Ce document est tiré des Documents diplomatiques français datés du 24 octobre au 31 décembre 1956. C'est une lettre de Nicolas Boulganine adressée le 5 novembre 1956 à Guy Mollet, alors président du Conseil après la victoire du Front républicain aux législatives de janvier 56. Parallèlement, le 8 février 1955, le Soviétique Boulganine succède à Malenkov en devenant président du conseil des ministres, où il y sera remplacé par Khrouchtchev en 1958.
Les années 1953-1956 sont marquées par un relatif « dégel » des relations internationales, encore qu'il faille davantage parler de coexistence forcée que de détente concertée. Par ailleurs, au Moyen-Orient s'entrecroisent des problèmes anciens, comme le rôle impérial de la France et de la Grande-Bretagne, et des problèmes nouveaux, qu'ils soient régionaux comme le conflit israélo-arabe ou qu'ils s'inscrivent dans le conflit Est-Ouest. Ces problèmes culminent dans une crise majeure, celle de Suez, avec de très grandes conséquences, en particulier l'entrée désormais complète et définitive du Moyen-Orient dans la guerre froide.
L'année 1955 marque aussi la mise en place d'une stratégie offensive de l'URSS dans le Tiers-monde. Tandis que la France doit consacrer toutes les énergies au maintien de ses positions dans le Maghreb (elle est engagée dans la guerre d'Algérie depuis 1954), les Britanniques éprouvent de plus en plus de difficultés à garder le contrôle de la région, face à la montée du nationalisme arabe. Le problème le plus important pour eux est celui du canal de Suez, à la fois symbole de leur ancienne puissance impériale et enjeu économique stratégique de première grandeur. Or, le 26 juillet 1956, le colonel Nasser, qui a pris le pouvoir en Egypte deux ans plus tôt et souhaite réaliser autour de son pays l'unité du monde arabe, décide de nationaliser la compagnie du canal, dont les actionnaires sont en majorité français et anglais ; au préalable, il a obtenu auprès des Soviétiques une aide militaire importante. Après la planification secrète d'une intervention militaire contre Nasser, Israël, coalisée avec la France et l'Angleterre, décide d'attaquer l'Egypte le 29 octobre 1956. Les deux grands condamnent l'agression via l'ONU, mais, voyant les opérations se poursuivre, Boulganine adresse le 5 novembre au président du Conseil français Guy Mollet une lettre où l'URSS menace d'intervenir directement dans le conflit au secours de Nasser si le cessez-le-feu n'est pas observé.
Dès lors, dans quelle mesure la crise de Suez consacre-t-elle le déclin des anciennes puissances coloniales dans un ordre international dominé par les deux Grands, où le Moyen-Orient constitue désormais un nouvel enjeu de la Guerre froide ?
[...] Il évoque ainsi les conséquences néfastes de la guerre déclenchée contre l'Egypte sur le maintien de la paix générale lignes 4 et 5. De plus, Nicolas Boulganine prétend œuvrer pour le maintien de la paix et de la collaboration économique et culturelle avec les autres peuples lignes 25-26. On distingue encore les expressions fidèles au maintien de la paix et rétablir la paix respectivement aux paragraphes 9 et 10, instruments utilisés par Boulganine pour se décharger des actions belliqueuses et les attribuer à la France et l'Angleterre. [...]
[...] En effet, il mentionne le non-respect des décisions de l'ONU par les Franco-Britanniques dans le troisième paragraphe, je cite : la majorité écrasante des états membres de l'Organisation des Nations Unies s'est prononcée lors de la session spéciale extraordinaire de l'Assemblée générale pour un arrêt immédiat des hostilités et le retrait des troupes étrangères du territoire de l'Egypte de même aux lignes 34- 35 où il indique que le gouvernement soviétique s'est déjà adressé à l'ONU, ainsi qu'au président des Etats-Unis d'Amérique en proposant d'utiliser avec d'autres membres de l'ONU des forces navales et aériennes pour mettre fin à la guerre Il est au passage assez surprenant de voir les Soviétiques se prévaloir des institutions onusiennes alors qu'ils participent au même moment à la répression sanglante des soulèvements de Budapest, vivement critiquée par l'ONU Bref, la lettre de Boulganine montre que la coalition, qui se réclame pourtant du camp occidental, du camp démocratique au sens de monde libre ne tient pas compte de l'avis émis dans les tribunes de l'Assemblée générale des Nations Unies, bien que Dulles lui aussi condamne l'opération à l'ONU. En effet, l'administration américaine, soutenue par la majorité du Congrès, a pris position publiquement à l'ONU contre l'action engagée par les trois, et immédiatement la popularité des Etats-Unis dans le Tiers-monde s'accroît. De plus, dans la nuit du 6 au 7 novembre 1956, l'ONU organise un cessez-le-feu mais ce n'est pas l'ONU qui dissuade les Franco-Britanniques de se retirer d'Egypte. [...]
[...] Mais le moyen de dissuasion ultime, comme il en est fait état dans la lettre de Boulganine, reste l'arsenal nucléaire de l'URSS. Un ultimatum menace pour rétablir la paix mais surtout destine à affirmer la puissance soviétique Dans une dernière partie, force est de mettre en avant les caractéristiques de l'ultimatum adressé par Boulganine à la France. Nous montrerons dès lors qu'il a pour but de préserver la paix mondiale en jouant sur le potentiel nucléaire soviétique, mais qu'en vérité ce n'est pas le chantage militaire qui a forcé le retrait franco-britannique d'Egypte. [...]
[...] Immédiatement Khrouchtchev persuade le Présidium d'envoyer les fameux messages du 5 novembre menaçant Paris et Londres de frappes nucléaires. Khrouchtchev est persuadé que ce sont ces messages qui ont fait reculer Paris et Londres, ce qui est en réalité une erreur d'appréciation, mais il en tire la conclusion qu'il peut utiliser le bluff nucléaire pour obtenir des avantages sur le plan international et se voir reconnaître un statut de superpuissance comparable à celui des Etats-Unis. Par conséquent, toute la dissuasion militaire soviétique repose sur ce que l'on peut appeler un coup de bluff dans la mesure où Khrouchtchev sait à l'avance qu'une troisième guerre mondiale n'est pas envisageable, et que l'équilibre de la terreur dissuade Américains et Soviétiques de courir le risque d'une apocalypse nucléaire et humaine. [...]
[...] La remise en cause des idéaux socialistes de Guy Mollet Boulganine attaque directement Guy Mollet sur le plan idéologique, comme en témoignent le paragraphe qui souligne les contradictions entre l'affirmation de principes socialistes par Guy Mollet et la politique belliqueuse et impérialiste menée par la France au Moyen-Orient, contre un pays de surcroît beaucoup plus faible que lui. Boulganine interpelle ainsi Guy Mollet sur les idéaux socialistes (ligne 19) dont il se réclame pour mettre en œuvre son action politique, je cite, dont il s'inspire dans son activité (ligne 20). Boulganine se réfère aux principes prônés par Guy Mollet lors de leur récente rencontre à Moscou, des principes libéraux fondés sur la liberté des peuples à disposer d'eux-mêmes, autrement dit des principes en contradiction totale avec la politique de la France en Egypte. [...]
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