politicien de 25 ans membre de la Convention qui eut un rôle majeur en une période historique aussi célèbre qu'agitée. Et Manon Roland de s'écrier, sous la guillotine «O Liberté, que de crimes on commet en ton nom ! » donnant toute la mesure d'une France idéologique et théâtralisée.
[...] C'est pourquoi, sans doute, il lui apparut prioritaire de leur venir en aide. Outre cet objectif politique de terrain, on peut recenser un ensemble de vues politiques ou d'idées et de valeurs, défendues, notamment dans ces arrêtés. Nous retrouvons une hostilité vive envers les factions qui représentent ici un ordre à éliminer. En effet, la peur de Saint-Just étant que « ces factions aient jeté de profondes racines parmi (le peuple). » car, selon lui, « toute faction est un attentat à la souveraineté ».9b Soupçonnées d'accointances avec les « fédéralistes », les différents membres d'une institution autorisée peuvent se voir arrêtés immédiatement et remplacées par des « comités provisoires ». [...]
[...] En marge de ces prélèvements, se trouve également la mention de nécessités immédiates comme les nombreuses « réquisitions » ici répertoriées de manteaux et de souliers afin d'habiller l'armée et dictés par le besoin du moment. Or, le nombre d'arrêtés pris sur une période relativement courte s'étendant d'octobre à décembre seulement, apparaît hautement signifiant. En vingt jours, les deux représentants du peuple avaient pris près de trois cents arrêtés. Ils se succèdent à une vitesse effrénée, parfois presque d'un par jour témoignant, par là, d'une ardeur et d'une énergie considérable dans la mission donnée. [...]
[...] Les termes « épuration » et « régénération » ont parfois été employés par les historiens, au vu des faits et actions du Comité de surveillance supervisé et choisi par les représentants du peuple : il s'agit donc d'une ingérence voire d'une prise de contrôle totale par le pouvoir révolutionnaire, comme il a été établi un peu partout, par les quelques soixante représentants du peuple, alors envoyés en mission sur l'ensemble du territoire français. Par ailleurs, les représentants du peuple en mission s'arrogent le droit de réquisitionner tous les hommes en armes utiles au bon déroulement des visites domiciliaires prévues dans toute la ville. [...]
[...] Cette théorie offre une relecture des différentes actions menées en Alsace sur la période. En effet, à la faveur d'une lutte idéologique interne, Saint Just s'est probablement efforcé de redoubler d'efforts pour éradiquer tout lien politique, administratif ou culturel avec son voisin germain, considéré comme ennemi de la République. Si le sort de l'Alsace en 1793 a requis toute l'attention, l'énergie et la prévalence de mesures spécifiques dictées par Saint Just et ses compagnons révolutionnaires pour la rattacher fermement à la Patrie, il convient d'observer que cette mission avait pour but ultime la diffusion de l'idéologie révolutionnaire jusqu'à ces zones frontalières fragiles, possiblement rendues perméables aux tentations germaniques. [...]
[...] Le collectif remplace le pouvoir individuel, comme la nation, le Roi. Or, si ces comités sont présentées comme provisoires, elles vont pourtant durablement s'installer comme bouleversement intrinsèque des institutions d'Ancien Régime. Mais ce document révèle surtout toute l'orientation politique de ces révolutionnaires, ces Montagnards, pour qui, la noblesse est le « maux le plus vif de cette patrie ». On ne s'étonnera pas, non plus, de les voir aux premières places des contributions financières obligatoires qu'il s'agisse de travaux publics, de soutien direct à l'armée ou bien à la cause Cela évoque directement les idées socialistes de Saint-Just pour qui «il ne faut ni riches ni pauvres », extrait des Institutions Républicaines. [...]
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