Dernier épisode de la Bataille de Paris menée depuis 1958 par Maurice Papon contre la fédération de France du FLN, la manifestation du 17 octobre 1961 a fait irruption au conseil municipal de Paris le 27 octobre 1961. Claude Bourdet « veut mentionner [ici] les faits les plus graves et poser des questions » sur son déroulement
Dans la soirée du 17 octobre 1961, 30 000 algériens dont la plupart étaient des hommes mais aussi des femmes comme l'atteste la référence à cette femme enceinte frappée sur le ventre par un policier et des enfants de tous ages en cortège désarmés et silencieux défilent dans une vingtaine de quartiers de la capitale soit 15% de la population algérienne à Paris et dans la banlieue. Ils manifestent ainsi contre le couvre feu instauré par le préfet de police MAURICE PAPON et le ministre de l'intérieur ROGER FREY le 5 octobre 1961 à l'encontre des français musulmans d'Algérie. Ce couvre feu concerne une catégorie de citoyens considérés comme officiellement français ; il est donc fondée sur la ségrégation et viole ainsi les principes de la constitution de 1958 qui proclame que la France assure « l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion ».
Une telle mesure étant discriminatoire, le préfet de police fait en sorte qu'elle ne soit pas ordonnée « mais conseillée de la façon la plus pressante ». Les travailleurs algériens devaient alors s'abstenir de circuler la nuit dans les rues de Paris et de la banlieue parisienne, et plus particulièrement de 20h à 4h30 du matin […] Il était très vivement recommandé aux français musulmans de circuler isolément, les petits groupes risquant de paraître suspects aux rondes et patrouille de police ». Les débits de boisson possédés ou fréquentés par les algériens devaient également être fermées à partir de 19h. Maurice Papon imposa le couvre feu aux Algériens et à leurs lieux de rencontre, les cafés.
Cette mesure qui à première vue ressemble à une simple recommandation instaure en fait un véritable couvre feu et comme l'écrit Mohammed Harbi conduit à une certaine ghettoïsation des immigrés. L'état français reconnaît ainsi par cette mesure les immigrés comme une simple force de travail et ne leur reconnaît pas un minimum de loisirs. [Selon Ali Haroun, historien, « défendre aux algériens de sortir le soir, c'est pratiquement arrêter toutes las activités organiques, les éléments du FLN étant pratiquement tous des travailleurs du FLN qui ne peuvent militer qu'après les heures d'usine »]
[...] Cette manifestation s'inscrit clairement dans un climat de désespoir (ligne 28). Les habitants de l'ouest de Paris d'où vienne la majorité des manifestants souffrent de la répression conséquence du dispositif de lutte contre le FLN et qui s'est traduite par le gouvernement par une véritable chasse à l'homme Claude Bourdet ne cloue pas clairement au pilori la police parisienne , [ne prétend pas] qu'elle est composée clairement de sauvages, encore qu'il y ait bon nombre d'actes de sauvagerie et cela avant même la manifestation mais n'oublie pas non plus d'y faire allusion ; mais son projet est avant tout d'expliquer pourquoi ces hommes ont agi comme ils l'ont fait (citation du discours). [...]
[...] Certains décident de se constituer en police parallèle afin de faire justice eux-mêmes. Un comité permanent de coordination et de défense de la police regroupant trois organisations syndicales de policiers exige du pouvoir des exécutions de condamnés à mort et donc une justice plus rigoureuse ainsi qu'un couvre-feu pour les Nord- Africains. On peut d'ailleurs se demander comme le fait SYLVIE THENAULT si la base policière n'avait pas eu l'initiative sur ses supérieurs. Le 5 septembre 1961, le préfet de police ordonne de renvoyer dans leurs douars d'origine en Algérie les suspects arrêtés lors de contrôles d'identité. [...]
[...] Mais pour le protéger, les pouvoirs publics ont adopté une stratégie de rétention d'informations en refusant la publication de certains livres, en censurant certains films et en interdisant la consultation des archives jusqu'à une période relativement récente. Il faudra attendre 35 ans pour qu'un rapport officiel mette en relief les mensonges de la version officielle. En 1998, commandé par la garde des Sceaux Elizabeth GUIGOU ,le rapport de GEROMINI, avocat général de la Cour de cassation, sur les archives judiciaires relatives à la répression montre que les autorités gouvernementales de l'époque étaient informées des meurtres perpétrés par la police. L'évaluation des responsables et le bilan restent d'ailleurs encore aujourd'hui polémiques. [...]
[...] Une commission d'enquête fut d'ailleurs acceptée le 31 octobre mais fut ensuite suspendue. L'année suivante, tous les faits commis en relation avec les événements d'Algérie sont amnistiés. Le gouvernement de l'époque a déployé ses efforts pour éviter toute enquête pour empêcher une analyse de ces responsabilités. D'ailleurs en évitant cette enquête, le pouvoir politique couvre une police dont il a peur de ne pas matricer ses réactions. Il existe donc bien un secret d'État concernant le 17 octobre 1961 que certains ont néanmoins voulu rompre comme ici Claude Bourdet par son intervention. [...]
[...] Il ne poursuivra pas non France Observateur qui reprend le discours de Claude Bourdet. C'est dire qu'il se sent totalement à l'abri et couvert. Il s'explique moins sur les sévices qu'il ne justifie les nécessités du maintien de l'ordre la police parisienne a fait ce qu'elle devait faire Il intentera un procès à Claude Bourdet pour injures à fonctionnaire public car il avait écrit dans France Observateur le 28 décembre 1961 que Maurice Papon entre 1956 et 1958 avait été l'un des plus féroces artisans de la répression Claude Bourdet est relaxé. [...]
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