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« Graecia capta ferum victorem cepit et artis intulit agresti Latio ». Cette déclaration d'Horace synthétise l'influence réciproque entre le monde grec et le monde romain. À partir de la basse période hellénistique, l'émergence politique de Rome en train de constituer son empire phagocyte les anciennes cités-États grecques, qui exercent, en réponse, leur hégémonie culturelle et artistique (artis intulit). Cette paradoxale victoire du vaincu, qu'Horace illustre par le polyptote du verbe « capio » (Graecia capta… cepit) remonterait au début du IIe siècle avant notre ère. En effet, Tite-Live présente la troisième guerre de Macédoine (171-168) comme une victoire militaire romaine, mais aussi comme une victoire culturelle grecque, puisque la célébration du triomphe renvoie largement aux célébrations de jeux panhelléniques.
[...] Ce paradoxe de l'ennemi traité en allié (l'hostis socius), rejoint celui qu'on trouve chez Horace du vaincu vainqueur (le captus capiens). En principe, le vainqueur devrait être celui qui prend, que ce soit par l'impôt ou par l'annexion territoriale. Or, nous dit Tite-Live, Rome au contraire est un vainqueur qui donne, puisqu'Aemilius « donna des lois » (leges [ . ] dedit). On retrouve l'infinitif du même verbe, dare, dans la suite de la phrase. Rome est donc présentée comme une puissance bienfaitrice qui pérennise une région. [...]
[...] Rome, en choisissant de combattre Persée en faveur des cités grecques, se fait arbitre du monde. En établissant elle-même les lois du royaume vaincu, elle en devient l'ordonnatrice. En somme, même si ce sont les festivités qui dominent le passage, Tite-Live nous présente tout au long du texte des enjeux très sérieux : on ne quitte en fait jamais les series res. Enfin, ce récit est l'occasion d'un portrait élogieux, celui de Paul Émile, qui incarne à lui seul la gloire aristocratique de Rome et cristallise une certaine nostalgie à l'époque de Tite-Live. [...]
[...] Paul Émile jouit en outre de la comparaison avec le roi de Macédoine. En effet, il partage les richesses : « on vit régner une telle abondance, et les vivres furent à si bon marché, qu'Aemilius put les prodiguer aux particuliers, aux villes et aux nations, non seulement pour leurs besoins du moment, mais encore pour les besoins de leur voyage ». Cette distribution particulièrement généreuse vient s'opposer à la concentration des richesses dans le seul palais royal (regia), dont l'abondance est marquée par l'accumulation. [...]
[...] Le récit de Tite-Live porte donc déjà les germes de ce que sera l'Empire romain, à savoir un gigantesque territoire réuni par la seule puissance de Rome. Tite-Live dessine donc à travers le récit de cette victoire la préfiguration du futur Empire romain. Toutefois, il ne s'agit pas encore d'une domination impériale : sur conseil de Caton, le Sénat romain refuse l'annexion de la Macédoine suite à cette victoire, se contentant de lui imposer un lourd tribut. En somme, le récit de Tite-Live est l'occasion de célébrer l'hégémonie de Rome sur le monde - puisqu'elle est la seule capable de réunir l'Europe et l'Asie - , puissance qui perdure au moment où Tite-Live écrit. [...]
[...] La victoire contre la Macédoine n'est finalement pas présentée comme une victoire contre le monde grec, puisque les Romains sont au contraire tout disposés à admirer leurs coutumes, mais comme une victoire pour le monde grec, que Rome débarrasse généreusement de ses rois pour lui donner de meilleures lois. C'est ainsi que Tite-Live active l'image de la Rome libératrice des Grecs. C'est en effet officiellement pour libérer la cité de Rhodes et le royaume de Pergame, menacés par les velléités expansionnistes de Persée de Macédoine, que Rome avait participé à la deuxième guerre de Macédoine contre Philippe V (200-196). Il s'agissait donc, dans le discours officiel, d'une guerre de libération des cités grecques : T. [...]
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