La Mésopotamie n'a jamais digéré la dissolution de l'Empire ottoman et demeure instable depuis la fin de la première guerre mondiale. A cette situation explosive s'est ajoutée à partir des années 1960 la raréfaction des ressources en eau sous les effets combinés de l'accroissement démographique, de l'augmentation de la consommation individuelle et d'une gestion parfois désastreuse de l'irrigation des terres agricoles. Héritière de l'Empire ottoman, la Turquie se trouve dans une situation particulièrement favorable sur ce plan. Mieux organisée, et bénéficiant de ressources élevées, elle a lancé dans les années 1970 un grand plan de valorisation des eaux du Tigre et de l'Euphrate qui a accentué la crise dans les pays situés en aval : la Syrie et l'Irak. Si, comme le soutient Habib Ayeb dans son ouvrage , un conflit armé entre ces états semble écarté aujourd'hui car aucun état n'est en mesure de s'opposer à la Turquie, d'autres armes sont utilisées par les états pénalisés.
La stabilisation de la région ne passe pas uniquement par la résolution des problèmes alimentaires liés à l'eau, mais ce règlement est un préalable incontournable. Inversement, la faiblesse des diplomaties et des administrations arabes ne permet pas la construction d'un plan rationnel de répartition. Ainsi, malgré ses problèmes de politique intérieure, la Turquie se trouve en position d'acteur incontournable dans les négociations de paix au Moyen-Orient par sa puissance militaire, le soutien des puissances occidentales et le contrôle qu'elle exerce sur la plus grande partie des ressources naturelles d'eau potable de la région. Pour étudier le poids relatif de ce dernier argument et comprendre la situation actuelle des pays riverains des deux fleuves, nous aborderons successivement les aspects géographiques et l'histoire parallèle des états et du partage des eaux du Tigre et de l'Euphrate depuis la dissolution de l'Empire ottoman
[...] Affaibli par les troubles kurdes, la scission du parti Baas et ses mauvais rapports avec ses voisins, l'Irak est contraint d'accepter les revendications iraniennes. Les négociations sont menées par l'Algérie et aboutissent à la signature des accords d'Alger le 6 mars 1975. La ligne de Thalweg devient la frontière officielle et les deux parties s'engagent à abandonner leur soutien aux Kurdes. Au lendemain de la révolution islamique en Iran, Saddam Hussein, craignant le soulèvement des populations chiites vivant dans les marais du Sud-est du pays, utilise l'argument du tracé de la frontière pour déclarer la guerre à l'Iran. [...]
[...] Le débit du Tigre n'est pas intégré ici car la Syrie n'exploite pas actuellement ce fleuve. Pour compléter ce tableau noir, la Syrie dispose de réseaux hydrauliques en mauvais état qui perdent jusqu'à 50% de leur débit et ne maîtrise pas les techniques modernes d'irrigation. La plupart des terres irriguées le sont par submersion ou à la planche ce qui double le volume d'eau nécessaire et pollue les terres puisque l'évaporation concentre la teneur en sel[15]. De plus, alors qu'elle dépend déjà à 67% de la Turquie, la Syrie perd le contrôle des autres sources d'eau, d'une part sur l'Oronte avec son récent éloignement du Liban, d'autre part depuis qu'Israël occupe le plateau du Golan suite à la guerre des 6 jours en 1967 et interdit de fait l'exploitation des sources du Jourdain. [...]
[...] Si depuis ses tensions ont disparu, les traités qui ont suivi la Première Guerre Mondiale ont également engendré au Moyen-Orient une situation conflictuelle aggravée par la création de l'Etat d'Israël. Sur cette carte explosive s'est greffé depuis les années 1970 une situation de stress hydrique sous le double effet de la démographie et du contrôle unilatéral des eaux par les puissances non arabes. Si l'eau n'a jamais été la raison principale d'un des nombreux conflits que la région connaît depuis la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, cette question est omniprésente. [...]
[...] Données sur la géographie humaine La région parcourue par le Tigre et l'Euphrate et au-delà de leurs trois principaux riverains est constituée d'une mosaïque humaine. Si l'Islam domine globalement la région, de nombreuses tendances y sont représentées ainsi que des chrétiens et des juifs. La composition ethnique est également très variée avec une imbrication géographique complexe des peuples, illustrée par les cartes en annexe. Les Turcs Ethnie dominant largement la population de la Turquie, on trouve également des minorités turques dans le Nord de la Syrie, dans le Nord de l'Irak et en particulier dans la région de Mossoul ainsi qu'au Nord-Ouest de l'Iran. [...]
[...] Dès la fin du XIXème siècle, les occidentaux s'intéressent à cette région telle la Grande-Bretagne qui convoite son pétrole et en particulier celui de la région de Kirkouk. Lorsqu'éclate la première guerre mondiale, l'Empire ottoman choisit le camp de l'Allemagne et de l'Empire austro-hongrois contre les alliés. En pleine guerre, le 16 mai 1916, et après plusieurs mois de travaux entre Paul Cambon, ambassadeur de France à Londres, et Sir Edward Grey, secrétaire d'État au Foreign Office, la France, représentée par François Georges-Picot, et la Grande- Bretagne, représentée par Edward Grey signent un accord secret nommé plus tard accord Sykes-Picot Approuvé également par la Russie et l'Italie, il prévoit un partage de toute la région comprise entre la mer Noire, la mer Méditerranée, la mer Rouge, l'océan Indien et la mer Caspienne. [...]
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