Le capitaine Cook ou le dieu qui meurt, Marshall Sahlins, mort de Cook, déification de Cook, Lono, Makahiki, commentaire de texte
La troisième et dernière expédition du capitaine Cook (1776–1779) arrivée dans la baie de Kealakekua en janvier 1779 et terminée (du moins pour son capitaine) un mois plus tard le 14 février fut le théâtre d'une scène à la fois historique et mythique.
Concordant selon le calendrier hawaïen avec la période du Makahiki, Nouvel An, cette aventure fut, grâce à un concours de circonstances et d'interprétations locales, intrinsèquement liée à celui-ci. Ce qui eut pour conséquence de créer un nouvel ordre au sein de l'île qui cristallisa toute l'organisation sociale et politique autour de Cook en tant que dieu Lono.
[...] Ceci montre que, quelle que soit l'opinion du peuple, les pouvoirs hawaïens d'ici-bas avaient seuls le droit d'objectiver publiquement leur propre interprétation. Ils pouvaient donner force et crédits à ce qui relevait de l'opinion et, en rendant à Cook les tributs destinés à Lono, ils engageaient pratiquement le peuple dans cette religion dont ils étaient les prophètes légitimes. » (Page 128, ligne 41.) Ainsi, une grande part de la responsabilité de la déification de Cook peut être mise sur le dos des prêtres hawaïens, qui de par leur statut, l'importance que leur accorde la population, ont pu transposer leur réalité mythique dans une métaphore historique. [...]
[...] Un nouveau microcosme social mué autour de la figure de Lono Cette situation unique pourrait s'apparenter, selon Sahlins, à une structure de la conjoncture. C'est à dire : « un ensemble de rapports historiques qui reproduit à la fois les catégories culturelles traditionnelles et qui leur donne de nouvelles valeurs à partir de leur contexte pragmatique (Sahlins 1981). » (Page 131, ligne 33.) Cook et son équipage en se mêlant à la culture et aux rites d'Hawaï établissent un pont entre le fait historique, l'expédition en elle-même et les traditions locales. [...]
[...] En décidant d'élever Cook au rang de l'une de leurs divinités, chacun devra selon son statut, selon la tradition, sa culture aussi, se positionner face à ce nouvel ordre complètement inédit. Ce qui n'est pas sans risque, surtout lorsque les frontières interpersonnelles régissant les rapports sont mouvantes ou tout simplement inconnues par les différents acteurs. C'est le cas au regard du « modèle paradigmatique de la politique hawaïenne d'usurpation . les hommes sont parfois (ou même souvent) contraints à protéger leur propre existence en infligeant une défaite au dieu » (page 120, ligne 16). [...]
[...] Car, au-delà de suivre la coutume, il y a au sein de la classe dirigeante (les prêtres/le roi – les chefs de guerre) des intérêts propres qui cristallise les relations autour de mêmes enjeux, mais pour des buts différents. A. Le pouvoir spirituel des prêtres Toutes croyances comportent ses représentants, ses adeptes. Les premiers, en sont généralement, les garants, les porte-paroles, et constituent des figures importantes dans la société à laquelle ils appartiennent de par leur statut, leur responsabilité à faire le lien entre le divin et la vie des hommes. Ce grand pouvoir dont ils disposent a donc un impact considérable sur la population. [...]
[...] Même après la mort de Cook, alors que les Britanniques et les chefs de Ka'awaloa entretenaient des rapports hostiles, les prêtres de Lono envoyaient chaque jour de la nourriture aux bateaux. » (Page 130, ligne 24.) Ainsi, au vu de la responsabilité des prêtres dans la déification de Lono, de leurs rapports indissociables et pourtant ambigus avec le roi et les chefs de guerres, il est clair que plus ces derniers “s'objectivaient comme le parti de Lono, plus ils assignaient à Cook le destin de victime du roi” (page 19, ligne car le roi et ses chefs ne peuvent réellement exercer leur souveraineté qu'en la soutirant à Cook/Lono. [...]
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