Plusieurs disciplines en sciences humaines et sociales se penchent de plus en plus sur la notion d'identité. Les définitions qui ont été fournies par les sociologues, les psychologues et les anthropologues varient selon la discipline et l'école à laquelle appartient le spécialiste. Toutefois, on s'accorde, de façon générale, à voir en "identité" un concept qui définit un état de la personne ou du groupe auquel on peut se référer dans l'explication de comportements individuels ou collectifs.
En anthropologie, le concept d'identité figure en étroite liaison avec un autre concept, celui de l'ethnie, avec qui il forme la notion d'identité ethnique ou d'ethnicité. Le contexte dans lequel émerge ce concept est celui de la décolonisation et des luttes d'indépendance déclenchées en Afrique et en Asie du sud-est vers les années cinquante. Comme jadis dit, plusieurs théories en sciences sociales ont été adoptées pour étudier la notion d'identité. Avant d'exposer les principes de la théorie que nous allons adopter. Nous commençons par un petit résumé des grandes théories de l'identité, en l'occurrence, les théories primordialiste, instrumentaliste et néo-marxiste.
L'approche dite primordialiste considère l'identité comme une donnée statique de la nature ou de la culture. Selon cette approche, l'identité est déterminée à priori par des facteurs extérieurs à l'expérience du vécu, et établie sur l'appartenance à une culture qui lui est « donnée » à la naissance ou même sur des bases biologiques.
Cette théorie a été critiquée pour son attachement à une vision essentialiste qui néglige les changements sociaux et les circonstances sociohistoriques dans la construction de l'identité . L'approche dite instrumentaliste ou mobilisationniste, quant à elle, ne voit dans l'ethnicité qu'une ressource mobilisable dans la conquête du pouvoir politique et des biens économiques. Dans les analyses instrumentalistes, les groupes ethniques sont définis comme des groupes instrumentaux artificiellement créés et maintenus pour leur utilité pragmatique.
De sa part, la théorie néo-marxiste a repris l'idée de l'ethnicité comme mode de nomination et de catégorisation, mais selon les représentants de la théorie néo-marxiste, il s'agit d'un instrument permettant la mobilisation autour des intérêts de classes. De ce point de départ, l'identité est manipulée par l'élite dominante qui attribue une identité donnée aux classes laborieuses afin de les maintenir sous sa domination. À ces modes de théorisation instrumentaliste de l'identité, on reproche souvent le fait d'accorder une place considérable à l'aspect matériel et utilitariste des relations interethniques.
Dans son texte "Ethnic groups and boundaries" (1969), Frederik Barth a montré que les identités sont crées et maintenues par le jeu des interactions entre les groupes. De ce constat, l'identité n'est plus une donnée de fait ou une distribution discriminatoire des groupes dans l'espace dépourvue de références temporelles. C'est une notion relative qui ressort autant du conflit, du rapport de force, de l'équilibre des structures. C'est un processus en formation, une situation historique.
La théorie que nous allons mettre à l'épreuve est donc à la fois interactionniste et constructiviste. Elle est interactionniste puisque les visions du monde particulières que les individus engagent dans les rencontres interculturelles n'existent pas indépendamment des situations d'interaction au cours desquelles les acteurs les mettent en œuvre en se proposant mutuellement des jeux de langage . Elle est aussi constructiviste dans la mesure où elle met l'accent sur les négociations de l'identité, sur les stratégies des acteurs, tant sur le plan matériel que symbolique. De ce fait, la construction de l'identité est située dans un contexte historique, social et politique, en tenant compte des facteurs matériels qui l'influencent, sans toutefois la déterminer complètement.
Carthage de la fin du deuxième siècle est une ville riche et prospère. Cette ville ne s'attarda pas à accueillir les premières notions du christianisme. Plus encore, elle donna à la nouvelle religion des martyrs et des hommes lettrés, apologètes, pasteurs et théologiens, pour défendre les principes de ce monothéisme émergeant contre les accusations des païens et des juifs. La communauté chrétienne, nous allons voir, n'était pas acceptée et son culte et ses rites n'étaient pas tolérés par la société païenne qui domine la vie politique et sociale aussitôt au niveau local qu'au niveau national.
