Dans la culture romaine, le christianisme introduit une double rupture : dans la relation au corps, globalement considérée de manière plus négative que dans la culture classique, parce que marquée par le péché originel et, pour ce qui nous intéresse, dans l'acception de la mort comme passage, dans l'attente d'une nouvelle forme de vie éternelle.
C'est par comparaison avec cette rupture que l'on peut comprendre la relation à la mort et particulièrement au corps mort dans la culture romaine polythéiste. Cette culture associe à la mort et au corps mort une idée de souillure, souillure qu'il convient de laver, de façon à rétablir le bon ordre des choses, impliquant nette séparation entre le monde des vivants et le "monde des morts". Les rites funéraires sont à comprendre comme une gestion du corps. Mais qui parle de "monde des morts" indique que la mort n'ôte pas toute existence au sujet. Il convient donc d'examiner ce qu'est ce monde des morts.
Ainsi, d'un côté, à Rome, la mort est une souillure qui met en contact deux mondes qui doivent rester normalement séparés, celui des morts et celui des vivants, ce qui implique que l'on fasse disparaître l'objet de cette souillure par des rites funéraires; d'un autre côté, cependant, en l'absence d'un imaginaire du salut, se pose la question d'une commémoration du défunt parmi les vivants (seule forme de survie possible), en particulier autour de ses restes.
On se demandera donc comment s'articulent ces deux exigences et plus précisément on se demandera dans quelle mesure les rites funéraires, tout en se présentant comme des gestes d'hommage autour la dépouille mortelle, sont destinés, à Rome, à lui donner un nouveau statut en l'évacuant du monde des vivants.
[...] - Division sexuée dans le deuil : Rôle spécifique des femmes : toilette du mort et cris et plaintes, y compris sous forme de berceuse / hommes : sobriété, hommage public sous forme de discours ordonné. C. Formes altérées de rite funéraire comme signe de dégradation La preuve que les funérailles sont une commémoration du vivant est que toute modification des formes rituelles implique une dégradation sociale, une exclusion de la cité. Prenons l'exemple de la mort de Jules César, en mars 43 av. [...]
[...] On trouve là l'idée, qui est développée ensuite par les stoïciens, que l'âme humaine est une parcelle du divin et qu'en tant que son émanation, elle y revient. Les conceptions platoniciennes de Crantor ne sont pas incompatibles avec les consolations stoïciennes. Mais ce que Cicéron élabore pour sa fille n'est jamais que la traduction de certaines de ses idées politiques, exprimées dans la République (écrit dans les années 50). En effet, Cicéron considère que toutes les âmes ne peuvent prétendre à l'apothéose : d'où l'insistance, dans la consolation, sur les vertus de Tullia (chez Lactance, Institutions Divines 20). [...]
[...] En bas à gauche de l'image, probablement représentation de l'enclos externe du tombeau. - Au fronton, figure de la défunte voilée inscrite dans le fronton et supportée par des aigles (position de la divinité titulaire dans un temple) ; porte ouverte pour l'accès de la famille ; sur le côté, représentation plus traditionnelle dans des imagines clipeatae des trois enfants défunts de la défunte, qui sont probablement dans le même tombeau. - Figuration probable de l'intérieur du tombeau : défunte sur un lit funéraire ; un grand thymiatérion (encensoir) ; une vieille femme accomplissant des gestes rituels devant un autel (qui ne pouvait toutefois se trouver dans la cella à l'intérieur du temple mais qui se trouvait normalement dehors, au bas des escaliers). [...]
[...] Or Hateria a sans aucun doute un tombeau. Dans tous les cas, ces représentations corporelles et en nudité du défunt, qui empruntent à la nudité héroïque des dieux, ne traduisent en aucune façon une idée de corps glorieux et éternel et donc d'une solidarité corps âme après la mort : le corps dans sa nudité idéale symbolise l'âme. Conclusion La commémoration est sans doute celle du corps tel qu'il était dans la vie, aussi bien au moment de la déploration funèbre que dans les représentations figurées sur la tombe ; pourtant, on ne doit pas négliger la richesse et la cohérence de l'image romaine du groupe des mânes : elle implique que l'on reconnaît (même très dégradée) une forme de persistance de l'être dans l'outre-tombe qui, dans les spéculations philosophiques, peut aller jusqu'à l'idée d'une éternité des âmes, sans préoccupation aucune pour le corps. [...]
[...] Historiographie : l'historien des religions Fr. Cumont, Recherches sur le symbolisme funéraire des Romains, Paris (Bibliothèque archéologique et historique, 35) avait proposé la théorie d'une évolution progressive des pratiques funéraires vers une croyance dans l'immortalité de l'âme / l'historien des religions J. Scheid, dans Quand faire, c'est croire. Les rites sacrificiels des Romains, Collection historique, Aubier, Paris et dans son article Contraria facere : renversements et déplacements dans les rites funéraires AION p. 117-141 a rendu aux rites païens toute leur signification, même à l'époque impériale, en montrant qu'ils ne véhiculent aucune idée de l'immortalité de l'âme. [...]
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