Le modèle familial européen, condition féminine et violence conjugale dans la société méridionale française au XVIIIe siècle - Nicole Castan (1986)

Thèmes abordés

Nicole Castan, modèle familial européen, condition féminine, violences conjugales, société méridionale française, émancipation des femmes, dot, éducation des filles, indépendance, chef de famille, statut de mère, place de la femme, puissance maternelle

Résumé du document

Comme le titre de l'article nous l'indique, nous parlerons de la condition féminine et de la violence conjugale en zone méridionale française au XVIIIe siècle. La source judiciaire est une richesse considérable pour la recherche historique concernant la considération féminine des classes modestes notamment. Après l'année 1750, dans le Midi, l'historienne souligne qu'il y a une amélioration des convenances de la dot et des substitutions de la veuve, de même qu'au XVIIIe siècle l'émancipation féminine est présente avec le progrès de l'urbanisation, de la mobilité et de l'éducation : on acceptait que certaines femmes puissent développer leur intelligence dans la mesure où ces exceptions ne remettaient pas en cause l'ordre défini. Pour revenir sur la dot, elle est une « subsistance » et une « autonomie » pour la femme riche alors qu'elle n'est que « symbole » et « dépendance » pour la femme pauvre. Ces dernières, toutes catégories confondues, sont exclues de l'honneur. Dans le milieu populaire, classe étudiée dans l'article, il y a un droit de correction (pouvant aller jusqu'à la mort) et aucune plainte n'est prise au sérieux.

Extraits

[...] De plus, le mari a le droit de correction comme nous l'avons vu précédemment : il peut la frapper publiquement, d'où l'expression du Midi : « l'homme est indigne d'être homme qui de la femme n'est point le maître », de même que l'adage provençal soulignant le fait que « les femmes ne sont pas des gens ». Quant à la femme, « elle ne sait pas se battre, elle injure seulement, mords, tire les cheveux . ». Jugée irresponsable tel une brute, le mari se contente de la corriger et non de raisonner (cf le charpentier de Quercy). [...]

[...] Le modèle familial européen, condition féminine et violence conjugale dans la société méridionale française au XVIIIe siècle - Nicole Castan (1986) Nicole Castan est professeure d'histoire moderne à l'Université de Toulouse-II. Elle est également historienne de la fonction de justice royale dans les Pays de Langue d'Oc au XVIIIe siècle. Elle a écrit cinq ouvrages dont Histoire des galères, bagnes et prisons en France de l'Ancien Régime en 2002, Justice et répression en Languedoc à l'époque des lumières en 1992, Vivre ensemble: ordre et désordre en Languedoc au XVIIIe siècle en 1981, Crime et justice en Languedoc en 1978, et enfin Criminalité et litiges en Languedoc de 1690 à 1730 en 1973. [...]

[...] Cependant, il arrive que l'homme aille trop loin dans sa punition comme le cas de Madeleine Cazeaux qui fut tuée sour les coups de son mari Raymond Noguez. Nicole Castan souligne la brutalité des hommes du peuple qui n'est pas un caractère rare « et exercée à l'approbation générale ». À l'inverse, chez les bourgeois, une concubine peut être installer dans le foyer en guise de correction humiliante, avec en plus la remise des clés à la rivale. On retrouve ce genre d'humiliation chez le paysans riche. [...]

[...] Ensuite, le statut de la mère est assez important. En effet, cheffe de famille, ayant la responsabilité de la « patria potestas » c'est-à-dire la puissance paternelle , elle est une figure fréquente dans le monde de l'artisanat, du commerce, dans la vie de la petite bourgeoisie, car elle est tout simplement un pilier, le bras droit du mari qui ne peut effectivement pas tout gérer seul. Mais ce sont les corporations de métiers qui, au début, après leur avoir ouverts les portes, les on renvoyer au domicile. [...]

[...] Les femmes se virent exclues des mines et des chantiers où elles se rendaient pourtant utiles dans des tâches subalternes. On assure juridiquement à la femme la sauvegarde et l'autorité, de même que son pouvoir d'initiative et de décision repose sur l'exercice du droit de propriété. Dans la classe défavorisée, la femme occupe « difficilement une domination ou une égalité ». La question que se pose alors Nicole Castan c'est « est-il possible de dégager les contours et les réalités du rôle féminin dans la société méridionale ? [...]