Face à cette situation conflictuelle qui mettait, d'un côté, un groupe majoritaire dominant, et de l'autre un groupe minoritaire dominé, ce dernier va se construire une identité singulière. Tertullien disait déjà : "On ne naît pas chrétien, on le devient ." Notre but est de suivre cette identité en devenir. Ce processus incessant de formation de l'identité est au cœur de la problématique générale à laquelle notre travail prétend répondre. La question qui se pose est alors la suivante : quels sont les processus et les mécanismes par lesquels les chrétiens - dans leur interaction avec le monde de dehors et leur interaction entre eux-mêmes - acceptent, rejettent ou négocient des critères qui construisent leur identité et qui assurent le maintien de cette identité tout en assurant, d'une part, sa transmission à l'intérieur de la communauté, et en créant des frontières avec l'extérieur de l'autre part ?
[...] [261] Marcello MASSENZIO, Sacré et identité ethnique, Frontières et ordre du monde, traduit de l'italien par Federica GIARDINI et Valérie GIARDINI, Paris, Éditions de l'E.H.E.S.S., coll. Cahiers de l'Homme série XXXV p [262] Cyprien, Epist., X p [263] Simone DÉLÉANI, La spiritualité du martyre chez saint Cyprien secrétairerie d'État d'affaires générales, cité du Vatican p [264] Passio p [265] R. PACIORKOWSKI, L'héroïsme religieux d'après la Passion des saintes Perpétue et Félicité in revue des études augustiniennes, Volume Nº Année 1959, pp. 367-389. [266] Tertullien, Mart p [267] Cyprien, Epist., X p [268] Tertullien, Spect [269] Act. Sci., pp. 141-142. [...]
[...] revue, illustrée et annotée p Franz CUMONT, op. cit p Louis FOUCHER, op. cit., pp. 21-23. [58]Mireille HADAS-LEBEL, Les juifs en Afrique Romaine in Histoire communautaire histoire plurielle, La communauté juive de Tunisie, Tunis, Centre de publication universitaire pp. 101-124. [59]Mireille HADAS-LEBEL, op. cit pp. 114-115. Mireille HADAS-LEBEL, op. [...]
[...] DELATTRE, Gamart ou la nécropole juive de Carthage, Paris [183] Tertullien, Scap p [184] Éric REBILLARD, Les areae carthaginoises (Tertullien, Ad Scapulam : cimetières communautaires ou enclos funéraires des chrétiens ? in Mélanges de l'école française de Rome, Antiquité, Volume 108, Année 1996, pp 189. [185] Tertullien, Apol p : on n'épargne pas même les chrétiens morts : on arrache du repos de la sépulture, de cette sorte d'asile de la mort, des cadavres déjà méconnaissables, on déchire et on disperse leurs membres. [...]
[...] 82-83. ; [153] Cyprien, Unit pp. 47-48. [154] Tertullien, Apol pp. 82-83. [155] Charles MUNIER, op. cit p [156] Tertullien, Apol p. 82-83. : Et même s'il existe chez nous une sorte de caisse commune, elle n'est pas formée par une ‘somme honoraire', versée par les élus, comme si la religion était mise aux enchères. Chacun paie une cotisation modique, à un jour fixé par mois ou quand il veut bien, et s'il le veut et s'il le peut. [...]
[...] La portée du rite pénitentiel existe alors dans son fonctionnement comme pratique de réintégration sociale. Il est une solution opératoire apportée par l'Eglise pour assurer l'unité de la communauté chrétienne face aux pressions de la société. Bien qu'elle ait été au centre de controverses et de polémique, notamment celles qui se posent la question sur la possibilité, pour l'Eglise, d'accorder au nom de Dieu le pardon à un chrétien tombé dans une faute grave après le baptême[241], cette pratique sera, à la fin du Bas-Empire, instituée, valorisée et admise comme solution apportée à la crise globale qui caractérisera l'Empire romain[242] MARTYR ET CULTE DE MARTYRE Ce n'est ni sans raison profonde ni sans signification que nous consacrions la dernière partie du dernier chapitre à la thématique de la mort et du martyre. [...]
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