Ce texte est extrait de Brutus de Cicéron. Cicéron (106-43) est issu d'une famille d'Arpinum (proche de Rome, municipe depuis 160). Il a eu une formation en rhétorique, droit et philosophie à Rome qu'il a complétée par un voyage en Orient en 79/78, notamment à Rhodes et Athènes. Il maîtrise à la fois le Grec et le Latin. Grand orateur de la république romaine, il a été un grand homme d'Etat grâce à ses capacités et non à ses victoires ou à sa famille. Il fut défenseur de l'ordre républicain traditionnel. C'était un homme nouveau, sénateur. Il a été assassiné sur ordre de Marc Antoine en 43, après sa proscription par le second triumvirat.
Brutus a été rédigé vers 46 avant JC. Il s'agit d'un dialogue fictif entre les trois amis Atticus, Brutus et Cicéron. Pour rédiger ce texte, Cicéron s'appuie sur le Liber annalis d'Atticus, sorte de chronologie des principaux magistrats et orateurs de la république romaine. Ici, Cicéron reprend les idées énoncées en 54 dans le De Oratore et montre que l'art oratoire s'est développé progressivement au cours de la république romaine jusqu'à atteindre la perfection avec Hortensius qui lui-même cède le pas à Cicéron. La thèse développée dans le De Oratore et illustrée par les nombreux exemples du Brutus est la suivante : « de tous les arts, l'art de la parole est le plus difficile parce qu'il exige à la fois des qualités naturelles de corps et d'esprit, une large pratique et une solide éducation littéraire, philosophique et juridique ».
Ce texte a été composé dans un contexte difficile pour Cicéron qui s'est soumis de mauvaise grâce à César et souffre de voir l'absence de liberté politique sur le forum et donc l'inutilité de son talent d'orateur. Cicéron en profite donc pour revenir sur les belles années de la république où l'art oratoire et la rhétorique permettaient de dominer la vie sociale et politique de Rome. Il s'agit aussi d'un moment où l'éloquence de Cicéron est remise en question par de jeunes orateurs dont Brutus car celle-ci est jugée trop pompeuse et redondante, l'idée qu'on puisse ne pas le trouver attique est insupportable à Cicéron.
Cet extrait s'inscrit dans un passage consacré aux (§169-170) et de ce que Cicéron appelle l'urbanitas (§170-172).
A la lecture de ce texte, nous pouvons nous demander si la présence d'orateurs provinciaux au début du Ier siècle avant notre ère à Rome témoigne d'une certaine intégration italienne, ou si une supériorité romaine subsiste.
Pour cela, nous étudierons dans un premier temps les orateurs cités par Cicéron et l'art oratoire en général, avant de nous intéresser à l'accent romain tel que le définit Cicéron dans cet extrait.
[...] Lucius Aelius Stilo était un chevalier romain originaire de Lanuvium. Cicéron lui reconnaît de grandes compétences en grammaire et rhétorique même si celui-ci apparemment ne prit pas directement la parole en public. Il est aussi question de Caepio pour qui Aelius aurait composé un discours (l.12), il appartient à la famille de Brutus. Il faut s'attarder ici quelques instants sur ce dernier que Cicéron considère comme un grand orateur et sur lequel il a l'ascendant d'un maître, il appartenait à la haute aristocratie romaine. [...]
[...] L'éloquence grecque a dû s'adapter au monde romain et à la langue latine. Dans les hautes sphères de la société, l'apprentissage de l'éloquence passait par une excellente éducation mais aussi des études approfondies et difficiles, à cet apprentissage s'ajoutait celui des règles sociales et juridiques. Etre un bon citoyen de l'aristocratie romaine nécessitait donc de posséder des connaissances élevées dans tous ces domaines, connaissances acquises à Rome mais aussi et surtout directement en Orient à Athènes et Rome tout comme l'a fait Cicéron. [...]
[...] L'art oratoire La première qualité requise pour faire un bon orateur selon Cicéron est le talent : talent oratoire (l.6) et grande facilité naturelle (l.8). En effet, il ne suffit pas de bien manier la rhétorique pour être un bon orateur, encore faut il être capable de parler en public. Cependant, ce à quoi Cicéron semble attacher le plus d'importance est l'apprentissage : profonde connaissance des lettres grecques et latines (l.6/7) et l'entraînement : très exercé (l.8). En effet, le fondement même de l'art oratoire repose sur la connaissance des enseignements de la rhétorique grecque notamment. [...]
[...] Problématique : les orateurs étrangers du Ier siècle avant notre ère d'après Cicéron, intégration italienne ou supériorité romaine ? I. Les orateurs A. Les orateurs provinciaux B. Les autres orateurs C. L'art oratoire II. Le coloris d'urbanité A. Des mots différents B. Un accent spécifique C. [...]
[...] Il montre ici que les mots ne suffisent pas à faire d'un étranger un Romain, mais que les habitants de la Ville ont un accent différent de ceux des autres régions, y compris d'autres cités plus petites. Pour appuyer cette idée, il prend l'exemple de Théophraste (ligne 45 et suivantes) qui fut vexé de se voir reconnu pour un étranger, lui qui habitait Athènes depuis longtemps et qui parlait très correctement (l.49/50). Il y a un parallèle direct dans la pensée de Cicéron entre Rome et Athènes : c'est ainsi, je pense, que chez nous tous les gens de la ville ont, comme là-bas les gens de l'Attique, un accent particulier (l.53). [...]
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