La formule « il n'y a pas de risque zéro » revient comme un leitmotiv sitôt qu'une catastrophe conduit un responsable politique ou un dirigeant industriel à donner son avis sur cette dernière.
[...] La fonction incantatoire de la formule il n'y a pas de risque zéro devient plus claire : il s'agit d'occulter certaines réalités. S'il s'agissait d'amener les citoyens à accepter l'idée d'un niveau inévitable de risque inhérent au fonctionnement même des systèmes naturels et sociaux, on pourrait admettre la formule ; c'est d'ailleurs une fois accepté le caractère inéluctable d'un risque résiduel qu'il devient possible de travailler à le réduire et d'en promouvoir la gestion. Mais la formule permet aussi, en énonçant une tautologie que personne ne peut refuser, d'occulter cette réalité extrêmement récurrente que les personnes exposées au risque sont rarement celles qui profitent des bénéfices tirés de la prise de risque. [...]
[...] De façon plus pragmatique, si on soulève le voile que cette expression place sur la question des risques, on voit apparaître une question autrement plus complexe qui est celle du niveau de risque acceptable Quel est le niveau de risque qu'une société est prête à accepter ? On sait que le risque industriel au 19ème s. apparaissait peu ou prou comme le tribut à payer au Progrès et cette logique est encore bien présente dans notre société, même si elle est parfois concurrencée par celle du principe de précaution. Ce n'est pas l'expression risque zéro qui géographiquement a un sens, mais c'est le champ qu'elle dévoile, celui d'un risque non nul dont il faut déterminer le seuil d'acceptabilité. [...]
[...] Deuxième point : tout risque revêt une dimension spatiale et une dimension temporelle étroitement liées entre elles. L'extension spatiale du risque diffère en fonction du type de risque (les surfaces impactées par une avalanche, un glissement de terrain, des inondations, ou l'explosion d'un réacteur de centrale nucléaire comme à Tchernobyl, varient considérablement) et en fonction de l'occurrence de l'événement considéré (des crues annuelles n'ont pas les mêmes conséquences que des crues centennales). Ajoutons en plus qu'un nouveau type de risque est apparu à notre époque, nouveau risque dont la particularité est de concerner la planète dans sa globalité : le global change pose à l'humanité la question de son devenir sur une planète dont la température moyenne sera de plusieurs degrés Celsius supérieure à ce qu'elle est aujourd'hui ; les risques liés à la pollution, s'ils ont une dimension régionale parfois très préoccupante, concerne aussi la planète de façon globale. [...]
[...] Le risque zéro existe-t-il ? Quelques remarques pour introduire le sujet d'un point de vue géographique. Il est bien connu et souvent répété que le risque zéro n'existe pas Cette formule revient en effet comme une incantation dans la bouche de tel ou tel responsable dès lors qu'un accident ou qu'une catastrophe vient heurter la tranquillité de nos contemporains. En dépit de l'évidence qu'elle martèle, chacun sent bien que la formule recèle une fonction parapluie car elle permet ou a pu permettre à certains responsables politiques et/ou économiques de se dédouaner de leur mission en matière de gestion des risques. [...]
[...] Certes les risques accompagnent la plupart des activités humaines et si les hommes acceptent de les prendre c'est qu'ils tirent bénéfices (de toute nature) de ces activités. Si on met en parallèle la notion de risque acceptable et celle des enjeux des risques encourus notamment des enjeux financiers, on est alors conduit à demander : celui qui décide qu'un risque est acceptable est il celui qui s'expose à ce risque ? Celui qui s'expose au risque est-il celui qui en tire profit ? Poser ces questions signifie qu'on a déjà la réponse. [...]
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