Lors des campagnes de fouille de 1965 et 1979, on a retrouvé sur le site de la cité de Kymé en Eolide, deux piliers de marbre portant des inscriptions sur les deux faces. Il s'agit en fait d'une série de 8 décrets émis par la cité en l'honneur d'une citoyenne, Archippè, fille de Dikaiogénès. Les 2 documents que nous allons étudier ici en sont des extraits. A l'origine, on pense que ces 2 piliers étaient surmontés de 2 blocs de marbre, portant d'autres inscriptions en l'honneur d'Archippè mais ils ne nous sont pas parvenus. Selon les différents historiens qui ont étudié ces inscriptions, les 2 piliers se trouvaient soient de chaque côtés de l'entrée du bouleutérion, soit à l'entrée d'un monument funéraire, nous verrons pourquoi ils ont retenu ces 2 hypothèses. Chacun des 8 décrets retrouvés font état des largesses commises par Archippè envers sa cité pendant l'époque tourmentée de la formation de la province romaine d'Asie (v. 130-100 av. JC), ainsi que les marques de reconnaissance qui lui ont été attribué en retour. Il s'agit là d'un témoignage précieux du rôle de premier plan exercé dans sa cité par Archippè, la seule citoyenne « grande » bienfaitrice qui nous soit connue.
En effet, l'évergétisme est une institution ancienne, qui compte parmis les plus caractéristiques de la Grèce antique, mais pendant longtemps elle n'a concerné que les hommes. L'evergesiê en grec, peut se définir comme l'échange de bienfaits entre la collectivité et ses différents membres, fondement d'une vie politique normale. Ainsi, la cité attend de ses citoyens qu'ils consacrent leur temps, leurs biens et leurs moyens au bien collectif ; en retour, les citoyens qui ont montré leur dévouement attendent de leur cité un signe de reconnaissance. L'honneur obtenu incite ensuite à de nouveaux bienfaits qui appellent de nouveaux honneurs et ainsi de suite. Cette institution concernait donc au départ la communauté des citoyens masculins, adultes, et en mesure de participer à la vie politique et militaire. Puis elle s'est élargie aux étrangers et aux esclaves. A l'époque hellénistique et surtout à partir du IIe siècle, la situation change. Certaines femmes de l'aristocratie accèdent à une certaine autonomie, notamment financière, qui leur permet désormais d'apporter leur contribution à la vie de la cité par leurs bienfaits comme c'est le cas ici pour Archippè. Mais la proportion des femmes bienfaitrices reste bien inférieure en comparaison avec leurs homologues masculins.
Nous pouvons donc nous demander comment cette citoyenne a pu devenir une grande bienfaitrice, quelle a été la nature de ses bienfaits envers sa cité et comment cette dernière l'a récompensé. Pour cela nous dresserons tout d'abord le portrait de cette femme hors du commun, puis nous étudierons les différents bienfaits qu'elle fit pour sa cité, enfin nous verrons les honneurs parfois exceptionnels qu'elle reçut en retour.
[...] Enfin, la défunte aurait été mise en terre dans un enclos officiel réservé semble-t-il aux notables et aux grands évergètes de la cité. Ainsi nous pouvons voir qu'Archippè, agissant à l'égal des hommes, reçut les mêmes honneurs qu'eux, et ceci plus particulièrement dans une partie de cette cérémonie funèbre. Le corps d'Archippè fut escorté par le gymnasiarque et les éphèbes, alors que les femmes étaient tenues à l'écart du gymnase, institution virile par excellence chez les grecs. Cependant il semble qu'Archippè fut la seule défunte à qui ce privilège fut accordé. [...]
[...] JC, Tibère aurait généreusement aidé Kymé, qui fut par conséquent rebaptisée Césarée. Bibliographie Ouvrages généraux - Philippe GAUTHIER, Les cités grecques et leurs bienfaiteurs (IVe Ier s. av. Contribution à l'histoire des institutions, Bulletin de correspondance hellénique, supplément XII Ouvrages spécialisés - Anne BIELMAN, Femmes en public dans le monde hellénistique, SEDES - Sous la dir. de Catherine LORAUX, La Grèce au féminin, Les Belles Lettres, 2003. [...]
[...] Mais la proportion des femmes bienfaitrices reste bien inférieure en comparaison avec leurs homologues masculins. Nous pouvons donc nous demander comment cette citoyenne a pu devenir une grande bienfaitrice, quelle a été la nature de ses bienfaits envers sa cité et comment cette dernière l'a récompensé. Pour cela nous dresserons tout d'abord le portrait de cette femme hors du commun, puis nous étudierons les différents bienfaits qu'elle fit pour sa cité, enfin nous verrons les honneurs parfois exceptionnels qu'elle reçut en retour. [...]
[...] Elle restait une citoyenne, au même titre que les autres, qui grâce à sa fortune avait pu soutenir sa patrie. Archippé ne fut pas la seule femme à jouer un rôle public à l'époque hellénistique. En effet, nous possédons des témoignages d'autres femmes bienfaitrices. De plus, dans les cités, le pouvoir était désormais aux mains de quelques familles des élites civiques ou les femmes pouvaient jouer un rôle, dans le but d'assurer au clan familial la plus large représentation publique et une main-mise sur les postes religieux. [...]
[...] Pour finir, nous pouvons dire qu'Archippè, comme ses homologues bienfaiteurs et bienfaitrices, font office de trait d'union entre les rois hellénistiques d'un passé à peine révolu et les Romains et empereurs d'un futur désormais tout proche. En effet, les grands bienfaiteurs de l'époque hellénistique, continuent l'œuvre d'évergétisme des rois et préfigurent celle des romains. Ainsi, un peu plus d'un siècle après les réalisations d'Archippè, un citoyen romain ami de Kymé se nommant L. Vaccius Labéon, aurait reconstruit et agrandit à ses frais le gymnase des neoi, tout en en assurant le fonctionnement par des dons prélevés sur ses biens. De même, après les destructions provoquées par le tremblement de terre de 17 ap. [...]
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