Guerres d’Hispanie, François Cadiou, clientélisme, Prise de Carthagène, Guerres lusitano-celtibères
A partir de la conquête de l'Hispanie, la guerre romaine occupe une place centrale dans la respublica et ses évolutions = question de l'impérialisme romain et des conséquences sur l'organisation de la Cité-Etat ; l'envoi annuel d'armées dans la péninsule affaiblit-il la militia traditionnelle ?
Historiographie introductive
- Thèse traditionnelle générale : l'armée civique (nationale, censitaire et non-permanente, fondée sur les adsidui, c'est-à-dire ceux concernés par le dilectus annuel, selon le cens) est victime d'une « crise d'efficacité » et ne remplit plus sa mission, car les besoins en hommes sont trop importants, et le maintien prolongé en campagne produit une paupérisation des citoyens engagés, d'où un appel croissant au volontariat (Marius en 107 contre Jugurtha), une professionnalisation et une paupérisation, un clientélisme plus grand et une privatisation des légions et des lotissements de vétérans i.e. la militia républicaine n'était pas capable de gérer l'imperium romain, FC en fait composition civique des légions est maintenue, paupérisation est relative, ce déclin de l'armée républicaine servirait surtout à montrer les limites des institutions républicaines et le caractère « naturel » du passage à l'Empire.
[...] Pompeius dans une ville alliée après son échec devant Numance en 140 L'hivernage est généralement itinérant, et ne conduit que rarement à développer des centres militaires avec garnison et l'extension urbaine correspondante, visant à sécuriser le territoire EX site de Renieblas III qui constitue une exception, puisqu'on pense y trouver un camp en dur datant de l'époque républicaine La guerre romaine passe par la maîtrise du territoire : construction d'un réseau limité de voies (essentiellement le long de la côté des Pyrénées à Gibraltar, avec deux axes en direction de la Meseta, vallée de l'Ebre, et en direction du nord-ouest de l'Ultérieure) EX la grande via Heraclea qui va de Citérieure en Ultérieure par la côte et la vallée du Guadalquivir On construit aussi un réseau de petits postes temporaires sur les trajets des armées et les axes de ravitaillement, et dans les villes alliées : les praesidia sont simplement un moyen d'assurer le ravitaillement et la logistique, plus qu'un quadrillage permanent du territoire Fiscalité provinciale militaire : elle est inexistante, sauf dans le cas du paiement des auxiliaires (création du denier ibérique), la solde (stipendium) est acheminée depuis Rome, qui conserve ainsi le contrôle des armées, l'ordinaire est assuré par le paiement du tributum de la part des alliés ; la solde (environ 4 as par jour, très inférieur au minimum de subsistance) a une forte valeur symbolique, c'est une indemnité tirée du Trésor (aerarium Saturni) exceptions : périodes de guerres civiles au cours desquelles Rome a du mal à assurer l'acheminement de la solde, ou se sert de la solde comme d'un moyen de pression sur les généraux EX Pompée écrit en 74 une lettre au Sénat pour réclamer qu'on lui adresse le montant de deux années de solde EX en 52, Pompée se voit accorder la somme annuelle de 1000 talents pour pourvoir à l'entretien de ses légions sur les deux provinces Butin : peut servir à débaucher les mercenaires de l'adversaire, à manifester la magnificence du chef romain, à offrir des cadeaux aux chefs barbares pour se les concilier EX en 195, Caton propose de payer 200 talents aux mercenaires Celtibères en échange de leur soutien, mais son consilium (conseil privé de magistrats) exige que cette somme soit tirée du butin Fournitures aux armées : acheminement depuis l'Italie (blé, armes, vêtements) avec retenue sur la solde, et de plus en plus approvisionnement sur place pour le blé, symbolisant le succès d'une conquête aux yeux des Romains, puisque le lien de dépendance est atténué, tandis que le marché local et le pillage sont source de l'alimentation quotidienne ; les guerres civiles ont un fort impact sur les irrégularités de la ponction réalisée localement EX en 49, Varron légat de Pompée exige de lourdes contributions en blé des villes soupçonnées de sympathie pour César, confondant dans ces réclamations citoyens romains et indigènes Recrutement provincial : Il a existé de manière récurrente quoique limitée au cours du 1er siècle, tel César en Ultérieure en 61 (10 cohortes), et trouve peut-être même ses origines au 2e siècle, mais les capacités de la communauté romaine en Hispanie devaient être limitées EX Cas de la legio vernacula : probablement constituée entre 52 et 49, par Pompée, sa composition est probablement de citoyens romains d'Hispanie (Hispanienses), en tout cas vernacula tient plus à la géographie du recrutement qu'au statut juridique Création de cette légion et d'autres recrutements civiques provinciaux en accord avec la lex Trebonia qui donnait aux légats de Citérieure et d'Ultérieure la possibilité de compléter les effectifs par des levées à l'intérieur des provinces EX César promet aux Romains de Citérieure qu'il les libérera immédiatement après la victoire sur Pompée, ce qui implique que de nbx citoyens romains étaient enrôlés dans les légions, en dehors du dilectus