Avant 1918, on désigne sous le nom de Syrie une vaste région naturelle couvrant environ 300 000 km², qui comporte la Syrie actuelle, le Liban, la Palestine et la Transjordanie ; cette "Grande Syrie" éclate à la suite de la signature du traité de Sèvres, le 10 août 1920. Quarante années plus tard, au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, marquant la fin du mandat français sur la Syrie, le rêve porté par de nombreux nationalistes arabes d'un Grand Royaume autour de la Syrie est de nouveau à l'ordre du jour.
Le projet de "Grande Syrie" revendiqué par l'Emir Abdallah de Transjordanie en est un exemple parfait. Abdallah Ibn Hussein, né en 1882 et mort en 1951, fut Emir de Tranjordanie de 1921 à 1946, puis roi de Jordanie de 1946 jusqu'à sa mort. Il est le fils de Hussein Ibn Ali, chérif de La Mecque, et roi du Hedjaz, qui fut l'un des promoteurs de la révolte arabe de 1916 contre les Turcs, ayant pour but l'établissement d'un Grand Royaume arabe. Descendant légitime de la dynastie des Hachemi, Abdallah, n'ayant jamais renoncé au projet promis par Londres à sa famille, profite de la guerre de 39-45 pour le relancer en adressant, en 1943, la présente note au gouvernement britannique.
[...] Elle joue même un rôle crucial dans la bataille d'Irak en 1941. C'est dans ce contexte qu'Abdallah décide de relancer le projet Hachémite, encouragé par l'occupation britannique du Liban et de la Syrie, considérée dans ce texte comme un resserrement de l'amitié traditionnelle arabo-britannique (ligne qui avait pu être à l'œuvre avec l'intervention de Lawrence d'Arabie pendant la Première Guerre mondiale. De plus, le 28 septembre 1941, Cartroux proclama l'indépendance de la Syrie par cette phrase : l'ère est ouverte où la Syrie, indépendante et souveraine régira elle-même ses destinés Considérant toutes ces nouvelles données, l'Emir Abdallah considéra qu'il était temps de construire une nouvelle Syrie, et ce avec l'aide des Britanniques, de plus en plus à l'écoute des aspirations du peuple syrien. [...]
[...] Au cours de cette conférence de San Remo, le conseil suprême allié décida d'offrir à la France le mandat sur la Syrie et le Liban ; à la Grande-Bretagne le mandat sur l'Iraq et la Palestine. Ces décisions qui violaient les principes proclamés en 1918, les promesses faites aux Arabes (ligne et qui allaient contre les vœux des intéressés, provoquèrent un grand sentiment d'horreur à Damas. Il s'agit bien d'une volonté de continuité de la part d'Abdallah, qui met à mal les décisions prises en 1920 contre l'espoir des Hachémites dont il se réclame descendants légitimes. [...]
[...] Mettant en exergue l'incapacité française de répondre aux aspirations indépendantistes des Syriens et la nouvelle donne des relations diplomatiques des populations arabes avec les Britanniques, Abdallah se sert de multiples références historiques afin de mettre en place une grande monarchie sous son seul règne. Au fil de la lecture de ces projets, l'interlocuteur se rend rapidement compte qu'il s'agit de deux projets exposés par un homme, descendant de la dynastie des Hachémites et dont la volonté est de la revendiquer grâce à l'organisation d'une Grande Syrie sous son règne. Pour Abdallah il s'agit bien d'un projet inscrit dans la continuité des exigences de sa famille. Il désire établir l'indépendance de la Syrie dans ses frontières naturelles (ligne 20). [...]
[...] Ce projet relativement révisionniste se voit remplacé par une mise en œuvre d'un panarabisme moderne lors de la signature de la charte constitutive de la Ligue arabe, le 22 mars 1945. On peut se demander comment par ce texte, Abdallah utilise sa légitimité dynastique et religieuse ainsi que l'échec français en Syrie afin de promouvoir son projet de Grande Syrie supplanté par la mise en place de la Ligue arabe? Il semble tout d'abord qu'Abdallah tient à se présenter en tant que porte- parole du peuple syrien et de ses aspirations, au sortir d'un mandat français opposé à ces dernières. [...]
[...] Les consultations entre Nahas et le représentant de la Transjordanie, Tawfiq Abul Huda, débutèrent le 28 août 1943, la position de Nahas est contraire à celle d'Abdallah, la Syrie et le Liban doivent jouir d'une vraie indépendance avant de commencer une forme de coopération des pays arabes. Malgré le fait que leur indépendance fut déjà reconnue par plusieurs Etats, les deux pays demeurent sujets à une domination française. Ibn Saoud, représentant de l'Arabie Saoudite pense qu'il est d'abord nécessaire d'avoir la victoire des alliés avant de contempler l'idée d'une possible union arabe, il est en faveur d'une coopération culturelle et économique, mais une unité politique engendrerait, selon lui, des difficultés avec les alliés. [...]
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