La décolonisation inévitable contexte international et aspirations de l'élite moderne au Congo belge, J Van Bilsen, décolonisation, colonisation, Congo
Né en 1913 en Belgique, J. Van Bilsen est docteur en droit de Louvain en 1936 et avocat à Bruxelles. Responsable, après la guerre, de l'agence Belga à Léopoldville, il devient secrétaire du centre Harmel (1948-1950). Continuant à s'intéresser à l'Afrique, il s'exprima dès 1954 quant aux menaces qui pesaient sur les régimes coloniaux et quant à la nécessité d'envisager l'émancipation de la colonie. Après un séjour en Afrique belge, française et anglaise, il publia son plan de trente ans en décembre 1955. selon l'auteur, il devait conduire, en 1985, dans le cadre d'une grande fédération belgo-congolaise, à l'autonomie politique de la colonie après l'introduction des partis politiques et des syndicats. Conseiller de Kasa-Vuku et de l'ABAKO (1959-1960), il fut par la suite secrétaire général du service de coopération au développement (1962) et commissaire royal (1965-1966) dans cette matière.
Le Congo était devenu colonie de la Belgique le 15 novembre 1908. bien qu'il ait continué à être considéré essentiellement comme un territoire d'exploitation, et que des pratiques vexatoires à l'égard de ses populations (travail forcé, portage) aient subsisté de longues années, le gouvernement belge s'était efforcé d'y introduire un esprit nouveau, teinté d'humanisme civilisateur. Mais pour les belges, "civiliser" ne signifiait pas conduire les autochtones vers la capacité de se gouverner eux-mêmes. Le plan de civilisation était donc établi en dehors de toute considération de temps, de toute exigence de l'opinion indigène, de toute interférence extérieure. Il visait à développer l'économie du Congo, mais excluait toute préoccupation politique. Dans un cadre rigoureusement clos, les congolais seraient amenés à évoluer lentement, à améliorer leur niveau de vie par une participation aux avantages économiques que procurait l'exploitation des richesses de leur pays. Satisfait de leur sort matériel, ils ne songeraient pas, croyait-on, à revendiquer avant de longue années l'émancipation politique. Telles furent les bases doctrinales sur lesquelles s'appuya la politique belge du Congo jusqu'au lendemain de la seconde guerre mondiale. Ainsi, alors que l'Afrique française marche à grands pas vers l'indépendance, les dirigeants belges gardent sur l'émancipation congolaise une prudente réserve. Aussi en décembre 1955 lorsque le professeur Van Bilsen propose un plan de trente ans pour l'émancipation politique de l'Afrique belge, c'est dans les milieux européens un mouvement de stupeur indignée.
[...] Les évolués, friands de nouvelles internationales, étaient trop loin d'ignorer ce qui se passait, conscients du mouvement anticolonialiste qui prenait forme à l'ONU. "L'indépendance du Soudan, de la Tunisie, du Maroc, du Ghana, de la Guinée et tous les autres développements politiques en Afrique captivent maintenant de plus en plus d'attention avide des élites" (l.61/64) : ces évolués suivaient ce processus d'émancipation qui, après l'Asie, touchait l'Afrique : la Côte d'Or, futur Ghana, disposait déjà de son autonomie interne depuis 1951; la Tunisie, le Maroc, le Soudan avaient acquis leur indépendance au cours de l'année, les souvenirs de la conférence de Bandung qui avait eu lieu l'année précédente étaient encore vivants dans les mémoires. [...]
[...] L'ambiguïté de cette déclaration résidait dans le fait qu'elle pouvait s'appliquer à toutes les populations assujetties et pas uniquement aux peuples d'Europe occupés par les puissances de l'axe. Churchill se défendit à plusieurs reprises d'avoir pensé aux colonies, mais eux, ils avaient entendu cette déclaration. La charte de San Francisco (en mai 1945) élabore le régime de tutelle internationale et précise, dans le chapitre XI, aux membres de l'ONU qui ont la responsabilité de l'administrateur (les anciennes "métropoles") d'accepter de "développer les capacités des territoires non autonomes (les colonies) de s'administrer eux- mêmes, de tenir compte de leurs aspirations politiques et de les aider dans le développement progressif de leurs libres institutions politiques". [...]
[...] Mais la guerre accéléra le processus de "mondialisation" qui, principalement économique jusqu'alors, affecta de plus en plus l'évolution politique des différentes parties du monde. L'Afrique noire se trouva directement affectée par le climat nouveau qui présidait à la restructuration du monde, dans un sens qui était favorable aux mouvements de libération des peuples colonisés : guerre froide, déclin de l'Europe et remise en cause du principe même de la colonisation, émancipation des colonies, renaissance du nationalisme arabe et émergence du Tiers-monde. [...]
[...] il revient sur le contexte international, surtout dominé par des mouvements de décolonisation et sur les aspirations de l'élite du Congo belge. Il s'agira donc de voir comment dans un contexte international dense, la Belgique perçoit la suite de la colonisation du Congo, et dans quoi s'inscrit-elle dans un contexte de prise de conscience au Congo. Pour cela, nous verrons que dans le monde, le temps est à la décolonisation, puis nous examinerons la colonisation du Congo belge et enfin, la crise de cette colonisation. [...]
[...] Van Bilsen n'est partisan ni de l'indépendance, ni d'un Commonwealth, ni d'une politique d'assimilation à la française, pas plus d'une intégration. Sa préférence allait à une "grande fédération Congolaise". Enfin, l'auteur préconisait une africanisation des cadres enseignants, l'introduction de partis politiques et de syndicats sans transposer dans les colonies les structures partisanes belges, et enfin une presse libre. L'année 1985 était choisie comme terminus de l'évolution car elle coïncidait avec le centenaire de la fondation de l'Etat indépendant du Congo. Mais dès 1958, Van Bilsen reconnaissait lui-même que son délai de 30 ans ne correspondait pas à la réalité. [...]
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