effectué à Rome Un parallèle peut être trouvé chez : EX César en Narbonnaise en 56 ; Cicéron en Cilicie en 51 Émigration civile et militaire : l'émigration civile a dû rester modeste, car même la faim de terres devait trouver sa solution en Italie, et non pas par la colonisation de l'outre-mer, puisque le citoyen ne conçoit que très peu son horizon d'avenir dans un cadre extérieur à sa propre cité (il peut par exemple acquérir des domaines sans y résider), évidemment l'exil politique des guerres civiles a pu favoriser des installations ; l'émigration militaire a été tout aussi limitée, même si des mariages et des établissements plus fréquents ont dû avoir lieu, mais on n'est sait trop rien EX Fondation d'Italica par Scipion en 206, qui refonde peut-être un oppidum ibère client et y laisse ses blessés, mais il ne s'agit probablement pas d'une colonie de peuplement ex nihilo EX Installation de 4000 hybridae, fils de soldats romains et de femmes hispaniques, dans la cité turdétane de Carteia, selon le droit latin, suite à leur revendication au Sénat Sur les Baléares : EX Fondation des colonies latines de Palma et Pollentia par Metellus Balearicus en 123-122 sur la base d'un noyau de démobilisés Un exemple de colonie ex nihilo : EX Valentia ou Valence, fondée à la fin du 2e siècle, colonie italique comme l'atteste l'archéologie, mais aussi l'analyse anthropologique des squelettes, les ex-voto, les traces de l'alimentation, etc., peut-être la première colonie entièrement romano-italique fondée en Hispanie Les Auxilia Externa : Le mercenariat est mentionné très rarement, et il s'agit alors de débaucher des troupes ennemies ; l'essentiel des auxiliaires provient des contingents fixés aux cités alliées (//formula togatorum), habituées à un fonctionnement clientélaire aristocratique, la fourniture d'auxiliaires est imposée par Rome aux peuples après une défaite du peuple indigène ou pour établir la paix avec Rome EX le roi celtibère Thurrus est vaincu après le siège d'Alce par Sempronius Gracchus, qui a capturé ses enfants, il accepte alors d'entrer en guerre contre ses anciens alliés qui ne l'avait pas défendu EX la ville de Nertobriga, en 152, est tenue de fournir cent cavaliers à Marcellus, gouverneur de Citérieure, pour obtenir la paix Ces auxiliaires formaient en moyenne entre le tiers et le deux tiers de l'armée romaine en campagne, soit environ 10.000 hommes chaque année, et jusqu'à 40.000 contre Numance en 133, équilibrant généralement le nombre de légionnaires et socii, de plus les gouverneurs veillaient autant que possible à répartir la charge du recrutement sur les différents alliés, dont la contribution individuelle fut donc probablement modeste, et dépendait du territoire de campagne (qui assurait aussi les bases arrières et les centres de ravitaillement) : l'intégration dans l'armée romaine durait une campagne seulement, et les unités d'auxiliaires conservaient leur encadrement et leur fonctionnement propre, Rome ne cherchait donc pas à passer d'un recrutement civique à un recrutement provincial et indigène, tout en sachant toujours en tirer profit Conclusion : L'effort militaire constant en Hispanie n'est probablement pas à l'origine des crises que Rome traverse sous la République, même si ces crises se reflètent dans la Péninsule, tandis que l'émiettement politique ne permit pas une soumission rapide des peuples indigènes, et que le monde barbare hispanique fournissait aux magistrats romains une opportunité de prestige très importante (surtout qu'en l'Orient était calme), la conquête fut donc parcellaire et discontinue. [...]
[...] Synthèse 197 création de deux nouvelles prétures pour les provincia (=charge de gouverneur sur un espace plus politique et militaire que géographique) Hispanie : les premières provinces créées loin de Rome (après les deux îles Sardaigne et Sicile) Effort militaire discontinu : pas de guerre avec tous les peuples en même temps, et pas soumission de tous les peuples par les armes Lieux de guerre : fragmentation ethnique, politique et même géographique des peuples, donc objectif militaire toujours limités ; noyaux sont vallées de l'Ebre et du Guadalquivir, et littoral, conquête graduelle et pragmatique 218 Romains en Catalogne contre Carthage 217 Passage de l'Ebre 212 Guerre dans le sud de la Péninsule 209 Prise de Carthagène par Scipion 208-206 Bataille de Baecula et d'Ilipa 197 Révolte indigène EX Révoltes de 197, qui restent limitées : gouverneur M. Helvius en Espagne Ultérieure face aux rois Culcha (17 oppida) et Luxinius (villes de Carmo et de Bardo) ; préteur Semp. [...]
[...] Servir en Hispanie : les effectifs romains et italiques 3. Les formes du combat Deuxième partie : Armées et territoires 4. [...]
[...] Les fournitures aux armées : une décentralisation indispensable, mais partielle 9. Formes et signification du recrutement provincial Résumé Table des cartes 1. [...]
[...] Hibera in terra miles : les armées romaines et la conquête de l'Hispanie sous la République (218-45 av. J.-C.) - François Cadiou (2008) FRANÇOIS CADIOU, Hibera in terra miles : les armées romaines et la conquête de l'Hispanie sous la République (218-45 av. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture