Au XIXe siècle, une jeune fille « comme il faut » ne doit pas avoir conscience de son corps. Elle doit rester jusqu'au mariage dans l'ignorance totale de tout ce qui concerne la sexualité et n'est pas préparée à son futur « devoir conjugal ». Mais cette ignorance n'est pas sans poser problème et les jeunes filles se trouvent souvent désemparées face à la sexualité dans leur vie de femmes mariées. Avant le mariage, l'ignorance est aussi dangereuse pour celles qui, côtoyant les hommes, sont exposées à des risques de maladies vénériennes et de grossesses non désirées. Dans l'entre-deux-guerres, la France est confrontée à un problème de baisse notable du taux de natalité et à un vieillissement relatif de la population qui préoccupe les milieux politiques de tous bords. Des politiques natalistes sont alors mises en place, faisant des femmes l'enjeu principal de l'avenir et de la pureté de la nation.
Par ailleurs, dès le début du XXe siècle, le terme d'éducation sexuelle, employé pour la première fois par Madeleine Pelletier, est fréquemment utilisé et cette éducation est prônée par les milieux républicains et laïcs qui voient en lui un moyen de protéger la femme et d'enrayer le fléau des maladies vénériennes, en particulier de la syphilis, considérée comme l'un des maux les plus préoccupants de l'époque. C'est dans l'entre-deux guerre que l'opinion catholique se rallie à la politique d'incitation à la natalité. Plusieurs projets sont ainsi mis en place, visant à la fois à renseigner les jeunes filles sur le fonctionnement de leur corps et à favoriser la maternité. Le Comité d'éducation féminine de la Société Française de prophylaxie sanitaire et morale, qui dépend du tout nouveau ministère de l'hygiène, est une de ces organisations qui se développent dans l'entre-deux-guerres et qui ont principalement pour but de protéger les jeunes filles des risques sexuels auxquels elles sont exposées et qu'elles ignorent. Il est fondé en 1924 et atteint rapidement une grande ampleur. Il répond en effet à un besoin important de la population et des jeunes filles qui se montrent rassurées d'être informées du péril vénérien, mais elles sont également choquées d'avoir été laissées si longtemps dans l'ignorance.
[...] Le clergé se montre en effet de moins en moins réfractaire à une éducation sexuelle des jeunes filles et Mgr Verdier publie même un ouvrage intitulé L'Église et l'éducation sexuelle. Selon les milieux catholiques, l'éducation sexuelle doit rester confinée dans le cadre de la famille. C'est la mère et non l'institutrice qui doit apprendre à l'enfant puis à la jeune fille, le fonctionnement de son corps et l'acte précédant nécessairement la maternité. Dans les milieux laïcs et féministes, les revendications sont nettement plus importantes et tournées vers le domaine public. [...]
[...] Il est probable qu'une telle information aurait convaincu la femme de l'infidélité de son mari, ce qui aurait certainement eu pour conséquence de faire flancher l'unité familiale. Or, la famille est l'élément fondamental de la société, dont il faut à tout prix conserver la cohésion. On préfère donc privilégier une illusoire unité familiale au détriment du bien des individus les plus faibles qui la composent : la femme et les futurs enfants. Dans l'entre-deux- guerres se développe une peur sans cesse grandissante des maladies vénériennes et en particulier de la syphilis, accusée de beaucoup des maux de la société. [...]
[...] Comment ne pas y déceler l'amorce de ce qu'appelait et attendait dans la première partie du XIXe siècle Maria Montessori, scientifique italienne qui écrit : après avoir avancé à la conquête du travail social, la femme nouvelle fera un pas de plus, elle ira à la conquête de son travail biologique, qui est la véritable fin du féminisme, à la conquête de ses enfants Bibliograhie Histoire des femmes en Occident IV. Le XIXe siècle Sous la direction de Geneviève Fraisse et de Michelle Perrot Histoire des femmes en France XIXe XXe siècles Michelle Zancarini-Fournel Histoire du corps De la Révolution à la Grande Guerre sous la direction d'Alain Corbin, Jean-Jacques Courtine et Georges Vigarello. [...]
[...] Mais l'ignorance en matière sexuelle peut être problématique pour la jeune fille et, comme l'indique Germaine Montreuil- Strauss plus que le garçon peut être, la jeune fille a besoin d'éclaircissement sur sa vie génitale, sur la responsabilité de ses actes, les répercussions possibles de ses fautes. En effet, pour elle, la moindre défaillance peut entraîner des conséquences individuelles et sociales très graves, puisqu'elle peut la rendre mère. Le problème des filles-mères, comme elles sont appelées, est considéré comme majeur au XIXe siècle et, malgré l'évolution des mentalités, elles sont souvent mises au ban de la société. Il peut arriver que des jeunes filles se retrouvent mères sans même comprendre comment. [...]
[...] Présentation du Comité d'éducation féminine de la Société Française de prophylaxie sanitaire et morale Au XIXe siècle, une jeune fille comme il faut ne doit pas avoir conscience de son corps. Elle doit rester jusqu'au mariage dans l'ignorance totale de tout ce qui concerne la sexualité et n'est pas préparée à son futur devoir conjugal Pour donner un exemple de l'état de pureté dans lequel doit rester la jeune fille, on peut citer la pratique de certaines familles qui leurs défendait de se regarder nues dans un miroir. [...]
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