Si l'idée d'une « Algérie française » émergea dès le XVIIIe s parmi les intellectuels français, elle fut, cependant, et dans les faits, bien plus compliquée à mettre en œuvre et ce, malgré la colonisation du Maghreb amorcée en 1830, transformant dès lors l'opération de conquête en véritable « tracasserie » politique au long cours.
[...] En effet, pour Foucault, calqué sur la rébellion Turque « Si les musulmans de notre empire colonial du Nord de l'Afrique ne se convertissent pas, il se produira un mouvement nationaliste analogue à celui de la Turquie : une élite intellectuelle se formera dans les grandes villes » sonnant comme un avertissement à l'égard de l'intelligentsia algérienne d'un danger politique imminent dont il convient de circonscrire les commencements par une action de conversion massive, totale et immédiate. Par ailleurs, la méconnaissance de l'Histoire algérienne montre ici ses limites en faisant craindre que « Le sentiment national ou barbaresque s'exalte( . ) dans l'élite instruite ». [...]
[...] Le laïc avertit enfin sur la nécessité d'abandonner toute violence dans l'effort de francisation de l'Algérie prenant appui sur la sagesse biblique mais également sur les affiliations culturelles nationales à l'égard des « étrangers » donnant la préférence aux « doux » considérés comme « amis » pour lesquels on peut « se battre avec un grand courage par sentiment d'honneur, caractère guerrier ou esprit de corps ». Même si démontrés par l'Histoire toute proche, la lettre de Foucault prouve que ces sentiments ne suffisent pourtant pas à assurer la France de l'attachement acquis de l'Algérie française tant la grille de lecture est complexe dans une Algérie historiquement cosmopolite autant que blessée par une colonisation brutale autant qu'irréparable. [...]
[...] Ceci est le pendant à la perception française politique mais aussi religieuse du sujet faisant notamment valoir la foi chrétienne sous l'angle du prosélytisme, seul vecteur de bonté, affection, soutien et amitié. Or, la lettre de Foucault également émaillée de mots comme «ils chasseront », « influencer » ou « soumettre » trahissent la profonde culpabilité française de l'autorité acquise de force et son illégitimé sur le territoire algérien. C)LES KABYLES : UNE FRANGE DE LA POPULATION PLUS FACILE A CONVERTIR Enfin, l'esprit « français » apparaissant au travers des mots du laïc, il est intéressant de remarquer combien les préjugés nationaux prévalent sur toute autre analyse car si Foucault confie « Je me réjouis de voir beaucoup de Kabyles travailler en France; cela semble peu dangereux pour notre race », il relaie parfaitement le préjugé de « races » vécu en France émanant de la distinction historico-culturelle entre sédentaires Kabyles et Arabes nomades. [...]
[...] LA NÉCESSITÉ DE L'ASSIMILATION PAR CONVERSION AU CHRISTIANISME : « LE SEUL MOYEN » DE FAIRE FRANCE EN ALGERIE Si l'idée d'une « Algérie française » émergea dès le XVIIIe s parmi les intellectuels français, elle fut, cependant, et dans les faits, bien plus compliquée à mettre en œuvre et ce, malgré la colonisation du Maghreb amorcée en 1830, transformant dès lors l'opération de conquête en véritable « tracasserie » politique au long cours. A. Faire France dans une Alger cosmopolite. L'une des premières raisons de ces difficultés politiques réside dans la mésestimation de l'ancrage culturel de l'Islam dans la population civile mais également dans sa diversité même. En effet, historiquement et depuis des millénaires, l'Algérie est un territoire de rencontres favorisant les échanges marchands comme les influences politiques. [...]
[...] Car si pour la France, l'idée d'une gouvernance locale s'appuie sur un découpage à la française en trois départements de la géographie et de la culture du pays faisant notamment ressembler Alger à une « grande ville française », cette distinction à la fois arbitraire et maladroite souffre intérieurement des nombreux particularismes et paradoxes algériens. L'un d'entre eux et le plus grand est sans doute la distinction historique entre berbères ou « Kabyles »-qui est le nom donné par les colons à ce peuple montagnard- et arabes. En effet, de multiples affrontements ancestraux ont forgé deux cultures, deux identités différentes parfois opposées qu'il convenait de ne surtout pas amalgamer. [...]
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