« Voici en quoi consistait la cryptie. Les chefs des jeunes gens envoyaient de temps à autre dans la campagne, tantôt ici, tantôt là, ceux qui passaient pour être les plus intelligents, sans leur laisser emporter autre chose que des poignards et les vivres nécessaires.
Pendant le jour, ces jeunes gens, dispersés dans des endroits couverts, s'y tenaient cachés et se reposaient : la nuit venue, ils descendaient sur les routes et égorgeaient ceux des hilotes qu'ils pouvaient surprendre. Souvent aussi, ils se rendaient dans les champs et tuaient les plus forts et les meilleurs. »
(PLUTARQUE, Vie de Lycurgue, 28.)
Dès l'époque archaïque, la cité de Sparte est un modèle pour les autres cités, aussi bien dans le domaine politique comme de l'éducation, à partir des réformes menées par le législateur Lycurgue. Ainsi, aux yeux de nombreux auteurs et philosophes grecs comme Xénophon ou Plutarque, l'éducation spartiate où l'agogé représente l'éducation idéale pour les Grecs, conforme à la morale, à la vertu et à la discipline.
Pour l'étude de l'éducation à Sparte, nous disposons de quelques sources littéraires telles que Plutarque, Platon ou Xénophon. Dans l'œuvre de Plutarque : Vies, le chapitre consacré au législateur de Sparte Lycurgue, l'auteur présente les institutions permettant le fonctionnement, la gestion de la cité et la formation des jeunes spartiates. Il faut noter, par ailleurs, que Plutarque (Ier siècle avant J.C) est un admirateur de la cité, de sa constitution et de Lycurgue, sans doute à cause des liens existant entre le législateur, la cité de Sparte et le dieu Apollon Pythien. En effet, avant de mener les réformes à Sparte, Lycurgue aurait consulté la Pythie. Or, Plutarque a exercé la fonction de prêtre d'Apollon à Delphes.
Une pratique, un rite surprend dans l'agogé spartiate : la cryptie, apparue au 5ème siècle avant J.-C., dont Plutarque nous raconte le déroulement. Et l'on sent une certaine opposition de l'auteur à cette épreuve réservée aux néoï à Sparte et appartenant à l'élite. Selon Plutarque, la cryptie n'aurait pas été instaurée par Lycurgue.
Concernant la cryptie, peu de sources littéraires sont disponibles exceptés les témoignages de Plutarque, Xénophon et les scholies de Platon.
L'intérêt de l'étude de ce passage de la vie de Lycurgue vise à connaître le déroulement et le sens de la cryptie dans la formation de certains jeunes spartiates.
On peut donc se demander en quoi consiste le rite, l'épreuve de la cryptie ? Et de quelle manière constitue-t-elle une étape importante dans la vie des spartiates pour accéder au statut d'homoioi c'est-à-dire de citoyen spartiate ?
Pour cela, on s'intéressera d'abord à la fonction de la cryptie comme un rite de passage vers l'âge adulte et ses fonctions puis, en dernier lieu, à la manière dont la cryptie révèle et reflète les valeurs de la société spartiate et de son éducation.
[...] Et tout citoyen avait le droit de vie et de mort sur les hilotes dans la cité. La phase de mise à mort de l'hilote est normalisée, le choix d'un individu pris au hasard comme représentant de la communauté inférieure (les hilotes) par un individu choisi pour incarner la supériorité d'un groupe (citoyens, cryptes). Tout ceci dans le but supposé de maintenir et de préserver l'existence des Spartiates. Les cryptes seraient donc les défenseurs de la cité et de ses habitants, on retrouve ici le sens civique, l'importance de préserver l'intérêt général : une valeur essentielle de la vie à Sparte. [...]
[...] La cryptie : un rite de passage nécessaire pour devenir et être citoyen de Sparte ? La cryptie : les acteurs en présence et son déroulement Plutarque évoque les jeunes gens qui sont les personnes devant passer et réussir l'épreuve de la cryptie car cela constitue une étape importante de leur éducation, formation pour devenir citoyen et hoplite. Néanmoins, il semble que tous les jeunes spartiates ne sont pas concernés par cette épreuve, car, selon Plutarque, seuls : ceux qui passaient pour être les plus intelligents pouvaient y participer. [...]
[...] Le rôle des cryptes est bien de défendre leur cité et leurs habitants. En effet, les Spartiates se défendent contre un ennemi intérieur : les hilotes. La cryptie : une protection contre la menace des hilotes ? Malgré son caractère formateur à la vie hoplitique, du point de vue des Spartiates, la cryptie est avant tout une chasse aux hilotes. Les hilotes ne sont ni des hommes libres ni des citoyens, ils cultivent la terre pour les citoyens et sont considérés comme des esclaves. La définition de leur statut est plutôt ambiguë. [...]
[...] C'est une manière de gagner ou de mériter sa place parmi les homoioï. Selon Jeanmaire, le dressage par l'agogé et la probation de l'aretè dont l'agogé est à la fois l'enseignement et la démonstration, est essentiel pour prendre place parmi les homoioi. La cryptie est ainsi une épreuve sélective et compétitive réservée à certains jeunes. La cryptie peut ainsi apparaître comme le couronnement de l'agogé, de la vie à la dure L'émulation invite à se distinguer de cette épreuve difficile, qui associe courage et débrouillardise. [...]
[...] Ces valeurs sont en contradiction avec l'esprit égalitaire de la société spartiate qui est pourtant, à la base de l'admiration des auteurs et des autres cités de l'époque. Bibliographie Sources - Platon, Lois, T. - Plutarque, Vies, T. I Belles lettres, Paris Ouvrages spécialisés - Ducat, J. Les hilotes, BCH supplément XX, Paris - Jeanmaire, H., Couroi et Courètes : essai sur l'éducation spartiate, Paris - Lévy, E., Sparte : histoire politique et sociale jusqu'à la conquête romaine, Paris, - Vernant, J.P., L'individu, la mort, l'amour, Folio Histoire, Gallimard, Paris - Vidal- Naquet, P., Le chasseur noir, La découverte, Paris, 1991. [...]
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