Cette inscription qui date de 403/402 avant JC est un décret honorifique faisant l'éloge des Samiens en raison « de leur bonne conduite à l'égard des Athéniens ». Samos, membre de la ligue de Délos est un des principaux points d'appui de la puissance athénienne dans l'Egée Orientale. En 440, la cité se soulève pour protester contre l'hégémonie athénienne mais est soumise par Périclès après un long siège. Les Samiens ne cessent alors de réitérer leur soutient aux Athéniens pendant toute la guerre du Péloponnèse, constituant une importante base navale. A partir de l'expédition de Sicile menée par Alcibiade et Nicias, qui tourne court en 413, la démocratie athénienne est mise à mal. La vie politique athénienne se signale ainsi par son individualisme et par le jeu politique personnel mené par les démagogues et les sophistes. Des factions extrêmement personnalisées (comme le « groupe d'Alcibiade ») se multiplient et jouent un rôle déstabilisateur qui menace les institutions. Les manœuvres d'Alcibiade permettent alors le coup d'Etat oligarchique de 411. Les démocrates sont chassés de la cité et les oligarques prônent un retour aux lois de Solon et aux institutions ancestrales. Samos sert alors de refuge aux démocrates durant le régime des 400 : c'est là que les soldats et les marins athéniens, fidèles à la démocratie, affirment qu'ils constituent l'assemblée souveraine d'Athènes, malgré l'éloignement géographique. La démocratie est rétablie à Athènes dès 410 et les Samiens sont récompensés de leur fidélité par l'octroi de la citoyenneté athénienne en 405. Mais la défaite contre Sparte en 404 remet une nouvelle fois la démocratie en cause. Les modérés, les démocrates et les oligarques s'affrontent. Ces derniers s'imposent par la force et le conseil démocratique des 500 est remplacé par le régime des Trente, véritable tyrannie au sens grec du terme, sans aucun caractère représentatif. Ce coup d'Etat est plus radical et réactionnaire que celui de 413-411 et le régime des Trente ne se maintient que par la force. Cependant, pendant l'hiver 404-403, un contre pouvoir démocratique s'organise et oblige les Trente à se replier à Eleusis. Athènes restaure alors rapidement la démocratie entre 403-399 et refait son unité politique sous l'archontat d'Euclide. Ce décret honorifique accorde donc l'éloge aux Samiens en raison de leur fidélité aux démocrates athéniens, alors qu'en 404, l'île de Samos est tombée aux mains du spartiate Lysandre qui y a installé une garnison.
Dans ce décret, le conseil décide d'accorder l'éloge aux Samiens, précise les privilèges relatifs à cet éloge, et organise la constitution d'une délégation de Samiens et d'Athéniens pour négocier avec Sparte (l1 à 16). Un éloge particulier est ensuite accordé à Posés de Samos (l16 à 24) ainsi qu'à ses fils (l25 à 36). Il est alors intéressant de se demander dans quelle mesure ce texte de circonstance permet de rentrer intimement en contact avec les rouages de la démocratie athénienne restaurée. Derrière ce décret honorifique, on peut en réalité lire en filigrane toute l'organisation de la démocratie restaurée en 403 à Athènes. Le décret a aussi une portée diplomatique non négligeable au lendemain de la guerre du Péloponnèse.
[...] On remarque dans le document que les décisions d'accorder l'éloge aux Samiens puis à Posés de Samos et à ses fils n'ont pas été prises au même moment puisqu'une partie du personnel politique a été renouvelée, par tirage au sort la tribu Pandionis exerçait la prytanie, Agyrrhios du dème de Collyté était secrétaire ; La tribu Erechtéis exerçait la prytanie, Képhisophôn du dème de Paiana était secrétaire (l17)). Ce renouvellement du personnel politique est un des garants de la démocratie. _Le Conseil est désigné par le sort et compte 500 membres, cinquante par tribu. [...]
[...] Aucun décret ne prévaut contre une loi. La plus grande puissance devait être celle de la loi et non celle du peuple : il s'agit bien de la restauration d'une démocratie modérée Le décret honorifique : l'illustration de la démocratie retrouvée sous l'archontat d'Euclide 1. Les décisions que le peuple a prises : le décret comme mode d'expression de la souveraineté populaire _ Le décret commence rituellement par la formule il a plu au conseil et au peuple l17), et le terme peuple ne se retrouve pas moins de 16 fois dans l'ensemble du décret. [...]
[...] La publicité était une condition préalable à la démocratie. Les Athéniens avaient bien des archives publiques mais il fallait mettre bien en vue dans les lieux publics ce sur quoi on voulait attirer l'attention du public. Dans une contrée où le calcaire et le marbre se trouvent partout, la forme de publication la plus naturelle était l'inscription sur une dalle ou une stèle de marbre ou de pierre. Chaque année, l'Assemblée votait plus de 400 décrets, mais seuls certains décrets sont publiés sur la pierre, tels les décrets honorifiques, qui constituent de loin le groupe le plus nombreux parmi les inscriptions qui nous sont parvenu. [...]
[...] La démocratie est rétablie à Athènes dès 410 et les Samiens sont récompensés de leur fidélité par l'octroi de la citoyenneté athénienne en 405. Mais la défaite contre Sparte en 404 remet une nouvelle fois la démocratie en cause. Les modérés, les démocrates et les oligarques s'affrontent. Ces derniers s'imposent par la force et le conseil démocratique des 500 est remplacé par le régime des Trente, véritable tyrannie au sens grec du terme, sans aucun caractère représentatif. Ce coup d'Etat est plus radical et réactionnaire que celui de 413-411 et le régime des Trente ne se maintient que par la force. [...]
[...] Mais le décret honorifique apparaît aussi comme un outil diplomatique, réaffirmant les alliances et les coopérations alors que Sparte menace Athènes de son hégémonie. Cette diplomatie se traduit de façon concrète en 365 lorsque Samos retombe aux mains des Athéniens : la loyauté de Samos envers Athènes se trouve récompensée. Bibliographie _La démocratie athénienne à l'époque de Démosthène, Mogens Herman Hansen, Belles Lettres _Histoire politique du monde grec antique, Marie-Françoise Baslez, Nathan, 2003. [...]
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